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Économie - Repère

Le point sur le repli stratégique des banques libanaises des marchés étrangers depuis 2019

Plusieurs groupes bancaires ont liquidé leurs actifs lors des trois dernières années notamment marquées par la grave crise que traverse le Liban.

Le point sur le repli stratégique des banques libanaises des marchés étrangers depuis 2019

L’Égypte a vu deux grands groupes bancaires libanais quitter son marché depuis 2019. Photo de la banque centrale égyptienne par Orhan/Bigstock

L’actualité récente du secteur bancaire libanais a été marquée par la finalisation du rachat des actifs de Bank Audi en Égypte (Bank Audi Egypt) par le groupe émirati First Abu Dhabi Bank (FAB). Complétée mi-juin, soit plus d’un an après le démarrage du processus, cette fusion marque officiellement la sortie de la banque libanaise du marché égyptien. Il ne s’agit pas d’un cas isolé : ces trois dernières années, un certain nombre d’enseignes libanaises ont liquidé une partie de leurs actifs à l’étranger, tantôt poussées par les contraintes imposées par les régulateurs des pays où elles étaient implantées, tantôt pour faire face aux défis liés à la crise dans laquelle le Liban s’enfonce depuis 2019. Ces retraits se sont faits parfois à grand renfort d’annonces, parfois dans la plus grande discrétion. L’Orient-Le Jour revient sur ces opérations.

Avant et pendant la crise

Avant la crise, 17 groupes bancaires libanais étaient implantés dans près de 30 pays répartis en parts quasi égales entre l’Afrique, l’Asie et l’Europe, en plus de l’Australie (une filiale comportant plusieurs agences) et du Canada (bureau de représentation), et ce via des filiales, des sociétés associées, des succursales, ou encore des bureaux de représentation. C’est ce qui ressort des données de 2018 publiées par l’Association des banques du Liban (ABL), selon son service de presse que nous avons contacté. Un même groupe bancaire peut regrouper plusieurs banques distinctes au Liban.

Selon une copie de l’almanach (rapport de fin d’année) 2021 de l’ABL que nous avons consultée via une source bancaire (un document qui n’était pas accessible sur le site de l’organisation malgré le lien dédié), seul un groupe bancaire a disparu de la liste des banques implantées à l’étranger (Jammal Trust Bank), mais l’implantation de tous les acteurs du pays ne s’étend plus que sur 24 pays.

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Les listes de l’ABL n’intègrent pas les établissements étrangers détenus par des capitaux libanais, mais sans lien juridique avec les enseignes locales, comme AstroBank à Chypre ou Pikes Peak National Bank (PPNB) aux États-Unis. Les entités déconsolidées (retirées des bilans comptables dans un souci d’optimisation) ne sont pas non plus listées dans les almanachs de l’ABL. Ce serait notamment le cas de Byblos Bank qui serait pourtant toujours présent en République démocratique du Congo, selon une source à l’ABL.

Égypte

Le départ de Bank Audi d’Égypte a été scellé 15 ans après son implantation sur ce marché, via le rachat des 4 agences de l’enseigne Far East Bank. Un réseau qui s’est considérablement développé depuis, avec plus de 40 agences ouvertes sur tout le territoire et des actifs totalisant 5,3 milliards de dollars selon les annonces faites en 2021.

En janvier de la même année, l’Égypte a vu un autre poids lourd du secteur bancaire libanais lever l’ancre, lorsque BLOM Bank a annoncé la cession de l’intégralité de ses activités dans ce pays à l’établissement bahreïni Bank ABC (Arab Banking Corporation B.S.C.). La transaction a été conclue pour un montant de 420 millions de dollars (un montant que nous avons reconfirmé cette semaine), scellant la vente d’un réseau comptant 39 agences (selon les chiffres de l’almanach 2021).

Chypre

L’île accueillait une dizaine d’enseignes libanaises. Elle n’en aura bientôt plus aucune, avec la fermeture annoncée des 7 banques encore sur place – Bankmed, Bank of Beirut, Banque BEMO, BBAC, BLOM Bank, Crédit libanais et IBL Bank – prévue d’ici à fin 2022.

Deux banques s’étaient déjà retirées : Byblos Bank, qui avait annoncé en décembre dernier la vente de son agence à AstroBank, une banque chypriote détenue par des capitaux libanais. Lebanon and Gulf Bank (LGB) avait notifié ses clients dès 2021 de sa volonté de quitter ce marché. Chacune de ces 9 enseignes opérait une succursale unique sur l’île directement gérée par la maison-mère à Beyrouth. Une spécificité qui était autorisée par la réglementation chypriote et liée à la proximité géographique entre les deux territoires.

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Cette vague de départs a été provoquée par une rigidification drastique des modalités de garanties des dépôts imposées par la banque centrale chypriote aux succursales des banques libanaises pour poursuivre leurs activités. Comme AstroBank, la Société générale Bank-Cyprus (« SGBCy »), fililale totalement chypriote de la SGBL, qui est enregistrée en tant que société de droit chypriote entièrement autonome, ainsi que la Banque SBA – détenue à 99 % par le groupe Banque libano-française (BLF) – ne sont pas concernées par cette situation.

Irak

L’Irak faisait partie des pays où les banques libanaises avaient débarqué en masse depuis le milieu des années 2000 et avaient même longtemps tenu bon malgré l’insécurité et les conflits entre les autorités de Bagdad et celles du Kurdistan irakien. Sur les 10 enseignes présentes, seules trois vont en principe continuer l’aventure : BBAC, Byblos Bank et MEAB. Les autres – Bank Audi, BLOM Bank, BLF, Crédit libanais, Fransabank, IBL Bank – sont sur le départ depuis au moins 2020, tandis que Bankmed a obtenu l’autorisation de se retirer il y a 5 mois, selon une source à l’ABL dont les données sont plus récentes que celles publiées dans l’almanach 2021 de l’ABL.

Comme à Chypre, la principale cause de cet exode est liée à la publication de nouvelles réglementations contraignantes de la banque centrale irakienne ces deux dernières années, notamment en matière d’actifs et de restitution des dépôts. Le Crédit libanais a cédé son portefeuille de dépôts à BBAC, selon une source au sein de cette dernière. Le nombre d’agences par banque s’élevait à entre 2 et 5 à fin 2018, généralement réparties entre les territoires administrés par Bagdad et ceux relevant des autorités à Erbil.

Jordanie

À noter également que le départ de Bank Audi d’Irak s’est fait dans le cadre d’une opération impliquant la vente simultanée de ses actifs irakiens et jordaniens au groupe jordanien Capital Bank. La signature définitive de l’accord a été annoncée en décembre 2020. Il inclut notamment la cession de 14 agences en Jordanie et 4 en Irak, pour des actifs évalués à respectivement 506 millions de dinars jordaniens et 275 millions de dinars irakiens, selon une déclaration de Capital Bank à l’époque (713 millions et 231 millions de dollars au moment de l’annonce).

En février 2022, Capital Bank a racheté les actifs d’une autre grande banque libanaise, la SGBL, présente via sa filiale Société générale de banque-Jordanie (SGBJ), et un réseau de 19 agences. Le montant de la transaction a avoisiné les 200 millions de dollars, selon des sources que L’Orient-Le Jour avait contactées à l’époque.

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En bref

Parmi les autres mouvements notables qui ont eu lieu depuis 2019, figure notamment une transaction entre banques libanaises en Syrie. Fin 2020, la Banque BEMO Saudi Fransi (BBSF) a en effet racheté toutes les parts que la Bank Audi Syrie possédait dans son capital, soit « environ 47 % des actions de Bank Audi Syrie et 2 % des actions détenues par des personnes physiques », selon le communiqué publié à l’époque.

Sanctionnée en août 2019 par les autorités américaines qui l’accusaient de faciliter « les activités bancaires du Hezbollah », Jammal Trust Bank a dû liquider tous ses actifs à l’étranger, y compris ses trois bureaux de représentation, à Londres, Abidjan et Lagos.

Selon une source proche de l’enseigne, Fransabank a décidé entre fin 2021 et début 2022 de sortir du marché biélorusse où la banque avait atterri en 2008, mais n’opérait plus qu’une agence, répertoriée dans l’almanach 2021. Il s’agit pour l’instant du seul cas de retrait d’un groupe bancaire libanais du marché européen, si l’on exclut le cas chypriote. En Turquie, deux grandes banques libanaises y sont toujours bien implantées : Bankmed et Bank Audi.

Enfin, le bureau de représentation que le Crédit libanais possédait à Montréal a disparu de la liste de l’almanach 2021.

L’actualité récente du secteur bancaire libanais a été marquée par la finalisation du rachat des actifs de Bank Audi en Égypte (Bank Audi Egypt) par le groupe émirati First Abu Dhabi Bank (FAB). Complétée mi-juin, soit plus d’un an après le démarrage du processus, cette fusion marque officiellement la sortie de la banque libanaise du marché égyptien. Il ne s’agit pas d’un cas...

commentaires (1)

une seule question dont la reponse est primordiale pour les deposants de ces banques filoutes: les investissements necessaires a l'ouverture de leurs agences, filiales ou nimporte quel autre titre donne avaient ils ete faits de nos poches? de celles tirees des dividendes accordees aux actionnaires ? quelles magouilles ces banques ont elles reussi a manigancer pour justement ne pas rapatrier au Liban ces retours sur investissements?

Gaby SIOUFI

10 h 21, le 05 juillet 2022

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Commentaires (1)

  • une seule question dont la reponse est primordiale pour les deposants de ces banques filoutes: les investissements necessaires a l'ouverture de leurs agences, filiales ou nimporte quel autre titre donne avaient ils ete faits de nos poches? de celles tirees des dividendes accordees aux actionnaires ? quelles magouilles ces banques ont elles reussi a manigancer pour justement ne pas rapatrier au Liban ces retours sur investissements?

    Gaby SIOUFI

    10 h 21, le 05 juillet 2022

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