Le patriarche maronite, Béchara Raï, a commenté samedi l'affaire de l'arrestation de l’archevêque maronite de Haïfa et de Jérusalem, Moussa el-Hage, qui a été interrogé pendant 13 heures par les autorités libanaises lors de son passage à Ras Naqoura, alors qu'il rentrait au Liban d'Israël en possession de 460.000 dollars et de médicaments, mettant en avant l'aspect "humanitaire" du travail du vicaire patriarcal.
"Ce qu'a fait l'évêque el-Hage est une action humanitaire", a déclaré le prélat au monastère Mar Sarkis et Bakhos de Rayfoun, dans le Kesrouan. Il a rappelé que des Libanais "sont présents en Terre sainte et qu'ils ont un rôle, une présence, indépendamment de la politique israélienne juive". Ces Libanais de différentes communautés se sont réfugiés en Israël après le retrait de l’armée israélienne de la bande frontalière qu’elle contrôlait, en mai 2000. "Ils ont dit que nous sommes des collaborateurs (avec l'État hébreu, ndlr), mais nous refusons de devenir des cœurs de pierre", a-t-il lancé.
L'archevêque, qui réside au siège de l’évêché de Jérusalem, avait été arrêté lundi matin par la Sûreté générale à son arrivée à Ras Naqoura, sur ordre du commissaire du gouvernement près le tribunal militaire, Fadi Akiki. Son passeport, son portable et les dons en sa possession lui ont été confisqués. Il lui est reproché d'avoir acheminé des fonds en provenance d’un État ennemi ainsi que l’importation de médicaments israéliens. Cette affaire a suscité l'indignation de nombreuses figures chrétiennes et qui se disent "souverainistes" face au Hezbollah, accusé d'être à l'origine de cette arrestation "pour envoyer un message" au patriarche, qui le critique régulièrement.
Si le patriarche n'avait pas commenté personnellement cette affaire depuis lundi, le conseil restreint permanent de l’Église maronite avait, lui, dénoncé une "farce sécuritaire, judiciaire et politique".
De son côté, le chef du groupe parlementaire du Hezbollah Mohammad Raad a commenté l'affaire Moussa el-Hage de manière indirecte, en déclarant que "la collaboration avec l'ennemi est une trahison nationale et un crime" et que la collaboration "n'a pas de confession". "Mais que faut-il faire si quelqu'un qui est puni pour collaboration devient un représentant de toute une communauté et que toute cette communauté se soulève pour le défendre ?", a-t-il demandé lors d'une commémoration au Liban-Sud.
Commission ministérielle
Par ailleurs, le ministre sortant de la Justice, Henri Khoury, qui s'est entretenu vendredi avec Mgr Raï à Dimane, au siège estival du patriarcat, a affirmé dans un communiqué publié samedi qu'il fallait "résoudre le problème à sa base" et qu'il allait dans ce cadre "réactiver la commission ministérielle liée à la situation des réfugiés libanais en Israël". Cette commission doit "mettre sur pied un bureau de liaison constitué d'un juge haut placé et de représentants du ministère de la Défense, de la Sûreté générale afin de recevoir et traiter les demandes de retour au Liban", a-t-il expliqué.
Plus de dix mille Libanais appartenant aux communautés chrétienne, druze et chiite ont fui en Israël en mai 2000. Certains étaient membres de l'Armée du Liban-Sud, supplétive de l'État hébreu et d'autres travaillaient en Israël, notamment en tant qu’ouvriers et ouvrières dans les usines et les fermes de la Galilée, ou comme gardiens et femmes de ménage dans les hôtels de la côte nord israélienne. Au cours des vingt dernières années, plus de la moitié ont quitté Israël soit pour revenir au Liban, soit pour s’installer dans un pays tiers, comme le Canada, les États-Unis, l’Australie, l’Allemagne ou la Suède. Ceux qui ont décidé de rentrer au Liban ont purgé diverses peines de prison et perdu leurs droits civiques. Beaucoup d’entre eux n’ont pu, durant des années, voter ou obtenir un passeport, voire même un permis de conduire.
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Et ceux qui oublient le passé glorieux du kidnapping des otages, des assassinats de diplomates ou de politiciens, ou des attentats suicides ne méritent pas d’être au Liban. Qu’ils aillent se réfugier en Syrie ou en Iran.
Cedrus Fidelis
01 h 45, le 26 juillet 2022