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Paris dans les yeux et les mots de Marcel Proust

Paris dans les yeux et les mots de Marcel Proust

1. Anonyme, Hôtel Ritz, place Vendôme, Paris, 1901, placard publicitaire © Bibliothèque nationale de France, Paris.

«J’avais toujours à portée de ma main un plan de Paris », écrit Marcel Proust dans Du Côté de chez Swann. L'exposition que propose le musée Carnavelet jusqu'au 10 avril, Marcel Proust, un roman parisien, a été programmée pour commémorer le 150e anniversaire de la naissance du romancier. Elle propose à ses visiteurs de s'interroger sur les interactions entre le romancier et sa ville, en tant que cadre d'écriture et matière romanesque, à travers un parcours insolite, dont le commissariat général a été assuré par Valérie Guillaume, directrice du musée Carnavalet. Paris est un protagoniste essentiel de La Recherche de temps perdu, sur un plan topographique, toponymique mais aussi symbolique.

Dans une première partie, le visiteur explore l'univers parisien de Marcel Proust, qui a passé sa vie au cœur d'un espace restreint, un quadrilatère allant du parc Monceau à la Concorde, de la Concorde à Auteuil, d'Auteuil au Bois de Boulogne et à l’Étoile. La grande cafetière oviforme, sa tasse et son assiette assorties amorcent le parcours et affichent d'emblée un parti pris intimiste. Une série de photographies, dont certaines sont inédites, montrent le romancier enfant, accompagné de sa mère, de son frère ou de ses amis. Afin de faire revivre le Paris de la fin du XIXe siècle, des gravures et des peintures représentent les Champs-Élysées où jouent des enfants, l'église Saint-Augustin sous la neige, l'avenue Montaigne, ou l’hôtel de Gramont. Le tableau de Béraud, La Sortie du lycée Condorcet (1903) rappelle l’établissement que fréquentait Marcel Proust. Une toile de Raymond Fournier-Sarlovèze, Le Bal costumé en 1891, incarne le faste des réceptions de l’époque dans la haute société parisienne, au sein de laquelle le jeune Marcel va faire des rencontres déterminantes, qui nourriront sa matière romanesque. La visite des souverains russes sur la place de la Concorde en 1886 est rappelée par des photographies, qui plongent le public dans l’actualité de l'époque. Puis ce sont des enseignes de boutiques qui sont proposées, celles qu'affectionnaient particulièrement l'auteur : Old England, Le Printemps mais aussi la librairie Fontaine, le confiseur Boissier, la pâtisserie Bourbonneux...

Le parcours propose ensuite une rencontre immersive avec la chambre de l'écrivain, son lit mais aussi une méridienne, son manteau pendu, et sa canne qui constituent le cadre de sa création. Certains manuscrits jouxtent son matériel d’écriture : un plumier avec tiroir, un encrier dans un coffret en marqueterie, une montre gousset, un essuie-plume avec éponge, qui amorcent la transition entre autobiographie et romanesque.

C'est ensuite une véritable incarnation des personnages de papier et de leurs cadres fantasmés qui est proposée à un visiteur qui retrouve les réminiscences de ses lectures par un jeu subtil de connivences. Une cartographie minutieuse retrace les trajectoires des personnages. La section « Paris dans Un amour de Swann » fait revivre les lieux emblématiques du récit, le quai d'Orléans, le quai Saint-Bernard, le boulevard des Invalides... Des objets métonymiques des personnages, comme une paire de gants blancs pour homme (1910) ou une ombrelle (1900) mettent en valeur la dimension symbolique des realia dans la trame romanesque.

Après l’exploration de la portée symbolique des Champs-Elysées, du Bois, ou des faubourgs imaginaires, c'est le Paris de Sodome et Gomorrhe qui est mis à l'honneur, avec notamment une maquette du Trocadéro de Paul Leruth, ou une canne (cannier Bétaille, 1900) et un chapeau haut-de-forme (maison Berteil, 1900) qui suggèrent la présence du baron Palamède de Charlus.

C'est entre autres une robe Lermora de 1912 qui rappelle une héroïne énigmatique dans Le Paris d'Albertine. Femmes au café (Alonzo-Perez, 1900) ou Femmes damnées (Rodin, 1885) suggèrent la vie sexuelle duelle du personnage.

À l'issue d'un parcours incroyablement riche et évocateur, où l'on assiste à la métamorphose d'une ville en espace romanesque habité de personnages incarnés, les visiteurs sont invités à s’installer dans des sortes de cabines qui proposent d’écouter un extrait de La Recherche, où est mis à l’honneur un lieu parisien particulier. L’occasion bienvenue de rester pour quelques instants encore, en compagnie de la duchesse de Guermantes, de Morel et de Swann, dans leurs cadres de prédilection.

Exposition Marcel Proust, un roman parisien, Musée Carnavelet, jusqu'au 10 avril.

Commissaire scientifique : Anne-Laure Sol

«J’avais toujours à portée de ma main un plan de Paris », écrit Marcel Proust dans Du Côté de chez Swann. L'exposition que propose le musée Carnavelet jusqu'au 10 avril, Marcel Proust, un roman parisien, a été programmée pour commémorer le 150e anniversaire de la naissance du romancier. Elle propose à ses visiteurs de s'interroger sur les interactions entre le romancier et sa...

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