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Culture - Film

Le Liban est-il devenu une photo figée ?

Ce soir à 19h30, le film « L’Héritage » de Matthieu Haag est présenté en avant-première mondiale au cinéma Montaigne à l’Institut français du Liban, en présence de l’équipe et du réalisateur.

Le Liban est-il devenu une photo figée ?

Camille Salameh et Rita Hayek dans « L’Héritage », un court-métrage qui questionne la transmission. Photo DR

Présenté ce soir mardi 2 novembre, à 19h30, en avant-première mondiale à l’Institut français du Liban, rue de Damas, L’Héritage, court-métrage de 18 minutes, écrit et réalisé par Matthieu Haag, interroge entre autres la transmission. Zeina (interprétée par Rita Hayek) est enceinte. Elle revient pour la première fois dans le quartier de la Quarantaine où son père possède un appartement de famille. Il lui fait la visite des lieux.

Une lourdeur pèse sur la ville, mais aussi entre les deux protagonistes. Au loin, se profile un troisième personnage, le squelette fantomatique du port. Dans son court-métrage, Matthieu Haag raconte une histoire, toute simple en apparence. Mais certainement plus large et plus profonde, car elle aborde, outre le thème du lien filial, l’histoire d’un pays, de plusieurs générations face à un tournant crucial. Que laisse-t-on à nos enfants dans un pays comme le Liban ? Doit-on rester ? Doit-on partir ? Il s’agit aussi d’une histoire qui tourne en rond, d’un cercle vicieux depuis des décennies. D’un pays qui ne cesse de s’autodétruire et de contraindre son peuple à le déserter. Le Liban n’en est pas à sa première tragédie, mais il semble que celle-ci dépasse toutes les autres en dimension, en énormité et surtout en vision de « devenir ».


Il a fallu dix-huit minutes au réalisateur français, Matthieu Haag, pour traduire le point névralgique et sensible du Liban. Photo DR

Beaucoup d’amour…

Il a fallu dix-huit minutes au réalisateur français pour traduire le point névralgique et sensible du pays. Mais il lui a surtout aussi fallu un amour profond pour le Liban afin qu’il rende son témoignage public.

Photographe passé par la suite au cinéma, Matthieu Haag a commencé par des études de physique. « J’étais curieux de savoir comment les objets fonctionnaient. J’ai donc fait des études poussées dans cette matière. Ce que je ne réalisais pas, c’est qu’en donnant des réponses très pragmatiques à toutes mes questions, je passais à côté de quelque chose de plus important : l’humain. Par la suite, c’est le cinéma qui m’a aidé à mieux m’interroger sur l’homme. Je ne comprends toujours pas sa mécanique, mais au moins, j’essaie de le faire », dit-il en riant.

En 2009, lorsqu’il débarque au pays du Cèdre, le réalisateur tombe amoureux du Liban. « Pour l’esprit de ses habitants et surtout pour la lumière qui se dégage de ce pays et qui va désormais m’habiter. » Après cette date, il y retourne souvent, et c’est ainsi que naît, en 2012, un premier court-métrage intitulé Un parfum de Liban, interprété par Rafic Ali Ahmad et Rita Hayek, primé dans plusieurs festivals. Douze allers-retours plus tard, survient la grande tragédie du port.


Camille Salameh et Rita Hayek dans « L’Héritage », un court-métrage qui questionne la transmission. Photo DR

Et un certain 4 août

Un drame qui ne laisse pas Haag indifférent. Inquiet pour ses amis et pour le pays, il débarque de nouveau dans un Beyrouth tout en blessures et en meurtrissures. « Lorsque je reviens au Liban après le 4 août, c’est un pays figé, tétanisé qui apparaît à mes yeux. Ce pays qui respirait la joie de vivre et se renouvelait tout le temps me donnait l’impression d’être une photo fixe, alors que pour moi le Liban est un film qui s’anime. Ça m’a torturé de le voir ainsi. Je n’ai jamais porté de jugement sur ce pays qui avait pour moi un arôme unique. Je l’aimais, tout simplement. De plus, j’avais profité de lui alors qu’il était florissant, il n’était pas question que je me débine à présent qu’il est à terre. Il me fallait être à ses côtés pour le soutenir et dire aux Libanais qu’on est là et qu’on ne les lâchera pas. » « Je ne suis ni menuisier ni maçon, poursuit-il. Tout ce que je sais faire, c’est aider en témoignant. » Matthieu Haag commence par faire un reportage photo, mais à son retour en France, il éprouve un sentiment d’inaccompli. « Ce que je devais au Liban, c’était une dette. Je suis donc revenu en mai avec ma caméra. Je pense qu’en tant que réalisateur français, j’ai réussi à avoir plus de recul sur les événements qu’un réalisateur libanais. » Il contacte Rita Hayek et Camille Salameh qui sont partants pour cette aventure cinématographique. Parallèlement au film de fiction (car c’en est un), le réalisateur recueille des témoignages de personnes qui lui parlent de la famille, cellule importante au Liban, de la vie dans ce pays qui a traversé moult secousses et enfin de ce paradoxe que vivent des Libanais toujours pris entre deux feux. « Car quelle que soit la décision qu’ils prennent, à savoir partir ou rester, elle sera toujours mauvaise et aura des incidences sur la future génération. » C’est pourquoi le personnage qu’incarne Rita Hayek porte un enfant. Cet enfant, non présent encore physiquement, décidera du choix de Zeina. L’histoire est ainsi étayée par des témoignages en plan séquence face caméra. « Alors que dans la partie fiction, on oriente le film, on fait un montage et on trahit en quelque sorte, c’était important pour moi de respecter ces interventions et de laisser la parole aux Libanais. »

Matthieu Haag planche actuellement sur un long-métrage qui se déroule toujours au pays du Cèdre. Il a même trouvé un producteur libanais installé en France. Entre-temps, il accompagne son court-métrage L’Héritage dans plusieurs festivals et autres destinations afin de relayer la situation de ce pays « cher à son cœur ». Une histoire d’amour que porte ce Français pour le Liban, mais aussi une histoire de fidélité.

Présenté ce soir mardi 2 novembre, à 19h30, en avant-première mondiale à l’Institut français du Liban, rue de Damas, L’Héritage, court-métrage de 18 minutes, écrit et réalisé par Matthieu Haag, interroge entre autres la transmission. Zeina (interprétée par Rita Hayek) est enceinte. Elle revient pour la première fois dans le quartier de la Quarantaine où son père possède un...

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