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Nos Lecteurs ont la Parole

Qu’est-ce qu’il a fait au bon Dieu... le pays de Canaan ?

Quand le bon Dieu fait don d’une Terre promise* (sans toutefois préciser si son tracé suit la ligne 23 ou 29) à Abraham et à sa descendance par Isaac et Jacob, ce fut, par pure malchance, aux dépens du pays de Canaan, le pays de nos ancêtres.

Quand M. Balfour, représentant l’empire sur lequel le Soleil ne se couchait pas, fait en 1917 une mise à jour de cette promesse (Terre promise 2.0) à lord Rothschild, le Liban (ou ce qui reste du pays de Canaan) va payer aussi un lourd tribut en accueillant, au nom de la solidarité arabe, des dizaines de milliers de réfugiés palestiniens suite aux affrontements de 1948 en Palestine et à la proclamation de l’État d’Israël. Les préjudices politiques, économiques, sociaux et démographiques de cette présence ont été colossaux, mis à part les ravages, destructions et pertes en vies humaines de la guerre déclenchée en 1975 et dans laquelle ces réfugiés palestiniens se sont amplement impliqués.

De plus, dès 2012, le Liban s’est vu de nouveau contraint d’accueillir plus d’un million et demi de déplacés, syriens cette fois-ci. Conséquence directe d’une guerre qui a fait rage en Syrie à laquelle des nations du monde entier se sont mêlées ; mais pas le Liban.

La Turquie, par exemple, une superpuissance régionale de 80 millions d’habitants, accueille quelque trois millions de déplacés syriens. Moins que 4 % de sa population. Par comparaison, le Liban héberge déjà un peu moins de deux millions de personnes, entre réfugiés palestiniens et déplacés syriens ; plus que 40 % de sa population sur une superficie 75 fois plus petite que celle de la Turquie. Or, rien que les milliers de fosses septiques non conformes, aménagées aléatoirement dans les points de rassemblement de ces déplacés disséminés un peu partout, contribueraient à contaminer à longueur de minute nos eaux souterraines, cette ressource ô combien rare et précieuse dans cette région du monde. L’estimation de l’ensemble des coûts économiques, sociaux et écologiques pour notre pays, en tant que terre d’accueil et de refuge, serait gigantesque.

Promesse après promesse, guerre après guerre, notre terre et ses habitants ont été, et ce depuis longtemps, transformés en une sorte de « dommage collatéral » dans des conflits dans lesquels ils ne sont pour rien.

Alors que la Turquie, pour faire face au problème des déplacés, a déjà reçu des dizaines de milliards de dollars en aides financières, le Liban, qui s’enfonce dans ses crises interminables, se trouve obligé d’aller mendier aux portes du FMI, de la Banque mondiale et autres instances financières internationales. Bien sûr, nous, dirigeants et peuple libanais, en assumons la plus grande part de responsabilité.

Que la majorité de notre classe politique soit irresponsable et/ou corrompue n’est pas un secret. Que nous portions nos démons confessionnels dans nos gènes est aussi vérité. Que nous ayons gaspillé pendant longtemps des opportunités en or pour refaire de notre patrie un paradis sur terre n’est que douloureuse vérité aussi.

Mais ces dieux, ces empires, ces puissances et superpuissances, régionales et internationales, sont aussi responsables des conséquences directes de leurs actes, convoitises et intérêts politiques qui ont considérablement participé au quasi-anéantissement de ce minuscule pays « de lait et de miel ».

Ces « WorldBonds » de la morale et de la justice que le Liban détient, et qui ne peuvent même pas combler le ventre creux d’un de ses enfants, rappellent fortement la fameuse boutade de Staline pendant la Seconde Guerre mondiale : « Le pape ? Combien de divisions ? »

À l’image de ces mythiques « divisions du pape » qui ont fini par abattre en 1989 l’implacable rideau de fer, nos « WorldBonds » pèseraient lourd, très lourd, si un jour la justice de l’histoire tombait sur les nombreux actes commis gratuitement envers notre mince bande de terre. Cette même minuscule bande de terre qui, en contrepartie, n’a fait que formidablement contribuer, et gracieusement, à la marche de l’humanité tout entière : du premier alphabet du monde à notre princesse Europe, fille de Tyr, qui a donné son nom à un très beau continent, à Astarté, notre déesse de l’amour, à ces comptoirs fondés par les embarcations phéniciennes en Sardaigne ou à Palerme, Carthage, Cadix, Marseille, Tanger, Palma, en Sicile, à Chypre, Ibiza, etc. et qui ont été à l’origine de la notion des relations civilisées et diplomatiques entre les peuples, à Cana, terre de liberté dans son expression la plus magistrale avec l’unique miracle du Christ en désobéissance à la volonté même de Dieu le Père, à la renaissance de la splendeur de la langue et de la littérature arabes à partir du XVIIe siècle, jusqu’aux grâces répandues aux quatre coins de la planète par notre mar Charbel, à l’universalité du livre Le Prophète de Gebran Khalil Gebran, à la pensée d’un Saïd Akl et la magie d’une Feyrouz…

Nos actuels déboires, déconvenues et cuisants échecs ne sauraient dissimuler l’éclatante vérité qu’au forum des nations, très rares sont celles envers qui la civilisation, la liberté, l’amour, la paix, la beauté et le progrès en seraient autant reconnaissants…


*La Terre promise, dans la Torah, ou la Bible hébraïque, est désignée sous le nom de « terre d’Israël » dans le pays de Canaan, « pays où coulent le lait et le miel ».

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Quand le bon Dieu fait don d’une Terre promise* (sans toutefois préciser si son tracé suit la ligne 23 ou 29) à Abraham et à sa descendance par Isaac et Jacob, ce fut, par pure malchance, aux dépens du pays de Canaan, le pays de nos ancêtres.Quand M. Balfour, représentant l’empire sur lequel le Soleil ne se couchait pas, fait en 1917 une mise à jour de cette promesse (Terre promise...

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