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Culture - Cimaises

Où trouver de l’art libanais à Paris en ce moment ?

Focus sur trois artistes libanais, Ali Cherri, Marie Ward et Tarek Atoui, qui présentent actuellement leurs œuvres à Paris...

Où trouver de l’art libanais à Paris en ce moment ?

Extrait du film « Un mal sous son bras » de Marie Ward. Photo DR


Ali Cherri, « Return of the Beast ». Photo Tadzio


Ali Cherri, « Return of the Beast »

Comment regardons-nous les monstres ? Comment nous envisagent-ils à leur tour ? Comment advient le monstrueux ? C’est autour de ces trois questions que se construit l’exposition « Return of the Beast » de Ali Cherri à la galerie Imane Farès à Paris. Il s’agit du quatrième solo show de l’artiste organisé dans ce lieu. Comme le parfait prolongement du travail de Cherri sur la notion de l’hybridité, c’est une armée de créatures fantasques, entre sculptures et toiles, qui tentent d’apporter une réponse, ou ne serait-ce qu’une réflexion autour, cette fois-ci, du thème du monstre. Résidant entre la France et le Liban, l’artiste, né à Beyrouth en 1976, invite le visiteur à repenser la dialectique qui sous-tend l’idée d’un monstre, mais aussi et surtout, à sonder le regard qu’on porte sur cette créature, et qui est, selon ses mots, « le nœud de cette construction ». Pari réussi, puisque dans l’espace de la galerie Imane Farès, le regard est secoué et troublé, pour le moins que l’on puisse dire. Il y a une tête au crâne rasé amarnien (échappé de l’Égypte ancienne) qui semble converser avec un oiseau de passage. Un torse en marbre, mutilé de tout bord et dont on se demande comment il tient, et surtout comment il brandit un crâne, tel un trophée. Il y a aussi un diptyque intitulé Mort dans l’âme, où l’on voit le cadavre d’un renard, un filet de sang sous son corps sans vie, qui, pris dans l’aquarelle de Cherri, exhale presque de la douceur. Et c’est bien cela que l’on retient à la sortie de ce castelet de monstres, un mélange de tendresse infinie et de quelque chose d’inquiétant. Jusqu’au 23 juillet.

À la galerie Imane Farès, 41, rue Mazarine, 75006 Paris.


L’installation de Tarek Atoui à la Bourse du commerce. Photo DR


Tarek Atoui, « The GROUND »

L’ouverture, en grande pompe, de la Bourse de commerce où se déploie la collection Pinault, a été sans doute l’évènement culturel le plus attendu et le plus médiatisé de cette vie postconfinement. Ce rendez-vous est d’autant plus réjouissant qu’on y retrouve, dans l’espace Foyer au sous-sol, l’installation The GROUND de l’artiste libanais Tarek Atoui. Si ce dernier se voit souvent estampillé musicien, il n’est pas surprenant du tout de retrouver son travail dans un cadre presque muséal, puisqu’il a toujours mis son art et ses sonorités sur le même diapason, ces deux pans de son œuvre s’irriguant l’un l’autre. Présentée au Palazzo Grassi, au Teatrino, à Venise, et désormais à Paris, The GROUND est certes une installation, mais une installation qui devient performance une fois activée par l’artiste. Elle découle surtout de cinq ans de voyages et de recherche dans le delta de la rivière des Perles, en Chine, à regarder de près les pratiques agricoles, architecturales et musicales traditionnelles et contemporaines dans ces lieux. De ces pérégrinations, Atoui a construit un espace sonore qui lui est propre, à la faveur d’un polyptique qui est en perpétuelle mutation entre sculpture et instrument musical. Cette matrice musicale, sculptée par l’artiste avec du bois et de la céramique, devient une matière auditive, dès lors que celle-ci est effleurée par ses doigts. S’en dégagent des sons totalement inédits, souvent déroutants, parfois même dérangeants, mais qui sont un gage de fusion entre des arts a priori éloignés. Jusqu’au 1er septembre.

À la Bourse de commerce, Fondation Pinault, 2, rue de Viarmes, 75001 Paris.

Marie Ward, l’épieur, l’emblème et la mauvaise graine

Il est surprenant de découvrir l’âge de Marie Ward, 25 ans seulement. Une artiste dont le travail reste malheureusement encore méconnu pour le public libanais, alors même que son court-métrage, Un mal sous son bras, a été récompensé par le prix du court-métrage Tënk lors du 43e Festival du cinéma du réel, et a été sélectionné en compétition française pour l’édition 2021 du festival Côté Court. C’est justement ce film-là, ainsi que son installation Les eaux d’artifices, qui est actuellement présenté à la galerie Balice Hertling à Paris. Cet événement découle des recherches de Marie Ward portant sur les rapports de domination entre cultures et les rouages qui conduisent un pays ou une communauté à en dominer un(e) autre. L’artiste s’interroge également sur les conséquences de tels rapports et la manière dont les identités s’y forgent. Plus particulièrement, Marie Ward planche, à la faveur de ses œuvres, sur cette relation entre les chrétiens libanais et la France, proche d’un rapport de dépendance. Chez Balice Hertling, ce sont ces thèmes qui sont donc abordés. D’abord, à travers Un mal sous son bras, l’artiste soulève la question de la domination politique par le biais du corps, et cette phrase extraite du court-métrage résume au mieux cette pensée : « Colons sur leurs propres terres, ils détournent les yeux pour ne pas voir la gangrène qui s’y forme. » Dans Les eaux d’artifices, Ward aborde cette même question, mais sous un autre angle, celui des objets et des éléments décoratifs. Le tout enrubanné dans une esthétique à la fois sombre et onirique qui constitue déjà la patte de cette artiste. Jusqu’au 23 juillet.

À la galerie Balice Hertling, 47 bis, rue Ramponeau, 75020 Paris.

Ali Cherri, « Return of the Beast ». Photo Tadzio Ali Cherri, « Return of the Beast »
Comment regardons-nous les monstres ? Comment nous envisagent-ils à leur tour ? Comment advient le monstrueux ? C’est autour de ces trois questions que se construit l’exposition « Return of the Beast » de Ali Cherri à la galerie Imane Farès à Paris. Il s’agit du quatrième...

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