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Politique - Éclairage

Une internationalisation de la crise libanaise semble prendre forme

L’engagement poussé de la France, des États-Unis et récemment de l’Arabie saoudite provoque autant de fantasmes que de peurs.

Une internationalisation de la crise libanaise semble prendre forme

Le président Michel Aoun recevant le conseiller du président français Emmanuel Macron pour les Affaires de l’Afrique du Nord et du Moyen-Orient, Patrick Durel, et l’ambassadrice de France Anne Grillo, en novembre 2020. Photo d’archives Dalati et Nohra

À situation inédite, réponse inédite. Alors que le Liban est en proie à un isolement sans précédent sur la scène régionale et internationale, il est en même temps au cœur, depuis quelques semaines, d’une activité diplomatique inédite. D’un côté, la confiance dans les dirigeants libanais n’a jamais été aussi faible, de l’autre, plusieurs pays sont prêts à les contourner ouvertement pour sauver ce qui peut encore l’être du pays. Une action qui provoque fantasmes et peurs sur la possibilité d’une internationalisation de la question libanaise. Chez les uns, l’action concertée de la France, des États-Unis et de l’Arabie saoudite suscite d’énormes attentes, y voyant un premier pas vers le règlement de la crise. Chez d’autres, principalement dans le camp proche du Hezbollah, elle fait ressurgir les anciens clichés dogmatiques sur le néocolonialisme et les atteintes à la souveraineté dans un pays qui se meurt chaque jour un peu, notamment en raison de l’interférence décomplexée de l’Iran.

Même si l’histoire du Liban est jalonnée d’exemples en matière d’interventionnisme – souvent dû à la sollicitation de parties internes pour renforcer leurs positions respectives –, « il n’en reste pas moins que l’implication de plus en plus manifeste de l’Occident est devenue aujourd’hui une question de survie », explique le politologue Karim Bitar. « Ceux qui au sein de la classe politique libanaise se plaignent oublient que ces interventions résultent de leur propre faillite, politique, économique et sociale », dit-il. Il rappelle ainsi que la dynamique de sauvetage n’a été mise en place par l’Occident que lorsque le pays s’est trouvé au bord de l’effondrement.

À la vitesse supérieure

Ayant pris soin de prouver, semaine après semaine, que le Liban est devenu un pays failli à tous les niveaux, incapable de mettre en place un gouvernement et de faire fonctionner a minima les services publics, les responsables politiques semblent avoir perdu toute légitimité auprès des puissances extérieures.

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L’implication de plus en plus marquée de Paris, Washington et plus récemment Riyad, qui travaillent en coopération étroite, a en ce sens un aspect insolite : leurs activités ne passent quasiment plus par les canaux officiels. Selon un responsable occidental qui a préféré garder l’anonymat, une large partie de ces concertations entre les trois partenaires se fait dans les coulisses de la diplomatie traditionnelle. Il y a désormais dans les capitales étrangères une prise de conscience que le Liban est peut-être à quelques semaines d’une explosion sociale, comme l’avait d’ailleurs souligné il y a une semaine Hassane Diab, le Premier ministre sortant, qui s’exprimait devant les diplomates. Ce dernier s’était d’ailleurs fait publiquement tancer par l’ambassadrice de France Anne Grillo, qui lui avait rappelé ses propres responsabilités et celles de l’ensemble de la classe dirigeante. La proposition formulée il y a quelques jours par Gwendal Rouillard, député de Lorient, qui a suggéré la formation et l’installation à Beyrouth d’une « task force » internationale, a accentué le sentiment que l’Occident fomente un plan quelconque pour extirper le pays du bourbier.

Paris donne le sentiment d’être passé à la vitesse supérieure. En témoigne le défilé de personnalités françaises à Beyrouth au cours des derniers jours. En moins d’une semaine, ce sont quatre hauts responsables français qui se sont succédé pour tenter un ultime coup afin de débloquer la situation, avant probablement de passer à des moyens plus dissuasifs, à savoir l’imposition de sanctions qui seront vraisemblablement annoncées d’ici à la fin du mois et qui toucheront l’ensemble des parties. Après Pierre Duquesne, ambassadeur français chargé de la Coordination du soutien international au Liban, et Franck Riester, ministre français délégué auprès du ministre de l’Europe et des Affaires étrangères, chargé du Commerce extérieur et de l’Attractivité, c’est au tour de Patrick Durel, le conseiller du président Emmanuel Macron pour les Affaires de l’Afrique du Nord et du Moyen-Orient, puis de Karim Amellal, ambassadeur pour la Méditerranée, de débarquer. Si les entretiens de M. Durel portent principalement sur un volet éminemment politique, ceux de M. Amellal – qui va rencontrer des membres de la société civile, des artistes et de jeunes entrepreneurs – sont plutôt tournés vers l’avenir.

La visite de M. Durel intervient au lendemain d’une réunion des ambassadrices de France et des États-Unis au Liban, Anne Grillo et Dorothy Shea, avec l’ambassadeur d’Arabie saoudite Walid Boukhari, qui visait à évoquer la situation économique catastrophique et « les moyens d’aider le peuple libanais ». Les deux ambassadrices s’étaient rendues la semaine dernière en Arabie pour évoquer le blocage gouvernemental et les moyens d’aider la population libanaise.

Selon un diplomate européen, inutile d’aller trop loin dans la qualification de ce va-et-vient. « Il ne s’agit pas d’une tutelle (en gestation), encore moins d’un plan B quelconque, mais tout simplement d’une adaptation à l’urgence et une réactivité par rapport à la crise économique. »

Mise en garde russe

À l’issue de ses entretiens, M. Riester a implicitement rappelé la poursuite de la politique de la carotte et du bâton suivie depuis quelque temps par Washington, Paris, et bientôt ses partenaires européens qui s’apprêtent à prendre des actions plus dissuasives. « La France est aux côtés des Libanais et répondra à toutes leurs demandes pour les aider, mais les autorités libanaises doivent assumer leurs responsabilités », a insisté M. Riester avant de rappeler que « l’Europe est sur la même longueur d’onde » que Paris en ce qui concerne l’imposition de sanctions contre les personnes qui « bloquent » les réformes.

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Dans certains milieux diplomatiques, on rappelle toutefois que les États tiers ne peuvent pas tout faire et que la formation du gouvernement et la mise en place des réformes restent prioritaires et incontournables. Selon un responsable occidental qui suit de près le dossier libanais, le tandem franco-américain œuvre d’arrache-pied à accentuer la pression et les actions punitives. « Cette nouvelle dynamique, qui comporte aujourd’hui un élément plus stratégique, vise à rappeler à la classe politique qu’elle doit désormais rendre compte de ses actes », dit-il.

Ce langage de plus en plus direct et l’intervention frontale de Paris et Washington ne sont pas passés inaperçus aux yeux de la Russie. Un communiqué publié hier par le vice-ministre des Affaires étrangères Mikhaïl Bogdanov, qui venait de s’entretenir avec le chef du Courant patriotique libre Gebran Bassil, a indiqué que les menaces de sanctions par certaines capitales occidentales et les ingérences qui peuvent être contre-productives ne sont pas permises. Une mise en garde qui résonne comme un tragique retour à la guerre des axes.

À situation inédite, réponse inédite. Alors que le Liban est en proie à un isolement sans précédent sur la scène régionale et internationale, il est en même temps au cœur, depuis quelques semaines, d’une activité diplomatique inédite. D’un côté, la confiance dans les dirigeants libanais n’a jamais été aussi faible, de l’autre, plusieurs pays sont prêts à les contourner...

commentaires (14)

We need regime change with a President elected by the people, Christian or Muslim. The major party leaders have proven once again that they are incompetent, and poor negotiators incapable of achieving consensus and putting the interests of the people above their own. We need to clean house and get rid of all of them. If Mr. Hariri thinks he can shirk his responsibility and come back stronger, he is mistaken. As to the FPM, they can never dream of getting another President elected from their ranks. They are finished. Let’s hope that we can usher in a new generation of leaders from the new emerging parties in the next Parliament, and send Mr. Berry to retirement.

Mireille Kang

08 h 04, le 16 juillet 2021

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Commentaires (14)

  • We need regime change with a President elected by the people, Christian or Muslim. The major party leaders have proven once again that they are incompetent, and poor negotiators incapable of achieving consensus and putting the interests of the people above their own. We need to clean house and get rid of all of them. If Mr. Hariri thinks he can shirk his responsibility and come back stronger, he is mistaken. As to the FPM, they can never dream of getting another President elected from their ranks. They are finished. Let’s hope that we can usher in a new generation of leaders from the new emerging parties in the next Parliament, and send Mr. Berry to retirement.

    Mireille Kang

    08 h 04, le 16 juillet 2021

  • voici le sort d'un Etat qui n'avait pas lieu d'être il y a 100 ans...

    Carlos El KHOURY

    22 h 46, le 14 juillet 2021

  • ET SI CE TAPAGE ET AUTRES CRITIQUES ENVERS LES "RESPONSABLES" N'ETAIENT QUE FACON DE PREPARER LE TERRAIN A UNE NOUVELLE MAINMISE STYLE 1990 ? moi je n'en serais pas surpris .

    Gaby SIOUFI

    14 h 12, le 14 juillet 2021

  • Allons, enfants de la patrie, le jour de gloire va arriver . Contre nous, de la tyrannie, l’étendard sanglant est levé . Entendez-vous ces féroces traîtres ,,ils viennent jusque dans nos bras , égorger nos enfants et nos compagnes . Que veut cette horde d’esclaves et de traîtres ? Pour qui , ces ignobles entraves , ces fers dès longtemps préparés ? Quoi, des cohortes étrangères feraient la loi dans nos foyers ? Nos mains seraient enchaînées ? De vils despotes deviendraient les maîtres de nos destinées ? Tremblez tyrans et vous perfides ! S’ils tombent nos jeunes héros,la terre en produit de nouveaux contre vous tout prêts à se battre.

    Wow

    14 h 05, le 14 juillet 2021

  • Si la Russie monte le ton, cela veux dire que le plan de destruction du Liban est planifié et voulu depuis long termes par les puissances de l'Axe obscure (Russie, Chine, Corée du Nord, Syrie, Iran et leur para-milices dans divers pays). Donc sauf une vrais 3eme guerre mondiale, et frontale entre les démocraties d un côté et l'axe obscure de l'autre, le Liban ne pourra être sauvé.

    Aboumatta

    12 h 01, le 14 juillet 2021

  • Il est temps que la Russie tout en preservant ses interets dans la region, arrete d' appuyer les regimes terroristes, et les mafieux du Liban .....Ce n' est pas cela qui garantira ses interets a long terme...

    LeRougeEtLeNoir

    10 h 34, le 14 juillet 2021

  • Les Mafia et les Milices se nouris des même sources: Les contre-bandes, le blanchissement, la drogue, etc…. Les sanctions et le contrôle des frontières limitrons leurs resources et par conséquent leurs survis. Ni l’un ni l’autre est tout-puissant! On n’a pas besoin de croire au père Noël, ils s’aji simplement d’avoir la volantée de soutenir la constitution Libanaise et trouver des intérés commins avec les joueurs internationaux.

    Sarkis Dina

    10 h 26, le 14 juillet 2021

  • Les usurpateurs qui montent au créneau pour dénoncer une colonisation du pays alors qu’ils l’ont cédé à l’axe des destructeurs qui l’occupent ouvertement peuvent aboyer, la caravane passera quand même et ils n’auront que leurs yeux pour pleurer parce qu’on ne peut pas trahir continuellement et ouvertement son pays et monopoliser les tribunes pour dénoncer sa perte minutieusement organisée depuis des décennies en se gargarisant de slogans fallacieux et de propagandes pernicieuses. Toute cette caste pourrie devraient payer pour ces actes de vandalisme, de destructions et de crimes et le Liban s’en tirera avec des bleus et des ecchymoses mais sera sauvé de leurs griffes. La Russie ne pourra pas aller à l’encontre de la volonté du peuple libanais, elle l’a déjà fait en Syrie et le résultat n’est pas folichon. Alors bat les pattes et laisser le peuple décider de son sort aidé par les pays amis parce qu’au niveau indépendance virtuelle il a déjà tout donné.

    Sissi zayyat

    10 h 15, le 14 juillet 2021

  • Si ces aisstances sont de la colonialisation, alors vive la colonialisation ! Vaut mieux qu' elle soit le fait de puissances occidentales modernes, que de gourpuscules, qui s' imposent par la terreur, avec une ideologie, digne du moyen age..!

    LeRougeEtLeNoir

    09 h 57, le 14 juillet 2021

  • Les occidentaux ne vont rien faire. L'iran tient le Liban trop etroitement er ne lachera pas. Le Hezbollah est le seul success story de l Iran et on pourra pas lui oter cette carte a moins de bombarder et razer Teheran.

    Tina Zaidan

    09 h 35, le 14 juillet 2021

  • POUR ESSAYER DE SAUVER LEUR PEAU LES DEUX BELIERS BISCORNUS DE L,APOCALYPSE DE LA BERGERIE DU PATRIARCHE RAI COURENT DE GAUCHE A DROITE, AUJOURD,HUI VERS LA RUSSIE. L,INTERNATIONALISATION OCCIDENTALE + L,ARABIE EST FORMEE ET SE PREPARE VA INTERVENIR ET AVANT A PUNIR CEUX QUI BLOQUENT. SEULS LES DEUX BELIERS BISCORNUS DE L,APOCALYPSE BLOQUENT PAR ORDRE DE LEURS SEIDES.

    LA LIBRE EXPRESSION

    08 h 22, le 14 juillet 2021

  • Il faut remettre le Liban sous mandat international. Il n'y a pas - et il ne peul y avoir - d'autre solution.

    Yves Prevost

    07 h 18, le 14 juillet 2021

  • Vous croyez encore au pere noel !!

    Bery tus

    06 h 12, le 14 juillet 2021

  • L'état libanais est en voie de dissolution, conséquence évidente d'une gestion mafieuse d'une part, et d'une main mise milicienne étrangère d'autre part. Des dirigeants, genre marionnettes, pour compléter le tableau.

    Esber

    00 h 30, le 14 juillet 2021

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