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Économie - Carburant

Essence : l’accalmie se poursuit, tout comme la hausse des prix

Les forces de sécurité ont communiqué sur plusieurs saisies de carburant siphonné dans des stations-service.

Essence : l’accalmie se poursuit, tout comme la hausse des prix

La circulation était plus fluide sur l’axe Dora-Nahr el-Mott, malgré le fait que certaines stations-service étaient ouvertes dans les deux sens. Photo P.H.B.

Amorcée lundi après plusieurs semaines de pénurie, l’amélioration significative du rythme d’approvisionnement des stations-service a continué de se ressentir hier sur les routes libanaises, sur fond de hausse continue des prix du carburant. Un phénomène mesurable via la réduction spectaculaire du temps d’attente aux abords d’une majorité de stations-service qui étaient systématiquement prises d’assaut, notamment sur les axes principaux. Des stations qui, en outre, ne rationnent plus la quantité d’essence livrée.

Dans le meilleur des cas, certains automobilistes ont ainsi pu être surpris d’attendre moins de cinq minutes pour faire le plein auprès de stations où le temps d’attente dépassait aisément la demi-heure. Conséquence de cette décongestion, la circulation était presque fluide sur la portion d’autoroute côtière à l’entrée nord de Beyrouth, au niveau de Dora, malgré le fait que des stations-service étaient ouvertes dans les deux sens. Une situation inimaginable il y a une semaine encore, lorsque que des doubles files de véhicules s’étendant sur près d’un kilomètre paralysaient littéralement le reste du trafic routier.

Cette accalmie reste toutefois circonstancielle, les problèmes économiques financiers et institutionnels du pays à l’origine de la pénurie n’ayant toujours pas été pris de front par une classe dirigeante empêtrée dans ses clivages depuis des mois. Le pays est en effet géré par un gouvernement d’affaires courantes depuis plus de 11 mois.

Petits stocks

Selon plusieurs sources au sein des filières de distribution, cette accalmie pourrait durer si la Banque du Liban (BDL) ne renoue pas avec ses retards dans les procédures de règlement des navires-citernes qui approvisionnent régulièrement le marché. L’une d’elle, proche des importateurs, affirme par exemple que des quantités conséquentes devraient être livrées d’ici au début de la semaine prochaine, si tout se passe comme prévu. Une autre, proche des stations-service, soutient que certains distributeurs ont demandé aux gérants des points de vente d’ouvrir plusieurs pompes à essence au lieu d’une comme c’était souvent le cas depuis le début de la pénurie. Selon une troisième source, certains acteurs ont même pu reconstituer de petits stocks, même si ceux-ci ne leur permettraient pas de tenir plus de « deux semaines » en cas de nouveau problème d’approvisionnement du pays en carburant. Une quatrième confirme que certaines stations refusent de servir des clients en mobylette ou en scooter, considérant les réservoirs de ces catégories de véhicule comme particulièrement simples à siphonner. « Les gérants veulent être fermes mais il faut généralement que les forces de sécurité ne soient pas loin pour qu’ils aient les moyens de le faire », a affirmé la source.

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Enfin, les forces de sécurité semblent avoir eu pour mot d’ordre de resserrer les contrôles sur les stations détournant de l’essence pour la revendre au marché noir ou aux contrebandiers qui l’acheminent ensuite vers la Syrie – où elle peut être revendue encore plus cher. La direction générale des Forces de sécurité intérieure (FSI) a ainsi annoncé l’arrestation de deux personnes – un Libanais et un Syrien – siphonnant le stock d’une station-service à Rmeilé (Chouf) en pleine nuit afin de le revendre sur le marché noir via un troisième individu, également appréhendé. Toujours selon la direction, 9 000 litres d’essence ont été saisis. Plus tard dans la journée, la Sécurité de l’État a annoncé avoir effectué une autre saisie de ce genre du côté de Saïda (Liban-Sud), portant cette fois sur près de 1 000 litres de mazout.

Forte hausse du prix du gaz

Si l’essence et le mazout importés au Liban intéressent autant les contrebandiers et les revendeurs au noir, c’est parce que la banque centrale subventionne encore le taux dollar/livre appliqué aux importateurs de carburant depuis les premiers mois de la crise en octobre 2019, alors que ce taux a dépassé les 19 000 livres pour un dollar depuis plusieurs jours malgré le fait que la parité officielle soit toujours figée à 1 507,5 livres. Bien qu’en forte hausse depuis que la BDL a modifié les modalités du mécanisme fin juin (le taux auquel les importateurs peuvent échanger leurs livres contre des dollars auprès d’elle est passé de 1 507,5 à 3 900 livres pour couvrir 100 % de la facture au lieu de 90 % auparavant), ces prix restent encore bas par rapport à ceux du marché noir (qui peuvent aller du double au triple, voire plus en Syrie).

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Les prix de l’essence, du mazout et du gaz domestique sont fixés chaque semaine par le ministère de l’Énergie et de l’Eau, en tenant compte des prix du brut et de certains coûts fixes de la filière, calculés en dollars. Si le ministre sortant, Raymond Ghajar, a jugé en juin que le prix des 20 litres d’essence passerait à 200 000 livres en cas de levée des subventions, les tarifs actuels en sont encore éloignés. Les 20 litres d’essence à 95 octanes se vendent depuis hier à 73 300 livres à la pompe, soit une hausse de 1 700 livres en une semaine, tandis que celui à 98 octanes a augmenté de 1 600 livres et coûte désormais 75 400 livres. Le mazout a, quant à lui, enregistré une hausse de 1 000 livres et le bidon de 20 litres a atteint les 56 500 livres. La plus forte hausse a été enregistrée au niveau des bonbonnes de gaz, le prix de celle d’une dizaine de kilogrammes a bondi de 5 600 livres hier pour atteindre 51 500 livres, un niveau que le syndicat des filières de distributeurs avait annoncé fin juin.

Pression sur le prix du mazout

Enfin, si l’accalmie sur le front de l’essence est claire, pour le moment du moins, la situation paraît plus incertaine au niveau du mazout, consommé principalement par les générateurs privés et dont la demande a explosé avec l’intensification du rationnement imposé par Électricité du Liban (EDL), là aussi à cause de la crise. Alors que nombre de ces exploitants – illégaux mais tolérés par les autorités depuis des décennies – continuent de rationner leur propre production, contraignant leurs abonnés à passer plusieurs heures de la journée sans électricité, certains exigent déjà en coulisses une hausse des tarifs au kilowattheure que leur impose le ministère de l’Énergie (entre 1 326 et 1 458 livres selon les régions pour les factures de juin, soit 10 fois plus environ que celui vendu par EDL dont les prix sont figés depuis début 1990). Lundi, le président du rassemblement des propriétaires de générateurs privés au Liban, Abdo Saadé, a annoncé que le tarif des abonnements mensuels aux générateurs allait doubler et passer à un million de livres pour 5 ampères suite à la hausse du coût du mazout. Sur les réseaux sociaux, un internaute a relayé des messages transmis par le propriétaire du logement qu’il loue demandant à tous les locataires de verser chacun 5 millions de livres « pour financer l’achat de mazout pour le générateur de l’immeuble ».

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