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Société - Liban

Détenu torturé à mort : ONG et responsables réclament des comptes

Des photos illustrent la "torture monstrueuse" de la victime, qui a entraîné une crise cardiaque.

Détenu torturé à mort : ONG et responsables réclament des comptes

Une salle d'audience vide dans le Palais de justice de Beyrouth, le 30 août 2022. Photo JOSEPH EID/AFP

Le Centre libanais pour les droits de l'homme (CLDH) et plusieurs responsables libanais ont réagi samedi à l'annonce du décès d'un détenu syrien, Bachar Abdel Saoud, qui aurait été torturé à mort cette semaine pendant son interrogatoire par le service de la Sécurité de l'État, appelant cet organisme à rendre des comptes pour ce décès. L'impunité est malheureusement monnaie courante au Liban.

Le 31 août, le détenu avait été arrêté et transféré en détention à Bint Jbeil, dans le sud du Liban, avec d'autres suspects. "Il est mort trois heures après son arrestation et a été soumis à de graves tortures et à des chocs ayant entraîné une crise cardiaque", a indiqué une source judiciaire à l'AFP. Selon cette source, les membres des forces de sécurité ont voulu "obtenir des aveux du défunt" suspecté de "diriger une cellule" affiliée au groupe jihadiste État islamique (EI). Des images vues par l'agence de presse française montrent le corps de Bachar Abdel Saoud couvert d'ecchymoses et d'entailles. Des traces de tortures étaient également visibles sur les corps de ses codétenus, également suspectés d'appartenir à l'EI. Après examen de la dépouille, le commissaire du gouvernement près le tribunal militaire Fadi Akiki avait demandé le placement en détention du lieutenant responsable du centre de Bint Jbeil et de quatre autres agents de ce bureau.

Torture monstrueuse
"Selon le rapport du médecin légiste, le détenu syrien est décédé après avoir été torturé pendant son interrogatoire", a écrit samedi le CLDH dans un tweet. "Le médecin a noté que la victime a été violemment torturée pendant sa détention au siège de la direction générale de la Sécurité de l'État au Liban-Sud, ce qui a entraîné une crise cardiaque", ajoute l'ONG. Elle a évoqué des photos qui "illustrent une torture monstrueuse", notamment des "coups de fouets, des bleus et de graves blessures". Une source judiciaire a également indiqué que le détenu syrien est "mort trois heures après son arrestation" et a "été soumis à de graves tortures et à des chocs ayant entraîné une crise cardiaque".

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Le CLDH a par ailleurs rappelé que "ce n'est pas la première fois qu'un service de sécurité se protège derrière le prétexte du terrorisme lorsque des accusations de torture sont adressées à son encontre", alors que vendredi, la Sécurité de l’État avait uniquement commenté cette affaire en précisant que le détenu décédé était membre du groupe État islamique. Il a encore déploré la non-application de l'article 65 du code pénal qui criminalise la torture et l'article 47 qui permet aux détenus d'être accompagnés d’un avocat pendant leur interrogatoire après leur interpellation. L'ONG a enfin demandé qu'un "comité de médecins légistes soit désigné pour examiner la dépouille et qu'un organisme de sécurité non affilié à la Sécurité de l'État soit nommé pour enquêter sur cette affaire". Elle a enfin souligné la nécessité pour les auteurs du crimes "de rendre des comptes et qu'ils n'échappent pas aux sanctions sous aucun prétexte, conformément à l'article 65 du code pénal". 

Plus tôt dans la journée, le président du CLDH Wadih al-Asmar avait réclamé qu'"un service de sécurité autre que la Sécurité de l'État arrête dans l'immédiat ceux qui ont mené l'interrogatoire de la victime". "Si le commandement (de ce service) est incapable de contrôler la brutalité de ses agents, il vaudrait mieux qu'il démissionne", a-t-il martelé.

Indignation
Des responsables politiques ont réagi à cette mort sous la torture. Le ministre sortant de l'Environnement Nasser Yassine a qualifié ce qui est arrivé au détenu syrien de "crime abject qui viole les droits l'homme". "Le bureau du procureur général est appelé à mener une enquête sérieuse sous l'égide d'un juge d'instruction, qui ne soit pas militaire, et à respecter les normes des investigations dans le cadre des crimes de torture", a-t-il plaidé.

Même son de cloche du côté du côté des députés de la contestation. L'un d'eux, Firas Hamdane, a demandé que ce dossier soit transféré à la "Cour de justice pour qu'elle mène une enquête, effectue un suivi et engage des poursuites". Il a aussi appelé à ce que "les auteurs du crime soient frappés des sanctions les plus sévères" et à que le rôle du comité de protection de la torture soit activé via l'adoption des décrets d'application. L'élu a enfin soulevé la nécessité d'appliquer l'article 47 du code pénal. Une revendication brandie également par Melhem Khalaf, député de la contestation et ancien bâtonnier de Beyrouth, qui a exigé que "toute personne impliquée dans la mort de ce détenu rende des comptes".

"Tout comme nous nous sommes élevés contre tout ce qu'a commis le régime sécuritaire libano-syrien pendant l'occupation syrienne, nous nous élevons aujourd'hui contre la mise en place d'un État policier au Liban", a écrit de son côté Cynthia Zarazir sur son compte Twitter. "Nous appelons à ouvrir les dossiers des violations et de torture au sein des prisons et autres lieux de détention", a-t-elle ajouté. 

Malgré l'adoption d'une loi au Liban en septembre 2017, les services de sécurité ont déjà été accusés d'avoir recours à la torture. En mars 2021, Amnesty international avait dénoncé des détentions arbitraires et "des actes de torture" infligés à une vingtaine de réfugiés syriens, dont des mineurs. L'ONG avait souligné "des traitements cruels et discriminatoires" des services de sécurité.

Le Centre libanais pour les droits de l'homme (CLDH) et plusieurs responsables libanais ont réagi samedi à l'annonce du décès d'un détenu syrien, Bachar Abdel Saoud, qui aurait été torturé à mort cette semaine pendant son interrogatoire par le service de la Sécurité de l'État, appelant cet organisme à rendre des comptes pour ce décès. L'impunité est malheureusement monnaie...

commentaires (5)

Pour arrêter définitivement la torture par les agents de l'Etat, il serait nécessaire que les 3 plus hauts dirigeants du pays signent conjointement une circulaire de quelques lignes à toutes les forces de l'ordre en rappelant la loi introduite par Me Ghassan Moukheiber de 2017.

Céleste

11 h 27, le 04 septembre 2022

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Commentaires (5)

  • Pour arrêter définitivement la torture par les agents de l'Etat, il serait nécessaire que les 3 plus hauts dirigeants du pays signent conjointement une circulaire de quelques lignes à toutes les forces de l'ordre en rappelant la loi introduite par Me Ghassan Moukheiber de 2017.

    Céleste

    11 h 27, le 04 septembre 2022

  • Meme si c’est un terroriste, c’est inhumain donc inacceptable et impardonnable!

    Michele Aoun

    01 h 34, le 04 septembre 2022

  • Même si elle ne s’ensuit pas de mort, toute torture devrait être interdite et durement réprimandée. Et "les syriens ou les terroristes ont fait pire" n’est pas une excuse valable. Soit on est humain, soit on est un animal. Il n’y a rien entre les deux.

    Gros Gnon

    23 h 20, le 03 septembre 2022

  • Ce n'est pas nouveau, et rien ne va changer.

    Esber

    20 h 10, le 03 septembre 2022

  • Nos service dits de securite sont composes de bas en haut de l'echelle de brutes sous-developpees. Le probleme c'est que les hommes politiques du pouvoir et les juges a leur ordres le sont aussi. Kellon ya3ne kellon !

    Michel Trad

    19 h 36, le 03 septembre 2022

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