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Campus - RÉSEAUX SOCIAUX

Nadine Chahine veut briser les stéréotypes de genre sur Instagram

En créant une page qu’elle a nommée Tasawari, l’étudiante en audiovisuel à l’Université antonine compte sur l’impact du réseau sur les jeunes pour mener sa lutte pour les droits des femmes.

Nadine Chahine veut briser les stéréotypes de genre sur Instagram

Avec les crises actuelles que l’on traverse au Liban, Nadine Chahine rappelle que les femmes figurent parmi les catégories les plus vulnérables, que le taux de violence domestique a augmenté ou que beaucoup n’ont plus accès aux produits hygiéniques. Photo Dana Cheaito

Étant un verbe s’adressant en langue arabe au genre féminin, Tasawari, le nom de la page Instagram créée par Nadine Chahine, signifie prends-toi en photo. Une invitation directe aux femmes de briser le silence, de se manifester afin de réclamer leurs droits et de casser les stéréotypes. « J’ai beaucoup pensé au nom de la plate-forme. Je voulais que ce soit un verbe d’action. Je veux que les femmes partagent leurs vraies photos, confie la jeune étudiante. Je les invite à reconnaître ainsi que leur vraie image n’est pas celle partagée sur les médias ou par la société. » Pour cette étudiante de 21 ans en dernière année d’audiovisuel à l’Université antonine, Tasawari signifie également imagine-toi un monde où règne l’égalité. « Je pense toujours à la phrase “Je suis bien plus forte que tu ne l’imagines” », s’empresse-t-elle d’ajouter. « Je veux que chaque femme sache qu’elle est forte ! Je veux qu’elle sache qu’elle n’est pas maudite juste parce qu’elle est une femme », insiste-t-elle encore.

Réagissant aux divers problèmes que rencontrent les femmes au Liban, Nadine Chahine crée Tasawari pour sensibiliser les jeunes – femmes et hommes – sur les droits des femmes et l’égalité entre les individus. Avec un graphisme attrayant, s’inspirant de la culture pop selon sa créatrice, et des procédés interactifs qui invitent les visiteurs à partager leurs opinions et leurs témoignages, la plate-forme virtuelle tente de briser les stéréotypes et de présenter une autre image que celles véhiculées par les médias. « Que ce soit dans les publicités, les séries ou autres, la position de la femme est inférieure à celle de l’homme. De plus, celle-ci est sexualisée, ou bien elle est confinée dans son rôle de mère ou d’épouse. Il n’y a rien de mauvais à être une mère ou une épouse... mais c’est le manque d’égalité qui m’énerve. Il y a tellement de stéréotypes que je ne peux même pas les citer, fait-elle remarquer. Ces images sont gravées dans l’inconscient des spectateurs qui imitent parfois ce qui se passe à la télé. » Ce qui ronge encore plus Nadine Chahine, ce sont les répercussions négatives qu’ont les stéréotypes sur le comportement des individus, leur culture, leur identité ou sur les décisions qu’ils prennent dans leur vie, citant à titre d’exemple la discrimination, l’inégalité des salaires, la violence exercée contre la femme ou le choix de ses études qui limite ses possibilités de carrière et son épanouissement sur le plan professionnel. « Maintenant, je pense beaucoup aux mères libanaises qui ne peuvent pas donner la nationalité à leurs enfants. Par ailleurs, on n’a pas vraiment des lois contre le viol et le harcèlement. On dit à la femme que c’est de sa faute si elle a été violée ou harcelée. Et je pense surtout aux jeunes filles, lorsqu’on leur dit que la société les traitera de telle manière juste parce qu’elles sont des filles. Je pense également aux jeunes filles qui sont obligées de se marier. Tous ces sujets me révoltent », s’indigne la jeune féministe.

Tasawari, un combat qui lui tient à cœur

Inspirée par Joumana Haddad, écrivaine, journaliste et militante pour les droits des femmes, Nadine Chahine a commencé à se poser des questions assez tôt, des interrogations puisées dans son vécu et qui l’ont engagée sur la voie du féminisme. « Adolescente, je ne comprenais vraiment pas pourquoi nos corps sont sexualisés. Pourquoi me disait-on comment je devais me comporter ? Pourquoi me disait-on comment je devais m’habiller pour ne pas “exciter” les hommes? Pourquoi j’ai culpabilisé lorsqu’on m’avait envoyé une photo d’un organe masculin ? Dois-je supporter les regards à cause de mon genre ? Dois-je supporter qu’on me touche le corps ? » confie-t-elle, évoquant l’anxiété et la dépression dans lesquelles elle avait alors plongé suite à une série d’incidents liés aux questions qu’elle vient de soulever. « Et là, j’avais commencé à penser aux autres filles et à ce qu’elles ont vécu. Plus je grandissais, plus je comprenais », poursuit l’activiste, membre du Joumana Haddad Freedoms Center. Réfléchissant sur la situation des femmes « qui doivent survivre dans une société patriarcale », elle se mit ainsi à lire et à s’informer sur ces sujets, percevant petit à petit ce qu’elle avait « à faire pour lutter contre tout ça ». Sa colère l’avait ainsi incitée à créer Tasawari. « Je voulais lancer une plate-forme pour essayer d’aider les personnes qui souffrent de cette situation », affirme Nadine Chahine. Alors qu’elle était seule à avoir lancé la page sur Instagram en novembre, elle se retrouve aujourd’hui entourée par toute une équipe, une vingtaine de femmes et d’hommes : lycéens, étudiants et même des trentenaires. « Nous partageons nos connaissances et nos idées, nos peurs et nos expériences. Et n’importe qui souhaite faire partie de Tasawari peut me contacter par message sur la page », note-t-elle, souhaitant ouvrir la voie à ceux et celles qui veulent se faire entendre. Pour cette jeune féministe, il est ainsi indispensable d’être nombreux à lancer le débat dans notre société, de sensibiliser les jeunes et les enfants sur ces problématiques. « Nous avons hérité ces idées patriarcales de nos parents, pourquoi les répandre aux générations plus jeunes ? se révolte-t-elle. Peut-être que chaque personne a un rôle dans la vie. Ce combat est mon devoir, la raison qui me pousse à continuer. » Avec les crises actuelles que l’on traverse au Liban, Nadine Chahine rappelle que les femmes figurent parmi les catégories les plus vulnérables, que le taux de violence domestique a augmenté ou que beaucoup n’ont plus accès aux produits hygiéniques. « On a besoin de lutter pour avoir des lois qui aident vraiment les femmes », affirme-t-elle. Préparant actuellement son court-métrage de diplôme sur le sujet des femmes, cette étudiante a des projets plein la tête pour sa page Tasawari, dont une série de courts témoignages ou des contes féministes destinés aux enfants, histoire de démonter les idées stéréotypées, voire de commencer une nouvelle page.



Étant un verbe s’adressant en langue arabe au genre féminin, Tasawari, le nom de la page Instagram créée par Nadine Chahine, signifie prends-toi en photo. Une invitation directe aux femmes de briser le silence, de se manifester afin de réclamer leurs droits et de casser les stéréotypes. « J’ai beaucoup pensé au nom de la plate-forme. Je voulais que ce soit un verbe d’action....

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