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Culture - Exposition

La force des couleurs, la puissance des images

La galerie Tanit présente « Fireworks », une exposition en solo d’Aram Jughian, et, en parallèle, trois regards féminins sur la portée de l’art photographique.

La force des couleurs, la puissance des images

Une photo de Randa Mirza de sa collection « Beirutopia ». Photo DR

Longtemps, la couleur ne fut qu’un complément du dessin. Les peintres commençaient par le trait et la ligne pour ainsi créer des formes et des volumes et ensuite y appliquer la couleur. Pour Aram Jughian, elle est l’une des spécificités essentielles de son art.

Peintre autodidacte né au Liban en 1959, il expose ses œuvres depuis 1975 dans les galeries à travers le Liban et la Russie. En 1993, il reçoit le prix Sursock.

À la galerie Tanit, l’ensemble de ses toiles, réunies sous l’intitulé « Fireworks », revisitent les quatre saisons, plongent dans les profondeurs aquatiques, nous promènent à travers les églantiers, les chênes et les oliviers, remplissent les cieux de lumière, mais restent la résultante d’un mélange fondé sur l’abstraction et la couleur.

Aram Jughian, « Age of the Aquarius ». Photo DR

Diplômée du New York Institute of Photography (NYIP), Joumana Jamhouri est spécialisée en photographie industrielle et architecturale ainsi qu’en photographie de paysage et documentaire. Avec Rania Matar, photographe libano-américaine établie aux États-Unis, et Randa Mirza, artiste protéiforme installée en France et travaillant principalement avec la photographie et la vidéo, elles exposent des œuvres aux résonances singulières et différentes à la galerie Tanit, en parallèle de l’exposition solo d’Aram Jughian.

Laissez la couleur venir à nous

Ce qui intéresse avant tout Aram Jughian, c’est l’opposition, la complémentarité et les nuances des couleurs qui prennent le dessus sur les lignes dessinées. Délaissant la construction, il laisse la relation des couleurs créer entre elles un ensemble uniforme et lumineux.

L’objectif de Joumana Jamhouri se concentre sur des objets industriels pour laisser ensuite l’œuvre prendre des chemins inattendus. Photo DR

L’organisation du tableau est pensée en fonction des rapports de proximité, d’étendue et de surface des couleurs. S’éloignant du réel, la couleur s’empare de la toile et joue davantage sur les sensations que sur la réalité. Lorsqu’il met du vert par exemple, l’artiste ne cherche pas à représenter un paysage, mais place la quantité de couleur nécessaire pour faire vibrer les couleurs et créer le contraste maximum qui produira un effet sur les sens du spectateur. Rouge, jaune, bleu et vert s’emploient de manière libre, sans contraintes, la couleur définit ainsi les formes, prenant l’apparence de taches juxtaposées ou d’à-plats qui laissent entrevoir, au détour d’un regard plus averti, des formes humaines, animales ou végétales. Les taches se transforment alors en volume absorbé par les contrastes chromatiques de la toile. Qu’il s’agisse du calme d’un bleu clair, d’un vert foncé apaisant ou d’un jaune pétillant plein d’énergie, les couleurs réussissent, après un moment d’échange entre le spectateur et l’œuvre, à réveiller les sens. Elles laissent place à un mélange de teintes et de nuances qui disparaissent au profit d’une étrange conception, conférant aux œuvres une énergie créatrice. La couleur est là, avec toute son intensité. Elle remue la sensualité et permet au spectateur de se réjouir de cette dimension à portée du regard. Situé à la rencontre de l’abstrait et du figuratif, l’art d’Aram Jughian demeure cependant complexe. Nous regardons ses toiles, mais sommes-nous en mesure de les comprendre ? L’artiste s’attache à reconstituer un univers que le spectateur se doit de déchiffrer ou par lequel simplement se laisser envoûter, tantôt par la force rugissante des couleurs, tantôt par leur plénitude. « En laissant la couleur nous remuer, disait Matisse, et toucher la profondeur de notre âme, elle nous émeut, nous met en mouvement et nous fait ainsi entrer dans la joie la plus pure. »

Portrait de Alia, 9 ans, par Rania Matar, de la série « Femme-enfant ». Photo DR

Dans le viseur féminin

Trois femmes, trois objectifs et une même passion : la photographie. Spécialisée dans la photographie industrielle, Joumana Jamhouri concentre son objectif sur des objets industriels pour laisser ensuite l’œuvre prendre des chemins inattendus. Ainsi, à regarder les profils en aluminium juxtaposés, la ville de Beyrouth apparaît comme par enchantement, avec ses immeubles éventrés et son urbanisme désordonné. Il n’est plus question d’objets mais d’architecture et le sujet échappe à son maître et acquiert une essence nouvelle, une identité propre à lui.

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Pour Rania Matar, ce sont les notions d’identité et d’individualité qui sont au cœur de ses recherches. Et si elle se penche sur l’adolescence, ses remous et ses pertes de repères, c’est pour mieux mettre en exergue cette période de transition éphémère et de découverte émotionnelle. Aya, Nour, Léa, Katie et les autres traversent son objectif et viennent, comme par magie, se perdre dans la couleur des matières et dans la présence des formes. Quant à Randa Mirza, son projet Beirutopia, par un travail de déconstruction, questionne la nature des images et leurs usages sociaux et vise à capturer les images de panneaux d’affichage qui représentent des bâtiments insérés dans leur environnement. L’étrangeté de ses photos dénonce le décalage et la dichotomie entre un rêve vendu et la triste réalité de Beyrouth et reflète la transformation actuelle de la ville.

« Fire Works » d’Aram Jughian

« Trois regards » de Joumana Jamhouri, Rania Matar et Randa Mirza

À la galerie Tanit jusqu’au 5 août.

Longtemps, la couleur ne fut qu’un complément du dessin. Les peintres commençaient par le trait et la ligne pour ainsi créer des formes et des volumes et ensuite y appliquer la couleur. Pour Aram Jughian, elle est l’une des spécificités essentielles de son art. Peintre autodidacte né au Liban en 1959, il expose ses œuvres depuis 1975 dans les galeries à travers le Liban et la Russie....

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