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Politique - Éclairage

Comment les indépendants se préparent (ou pas) pour 2022

Les stratégies des partis issus de la société civile sont diverses, alors que beaucoup considèrent que les échéances électorales pourraient être repoussées.

Comment les indépendants se préparent (ou pas) pour 2022

Les manifestants célèbrent la démission du Premier ministre Saad Hariri à Beyrouth le 29 octobre 2019. Archives AFP

Trois scrutins devraient normalement se tenir au Liban en 2022 : les municipales, les législatives et la présidentielle. Une opportunité historique pour les partis issus de la société civile de renverser la table et de concrétiser l’élan révolutionnaire du 17 octobre 2019. 2022, c’est demain. Pourtant les partis indépendants, du moins la majorité d’entre eux, ne semblent pas se préparer activement pour ces échéances. Et pour cause : ils sont convaincus qu’elles n’auront pas lieu si le contexte n’évolue pas d’ici là. « S’il y a des élections, cela signifie qu’une transition s’est opérée au niveau du système ou que le régime a repris la main et cherche à se faire plébisciter par un scrutin », avance Mounir Doumani, membre du comité des relations politiques de Citoyens et Citoyennes dans un État, le parti de Charbel Nahas.

« Il ne faut pas être naïf, les politiciens ne nous feront pas ce cadeau. Pour eux, le risque est existentiel », abonde Jad Dagher, président du parti Sabaa.

Dans un contexte d’effondrement général du pays, une grande partie des partis traditionnels n’a certainement pas intérêt à ce que des élections aient lieu. Les seuls qui pensent pouvoir en bénéficier sont les Forces libanaises et les Kataëb qui réclament à cor et à cri des élections anticipées et qui pourraient concurrencer les partis issus de la société civile en se présentant également comme des forces d’opposition. La révolte de 2019, la crise économique, la double explosion du port et la crise du coronavirus sont autant de raisons pour les partis au pouvoir de repousser l’échéance électorale. Ce ne serait pas une première. Les Libanais ont été privés d’élection parlementaire de 2009 à 2018, alors que la Chambre a prolongé son propre mandat sous couvert d’une situation sécuritaire dangereuse. « Ces gens se fichent de la Constitution », dit Mounir Doumani.

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Comment sortir de cette impasse politique ? Comment relancer l’esprit de contestation et permettre une transition du pouvoir ? Du côté des partis indépendants, les réponses sont diverses. À l’image de la problématique qui s’est posée dans d’autres pays touchés par le vent des printemps arabes, l’effondrement de la scène politique traditionnelle a laissé place à une pléthore de groupes d’opposition divisés, sans leadership ou direction politique commune. Les groupes formés durant la thaoura sont aussi nombreux qu’il y a de villes et chefs-lieux (on en compte près de 400) ; aussi disparates qu’il y a d’idéologies politiques, allant de la gauche radicale à la droite libérale. Les tentatives de faire front commun n’ont pas réellement abouti pour le moment, même si de réelles avancées ont eu lieu, en raison non seulement des ego des uns et des autres mais aussi de choix politiques différents sur des sujets de premier plan.

« Prêt à mener la bataille »

Chacun semble aujourd’hui adopter sa propre stratégie. L’activiste et avocat Wassef Haraké estime que le moment n’est pas opportun pour entrer dans une logique électorale. « Le combat réside pour le moment dans la création d’un bloc soudé d’opposition et dans la lutte contre le Covid-19 et la crise économique », dit-il. Il n’est pas le seul à dresser ce constat. Ali Mrad, du groupe « La Commune du 17 octobre », considère aussi comme prématurée toute réflexion sur les prochaines élections. Selon lui, les partis qui se focalisent exclusivement sur le scrutin commettent une erreur stratégique majeure, la priorité étant d’abord de créer une alliance commune.

Si certains partis ne croient pas à la tenue des élections dans les délais prévus, d’autres sont prêts à tenter de tirer leur épingle du jeu et se mettent d’ores et déjà en ordre de bataille. Au sein du Bloc national, la machine électorale sera fin prête en mai, une année avant le scrutin, assure-t-on. Pour Antoine Moukheiber, directeur terrain au Bloc national, son parti aura un rôle pivot à jouer durant le scrutin. « Notre parti se trouve à la croisée des idéologies avec un programme centriste. Nous parlons avec tous les groupes d’opposition et nous nous coordonnons en vue des élections. Le Bloc national espère s’inscrire dans une grande liste regroupant la majorité des groupes ; il faudra absolument éviter les luttes intestines », explique-t-il. S’il n’écarte pas la possibilité d’un report de l’exercice démocratique, il insiste sur le fait que le pouvoir ne pourra pas le repousser ad vitam æternam. « Un parti politique se doit d’être constamment prêt à mener la bataille, nous ne laisserons pas cette chance historique passer. »

Pour Beirut Madinati (BM), l’heure est aussi à la stratégie électorale. Le parti projette de disséminer le concept de comité populaire à l’échelle du pays, l’objectif étant de créer des répliques de BM qui pourront demain propulser des candidats émanant des régions sur les listes électorales. « Nous sommes dans une logique d’expansion. Dans les trois prochains mois, plusieurs groupes en lien avec BM devraient apparaître sur la scène libanaise », déclare Paul Saber, coordinateur des relations politiques du parti.

Seulement quelques acteurs confient aujourd’hui avoir travaillé sur un programme qu’ils vont communiquer aux Libanais et défendre le moment venu. Le Bloc national aurait dû le lancer il y a quelques jours, mais il a été retardé à cause du confinement. « Nous voyons ce scrutin comme la plus grande opportunité que le Liban ait jamais connue et notre programme est à la hauteur du rendez-vous », affirme Antoine Moukheiber. Beirut Madinati travaille aussi à un programme pour les législatives. En ce qui concerne les municipales, le parti considère que le programme de 2016 reste valide sur de nombreux points, bien qu’il faille le mettre à jour. Le parti Minteshreen s’active également en vue des élections. « Nous allons prochainement finaliser notre vision, notre programme, et effectuer des élections internes pour choisir nos candidats », explique Hussein el-Ashi, un des membres fondateurs du parti. Le parti Citoyens et Citoyennes dans un État a pour sa part la particularité d’avoir déjà un programme global accessible sur son site, mais ne compte pas pour autant entamer sa campagne électorale dans les prochains mois, considérant qu’il n’y aura de toute façon pas d’élection.

Tous, sans exception, clament vouloir s’allier sur des listes communes lors des prochaines élections. Mais ils sont beaucoup moins loquaces quand il s’agit d’expliquer avec qui et sur quelles bases. D’un côté, les partis ont peur de se faire laminer par les forces traditionnelles s’ils arrivent en rang divisés. De l’autre, ils craignent de perdre une partie de leur identité politique en forgeant des alliances qui pourraient être parfois contre nature. Selon les informations recueillies par L’OLJ, une grande coalition devrait toutefois bientôt voir le jour, capable de catalyser une partie des forces de la thaoura et d’aller fragiliser certains partis traditionnels dans leur pré carré.

Trois scrutins devraient normalement se tenir au Liban en 2022 : les municipales, les législatives et la présidentielle. Une opportunité historique pour les partis issus de la société civile de renverser la table et de concrétiser l’élan révolutionnaire du 17 octobre 2019. 2022, c’est demain. Pourtant les partis indépendants, du moins la majorité d’entre eux, ne semblent pas...

commentaires (7)

J’aimerais noter deux point aussi importants l’un que l’autre. Il faudrait sortir de la notion « société civile » qui ne tient plus la route. Le peuple s’est soulevé le 17 octobre 2019 il s’est donc impliqué en politique. La société civile comme vous l’entendez concerne peut-être les ONG qui elles, œuvrent surtout pour des aides sociales. Dans votre billet ce sont bels et bien des partis ou groupements politiques. D’autre part, la notion « d’indépendants » ne me semble pas très juste, dans le sens où, quand on entre dans l’arène politique on n’est plus indépendant ! Indépendant de qui ? de quoi ? Je crois que les expressions précitées entraine une confusion chez le lecteur qui essaie de comprendre qui est la véritable opposition.

Chaden Maalouf Najjar

22 h 02, le 24 janvier 2021

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Commentaires (7)

  • J’aimerais noter deux point aussi importants l’un que l’autre. Il faudrait sortir de la notion « société civile » qui ne tient plus la route. Le peuple s’est soulevé le 17 octobre 2019 il s’est donc impliqué en politique. La société civile comme vous l’entendez concerne peut-être les ONG qui elles, œuvrent surtout pour des aides sociales. Dans votre billet ce sont bels et bien des partis ou groupements politiques. D’autre part, la notion « d’indépendants » ne me semble pas très juste, dans le sens où, quand on entre dans l’arène politique on n’est plus indépendant ! Indépendant de qui ? de quoi ? Je crois que les expressions précitées entraine une confusion chez le lecteur qui essaie de comprendre qui est la véritable opposition.

    Chaden Maalouf Najjar

    22 h 02, le 24 janvier 2021

  • L’union fait la force!

    CW

    08 h 46, le 24 janvier 2021

  • Ils n’ont besoin de s’unir qu’une fois élus dans le parlement pour former une opposition contre les vendues. Pour cela, tout le monde doit voter pour eux et surtout la diaspora qui peut écraser le nombre des élus sur le territoire. Ça serait néanmoins un plus que de s’unir au début et de présenter un programme complet sur le redressement du pays en priorité (audit, réformes, etc.). Ainsi le parlement ne pourra plus bloquer les décisions des ministres comme ce qui va être fait pour toute l’année qui suit s’il y aura un gouvernement . Faire vivre le peuple dans la faim et la pauvreté pour le racheter au moment des élections ne marchera pas cette fois.

    Alors...

    22 h 26, le 23 janvier 2021

  • Waw combien des partis , c'est la faiblesse du pays . Les grands pays comme les États Unis et les Britanique ont deux partis.????

    Eleni Caridopoulou

    17 h 10, le 23 janvier 2021

  • Tous ces mouvements devraient se réunir autour de la bannière libanaise et unifier leurs forces avec un seul et unique mouvement qui s’appellera WATANI, ALAMI. Ma nation, mon drapeau pour mettre hors circuit tous les vendus et leurs bannières insultantes pour notre peuple entier. Les coqs devraient être écartés puisqu’il n’y a plus de poulailler à défendre mais un pays avec tous ses citoyens débout pour le sauver et lui rendre sa souveraineté piétinée et leur dignité massacrée.

    Sissi zayyat

    13 h 38, le 23 janvier 2021

  • dans les payas a systeme democratique, l'argent est legalement autorise qui est un element majeur a tout parti politique spécialement lors des elections. le liban n'echappe pas a cette regle-non pardonnez moi- pour les partis politiques du liban l'argent est le MOTEUR PRINCIPAL de leur existence meme, surtout celui provenant de l'etranger-les principaux ayant chacun sa propre chaine tele.les independants pourront ils compter sur des appuis financiers ?

    Gaby SIOUFI

    11 h 35, le 23 janvier 2021

  • Les élections se pointes...gare aux assassinats...

    Wlek Sanferlou

    01 h 34, le 23 janvier 2021

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