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Politique - Éclairage

Oussama Saad, un divorce réussi avec le Hezbollah

Le député de Saïda a réalisé un score surprenant et revendique un positionnement politique désormais éloigné du 8 Mars.

Oussama Saad, un divorce réussi avec le Hezbollah

Oussama Saad (à droite) vote dans sa ville de Saïda, le dimanche 15 mai. Mahmoud Zayyat/AFP

C’est l’une des grandes surprises du scrutin. Le score réalisé par la liste Nous votons pour le changement, conduite par le député de Saïda Oussama Saad, en alliance avec Abderrahmane Birzri, médecin star de la lutte contre le Covid, a pris de court de nombreux observateurs, la mouture ayant décroché trois sièges : les deux sunnites de la capitale du Sud, en plus d’un siège maronite (complètement imprévu) à Jezzine. Fils du député Maarouf Saad, syndicaliste tué en 1975 lors d’une manifestation contre la monopolisation des plages de pêche à Saïda par une compagnie privée, Oussama Saad s’affirme après ce scrutin comme la dernière figure de la vieille gauche arabe au Liban à pouvoir revendiquer un poids politique, et cela malgré un positionnement qui aurait pu lui coûter cher. « La moumana’aa n’est pas la continuation de la politique de Gamal Abdel Nasser. » Prononcée par le député de Saïda lors d’une émission télévisée à quelques jours des législatives, cette phrase est une allégorie parfaite du divorce entre M. Saad et ses alliés du tandem chiite, le Hezbollah en tête. Celui qui était souvent perçu comme le principal allié du Hezbollah à Saïda, sans toutefois avoir rejoint le bloc de députés sunnites alliés du parti de Dieu au Parlement, a en effet fortement refroidi ses relations avec ce dernier depuis 2019. Ce choix lui fait perdre un soutien important par rapport à 2018, quand l’alliance avec le tandem chiite lui avait rapporté plus de 1 500 voix sur les 9 980 suffrages préférentiels à son compteur. Privé d’un véritable allié sunnite, c’est finalement le protégé de Nabih Berry, Ibrahim Azar, qui échoue aux portes du Parlement. « Il y a toujours eu des désaccords avec le tandem Amal-Hezbollah. Mais la goutte qui a fait déborder le vase, c’est le 17 octobre », explique à L’Orient-Le Jour Oussama Saad. Malgré son statut d’héritier politique et de député, il cultive une image très modeste et populaire au sein de sa ville. Il est par ailleurs généralement bien perçu par les contestataires, qui voient en lui un homme attaché à leurs intérêts face à ceux de l’élite politique et financière. Dès le début du soulèvement du 17 octobre, il se range du côté de la thaoura, tandis que le tandem chiite préfère la confrontation, accusant souvent les manifestants d’être les outils d’un complot occidental. Résultat, le chef de l’Organisation populaire nassériste va même jusqu’à critiquer les armes de son ancien allié. « Pour nous, il est évident que l’État doit avoir le monopole des armes et de la politique étrangère. La résistance émerge quand l’État n’arrive plus à assumer ces fonctions, et traduit donc une volonté populaire de révolte contre le statu quo. Or, les armes servent aujourd’hui plus à défendre le statu quo contre la révolte », affirme M. Saad, pour qui la réforme de l’État et le lancement d’un dialogue national sur les armes du Hezbollah et la stratégie de défense sont les principaux chantiers politiques à venir. Des propos qui font écho à ceux de Charbel Massaad, nouveau député maronite de Jezzine et colistier de M. Saad. Contacté par L’Orient-Le Jour, il appelle à « l’armement de l’armée libanaise pour pouvoir faire face aux armes illégales et aider à la construction de l’État ».

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« J’ai les pieds sur terre »

Ce positionnement fait que le nom d’Oussama Saad revient souvent parmi les candidats sérieux au poste de Premier ministre. « J’ai les pieds sur terre », se contente-t-il de répondre quand on l’interroge sur ses ambitions de rejoindre le Sérail. « Ce qui importe vraiment, ce n’est pas la personne du Premier ministre, c’est plutôt son programme. Nous sommes pour la formation d’un gouvernement de transition qui puisse sortir le Liban de la crise qu’il traverse et réformer ses rouages politiques », explique le leader de l’OPN, qui espère rejoindre un large bloc parlementaire composé des figures de l’opposition, même s’il est rarement inclus par les observateurs et les activistes parmi les parlementaires issus du 17 octobre, contrairement à M. Massaad, un nouveau venu en politique. L’analyse du succès de M. Saad nécessite cependant un degré de nuance. D’abord, parce que l’absence du courant du Futur, qui a souhaité bouder le scrutin conformément à la décision de son chef de file, Saad Hariri, lui a sûrement profité. Saïda est un fief des haririens via Bahia Hariri, tante de Saad et véritable baronne de la ville. De sources concordantes, on sait que Mme Hariri a mobilisé des électeurs en faveur de cette liste pour faire barrage à Youssef Naqib, candidat proche de l’ancien Premier ministre Fouad Siniora. Ce dernier, proche des haririens, a mené des efforts au niveau national pour combler le vide laissé par Saad Hariri et ériger un « leadership de rechange », au grand dam du patron du Futur. Ce soutien haririen implicite pourrait expliquer l’explosion du nombre de votes reçus par M. Bizri par rapport à 2018, quand il avait obtenu un peu plus de 3 500 voix, contre plus de 8 500 cette fois-ci. À titre de comparaison, M. Saad a vu son score chuter à quelque 7 400 suffrages. Il faut noter cependant que lors des élections municipales de 2004, l’alliance entre la famille Saad et la famille Bizri (pourtant rivales) avait permis de déloger le courant du Futur, alors au sommet de sa puissance politique, de la présidence de la municipalité de Saïda, y installant Abderrahmane Bizri. Mais le Hezbollah, dont les proches comptent souvent M. Saad comme un allié et minimisent les points de désaccord, semble insister pour préserver les ponts avec le député de Saïda. Preuve en est, le parti de Dieu a tout de suite dépêché une délégation pour féliciter le député de sa réélection.

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C’est l’une des grandes surprises du scrutin. Le score réalisé par la liste Nous votons pour le changement, conduite par le député de Saïda Oussama Saad, en alliance avec Abderrahmane Birzri, médecin star de la lutte contre le Covid, a pris de court de nombreux observateurs, la mouture ayant décroché trois sièges : les deux sunnites de la capitale du Sud, en plus d’un siège...

commentaires (5)

Tout à fait rien de bien .. n’en sortira !! C’est comme les fameux député du hirak et des indépendants… MAIS QUEL GÂCHIS … ils veulent d’abord l’économie et ensuite parler des armes JE ME DEMANDE OU ONT VÉCUS CES NOUVEAUX DÉPUTÉS CES DERNIERS 17 ANS

Bery tus

14 h 02, le 28 mai 2022

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Commentaires (5)

  • Tout à fait rien de bien .. n’en sortira !! C’est comme les fameux député du hirak et des indépendants… MAIS QUEL GÂCHIS … ils veulent d’abord l’économie et ensuite parler des armes JE ME DEMANDE OU ONT VÉCUS CES NOUVEAUX DÉPUTÉS CES DERNIERS 17 ANS

    Bery tus

    14 h 02, le 28 mai 2022

  • Il a juste pris avantage du retrait de Hariri. Il n'est surement pas sincère et rien de bien n'en sortira.

    Pierre Christo Hadjigeorgiou

    12 h 55, le 27 mai 2022

  • Curieux et interessant de voir la convergence de deux personnalites aussi differentes que Ossama Saad et Sami Gemayel en faveur du Hirak du 17 octobre. L'horizon politique du pays est vraiment en train de changer.

    Michel Trad

    12 h 19, le 27 mai 2022

  • Ousama Saad n'abandonnera jamais le Jezb , ils sont liés par plus d'un principe inébranlable !

    Chucri Abboud

    06 h 11, le 27 mai 2022

  • Un debut...Mieux vaut tard que jamais. On espere que les autres vont ouvrir les yeux et travailler pour l'interet du Liban.....

    Sabri

    04 h 17, le 27 mai 2022

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