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Société - Crise financière

Au Liban, 30 % des enfants s’endorment le ventre vide

Selon un rapport de l’Unicef, pour pouvoir subvenir aux besoins de la famille, les parents se trouvent obligés d’envoyer leur progéniture travailler, de marier les jeunes filles, de sauter des repas et de contracter des dettes.

Au Liban, 30 % des enfants s’endorment le ventre vide

« Nous vivons d’eau et de zaatar (thym). Mes enfants mangent en premier. S’il en reste, je mange. » Rahaf, mère de trois enfants, vit dans une des quarante tentes que forme le camp informel des réfugiés syriens à Darb el-Sim, à l’est de Saïda. Depuis qu’elle a fui sa ville natale de Homs, il y a sept ans, « la situation s’est dégradée graduellement ». « Les dix-huit derniers mois toutefois étaient les plus cauchemardesques », confie cette femme dont le mari a perdu son emploi durant la pandémie de coronavirus, de nombreux commerçants ayant fermé boutique en raison des bouclages successifs. À cela s’est greffée la crise économique qui sévit dans le pays.

« Le prix des produits alimentaires est tellement élevé que je n’arrive pas à nourrir ma famille correctement », ajoute Rahaf, soulignant qu’il lui arrive de passer plusieurs jours sans manger. « Tous les jours, mes enfants en demandent plus, poursuit-elle. Que dois-je leur dire ? Nous ne pouvons pas acheter des légumes au prix du jour et nous n’avons pas mangé de viande depuis bientôt un an. »

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La famille de la jeune femme appartient aux 77 % des ménages au Liban ayant confié ne pas avoir assez de nourriture ou assez d’argent pour acheter des produits alimentaires, selon un rapport du Fonds des Nations unies pour l’enfance (Unicef) rendu public hier. Un chiffre qui s’élève à 99 % dans les familles syriennes. De plus, « 60 % des ménages doivent acheter de la nourriture à crédit ou emprunter de l’argent pour le faire » et « dans plus de 30 % des familles, au moins un enfant s’est couché le ventre vide ou a sauté un repas en mars 2021 ».

Dans ce document intitulé Le Liban : l’avenir des enfants mis en jeu, l’Unicef note que « les enfants du Liban subissent de plein fouet l’un des pires effondrements économiques mondiaux des temps modernes ». C’est ce qu’avait déclaré récemment la Banque mondiale qui avait affirmé dans un rapport récent que la crise économique et financière au Liban constituait l’une des trois crises les plus sévères à l’échelle mondiale depuis 1850.

Mariées jeunes

L’Unicef fait remarquer que « la crise économique prolongée n’est qu’une des crises qui se renforcent mutuellement au Liban, frappé par l’impact de la pandémie de Covid-19, les conséquences de l’explosion massive d’août 2020, ainsi que de l’instabilité politique persistante ». De plus, par rapport à sa population, « le Liban a la plus forte proportion de réfugiés dans le monde, accueillant 1,5 million de réfugiés syriens et plus de 200 000 réfugiés palestiniens », constate l’agence onusienne. Elle note qu’en raison de l’inflation et du chômage, les gens ont du mal à avoir accès aux services de base, dont la qualité régresse rapidement. Elle rappelle que la pauvreté a presque doublé, passant de 28 % de la population en 2018 à 55 % en 2020.

Or ce sont les enfants qui sont les plus touchés. « Leur santé et leur sécurité sont à risques et leur avenir est mis en jeu », déplore l’Unicef. Elle explique que de plus en plus, les parents ont du mal à subvenir aux besoins de leur progéniture. Et pour pouvoir le faire, ils se trouvent obligés de « recourir à des mécanismes d’adaptation négatifs qui mettent les enfants en danger, comme le fait de les envoyer travailler, de marier les jeunes filles, de sauter des repas et de contracter des dettes ».

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« Nous nous privons de tout, pour ne pas avoir à priver nos enfants »

Tel a été le cas de Rahaf, jeune réfugiée syrienne, mariée à l’âge de 13 ans contre son gré. « Le jeune homme avait 18 ans, je ne le connaissais pas, raconte-t-elle. Je ne voulais pas me marier, mais ma mère a insisté, affirmant que je n’avais pas d’autre choix. » La jeune femme confie qu’avant le mariage, elle allait à l’école et jouait avec ses amis. « Cela s’est arrêté le jour où je me suis mariée, avance-t-elle. Je savais que cela n’était pas juste, mais ma mère m’avait dit que cet homme allait s’occuper de moi et m’offrir une meilleure vie. Elle m’a également dit que mon but dans la vie était d’être une épouse et une mère. » Son mariage n’a duré que trois mois, son mari la maltraitant. Lorsqu’elle a accouché, il lui a pris sa petite fille qu’elle n’a plus jamais revue.

Privés d’éducation

Selon le rapport, un enfant sur dix travaille, alors que dans 40 % des ménages aucun membre de la famille ne travaille et 77 % des familles ne reçoivent aucune forme d’aide sociale. De ce fait, 15 % des familles ont interrompu l’éducation de leurs enfants. La situation est encore pire pour les ménages syriens, ce chiffre s’élevant à 22 %.

C’est la situation dans laquelle se trouve Hadi, un Libanais de 15 ans, qui passe cinq heures par jour à cueillir des fruits dans les vergers d’un village du Liban-Sud, pour contribuer aux dépenses de sa famille. Mais aussi de Moussa, un réfugié syrien de 15 ans, qui passe ses journées à nettoyer les pare-brise des voitures sur un carrefour de Saïda, au Liban-Sud. Il est le seul à pourvoir aux besoins de sa famille, son père étant alité. Les deux jeunes garçons sont privés d’éducation.

D’après ce document, plus de 400 000 enfants ne suivent aucun enseignement et 25 % des familles n’ont pas les moyens d’acquérir les outils nécessaires pour l’enseignement en ligne. « La vie n’a jamais été aussi difficile », confie Fadia, mère de deux jeunes garçons de 15 et 17 ans, qui rappelle que durant la guerre civile du Liban (1975-1190), « aucun enfant n’a été obligé d’abandonner l’école et de travailler ». Ses garçons ne vont plus à l’école et aident à la cueillette des oranges.

« Même avec leur contribution, nous n’avons pas assez d’argent pour nous nourrir », dit-elle.

Privés de soins

Dans son rapport, l’Unicef constate que 30 % des enfants ne reçoivent pas les soins primaires de santé dont ils ont besoin, alors que 76 % des ménages ont confié être affectés par l’augmentation massive des prix des médicaments. Enfin, 80 % des parents affirment que leurs enfants ont des difficultés à se concentrer sur leurs études à la maison, ce qui pourrait indiquer des problèmes de sous-alimentation ou des troubles psychologiques.

L’Unicef fait remarquer que si les 1,5 million de réfugiés syriens sont les plus durement touchés, le nombre de Libanais ayant besoin d’aide augmente rapidement. Dans ce contexte, elle réitère son appel aux autorités pour la mise en œuvre d’une « expansion majeure des mesures de protection sociale, pour assurer l’accès à une éducation de qualité pour chaque enfant et renforcer les services de soins primaires de santé et de protection de l’enfance ». Et l’Unicef de conclure : « Le Liban ne peut pas se permettre que des enfants soient affamés, non scolarisés, en mauvaise santé et menacés d’abus, de violence et d’exploitation. Les enfants sont l’investissement ultime de l’avenir d’une nation. »

« Nous vivons d’eau et de zaatar (thym). Mes enfants mangent en premier. S’il en reste, je mange. » Rahaf, mère de trois enfants, vit dans une des quarante tentes que forme le camp informel des réfugiés syriens à Darb el-Sim, à l’est de Saïda. Depuis qu’elle a fui sa ville natale de Homs, il y a sept ans, « la situation s’est dégradée graduellement »....

commentaires (2)

Tout a fait d accord avec marie helene. Les etudes sont faussees car les donnees ne sont pas les bonnes ... Une petite syrienne mariee de force : quel rapport avec la situation au liban ? ??!!!

Goux-Pelletan

16 h 57, le 02 juillet 2021

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Commentaires (2)

  • Tout a fait d accord avec marie helene. Les etudes sont faussees car les donnees ne sont pas les bonnes ... Une petite syrienne mariee de force : quel rapport avec la situation au liban ? ??!!!

    Goux-Pelletan

    16 h 57, le 02 juillet 2021

  • En melangeant Syriens et Libanais vous faussez toutes les etudes et tous les pourcentages. Drôle de façon de faire des calculs. Maintenant qu'il n'y a plus de ressources au Liban , les syriens devraient retourner tenter leur chance chez eux.

    Marie-Hélène

    01 h 16, le 02 juillet 2021

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