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Société - Crime

Kahalé a fait ses adieux à Joe Bejjani sous le choc et dans la douleur

Une grande foule en noir a assisté aux funérailles du jeune photographe, tué la veille devant sa maison par deux assassins qui restent non identifiés. Son téléphone aurait cependant été géolocalisé par la police.


Kahalé a fait ses adieux à Joe Bejjani sous le choc et dans la douleur

Une foule nombreuse autour du cercueil blanc, porté à bout de bras par les proches et les amis et accueilli en héros dans l’église Mar Antonios.

Le choc était toujours visible hier sur les visages des habitants de Kahalé et du caza de Aley, qui se sont déplacés en grand nombre pour faire leurs adieux à l’enfant du pays, Joe Bejjani, assassiné la veille alors qu’il s’apprêtait à emmener ses enfants à l’école. Ce crime horrible a secoué la paisible bourgade, d’autant plus qu’il a visé un homme populaire, un père de famille sans histoire qui travaillait dans une compagnie de téléphonie mobile et pratiquait la photographie à ses heures perdues.

Hier, il était pleuré par ses proches, notamment sa jeune épouse et ses parents éplorés. Son cercueil blanc a été porté à bout de bras par ses proches et amis, et la foule lançait du riz sur son passage. Les habitants de Kahalé et de ses environs étaient si nombreux à se rendre aux obsèques, célébrées en l’église Mar Antonios, qu’ils ont pratiquement bloqué la route principale du village et les forces de l’ordre ont dû détourner le trafic vers d’autres voies.

Lundi vers 7h, Joe Bejjani s’apprêtait à démarrer sa voiture quand deux inconnus masqués ont ouvert la portière et lui ont tiré trois balles dans le corps avec une arme munie d’un silencieux, avant de s’emparer de son téléphone portable et de prendre la fuite, aidés apparemment par un troisième complice. Une caméra de surveillance a filmé la scène, dévoilant un comportement de tueurs professionnels qui connaissaient de surcroît les lieux et les habitudes de la victime. Ce meurtre sordide a surpris, tant le jeune homme semblait vivre une vie tranquille. La thèse de photos compromettantes liées à son activité dans le port après l’explosion du 4 août, ou alors celle de clichés qui auraient été pris dans le Sud, ont circulé dès les premières heures qui ont suivi le crime. Mais rien n’a été confirmé par les sources de sécurité qui restaient hier très peu disposées à donner de quelconques renseignements.

Toutefois, une autre source sécuritaire a confié à notre correspondante Sarah Abdallah que les services de sécurité ont pu géolocaliser l’endroit où se trouve le téléphone. Ils ont également étudié les images de la caméra de surveillance qui a filmé la scène, à l’affût de détails qui pourraient trahir l’identité des assassins, ou d’individus qui observaient le domicile de la victime à Kahalé, au matin du meurtre.


Le père éploré de la victime soutenu par un proche. Photos Marc Fayad


Le crime « ne restera pas impuni », affirme Fahmi

Jean Bejjani, président du conseil municipal de Kahalé, semblait toujours abattu hier au téléphone. « Nous n’avons pas encore d’indications sérieuses sur les causes de cet assassinat et nous sommes soucieux de laisser l’enquête prendre son cours, a-t-il dit à L’Orient-Le Jour. J’ai toutefois fait une tournée auprès des responsables et j’ai eu des assurances concernant le sérieux de l’enquête. Nous demandons simplement que le processus soit rapide. »

L’un des responsables politiques à avoir reçu Jean Bejjani et une délégation de son conseil municipal hier a été le ministre sortant de l’Intérieur, Mohammad Fahmi. À l’issue de l’entretien, ce dernier a déclaré que le « meurtre prémédité » du photographe Joseph Bejjani ne restera pas impuni, promettant de suivre de près cette affaire qui a choqué ce village du caza de Aley et le Liban en général.

Pour mémoire

L’assassinat d’un colonel des Douanes à la retraite soulève de nouvelles questions


« Je suivrai de près les circonstances de cette affaire jusqu’à ce que les criminels soient identifiés, a insisté M. Fahmi. Ce crime prémédité ne restera pas impuni. » De son côté, Jean Bejjani a fait part au ministre sortant du contenu des contacts qu’il a menés depuis hier avec le directeur des Forces de sécurité intérieure, le général Imad Osman, qui l’a assuré que l’enquête se déroulerait le plus rapidement possible.

À L’OLJ, M. Bejjani réaffirme que les circonstances de ce drame restent incompréhensibles pour les habitants du village. « Joe Bejjani n’avait de problèmes avec personne, aucun ennemi en apparence, dit-il. Il ne se sentait pas non plus menacé. Un crime aussi effroyable pourrait-il être lié à des photos sur son téléphone ? Nous n’en savons rien. » Selon lui, son village reste dans un état de « choc et de dégoût ». « Les gens sont perdus, terrifiés par cette brèche sécuritaire qui est un indicateur très grave non seulement pour cette localité, mais pour tout le pays », a-t-il ajouté.

Réactions multiples

Le meurtre sordide de Joe Bejjani a continué de susciter hier des réactions politiques. Les Forces libanaises ont affirmé dans un communiqué « suivre de près l’enquête sur ce crime », estimant qu’il s’agit « d’une violation grave de la sécurité de toute la société libanaise, ayant fait naître un sentiment d’inquiétude au sein de l’opinion publique, désormais convaincue que personne n’est à l’abri en présence de brigades de la mort qui abattent leurs victimes à leur convenance ». Les FL demandent aux autorités d’élucider le mystère de ce crime aussi rapidement que possible.

« Joseph Bejjani a été tué à l’aide d’un revolver muni d’un silencieux, en plein jour, s’est indigné le député de Aley Akram Chehayeb, dans un tweet. Et c’est le pays entier que l’on assassine avec une arme munie d’un silencieux. »

De son côté, le député de Jbeil, Simon Abiramia, a écrit sur son compte Twitter : « Nayla Khoury, originaire de Ehmej (Jbeil), est devenue veuve, Aya et Tala ont perdu leur père alors qu’elles ne sont que des enfants. Une arme munie d’un silencieux a ôté la vie à Joe Bejjani. Pour qui et pourquoi ? Nous avons eu vent de scénarios graves et de données étonnantes. La justice et les services de sécurité devraient nous fournir des réponses transparentes et rapides. La justice va-t-elle révéler les secrets du silencieux, ou est-ce que la caméra de Joseph gardera les siens ? »

Une nouvelle ère d’assassinats ?

Dans un communiqué, l’Observatoire euro-méditerranéen des droits de l’homme a fortement dénoncé l’assassinat de Joe Bejjani. L’organisation basée à Genève a mis en garde « contre le glissement du Liban vers davantage d’assassinats et de liquidations sommaires ». Le texte demande aux autorités libanaises de « diriger rapidement les services de sécurité concernés vers des enquêtes sur les assassinats, l’identification des criminels et leur pénalisation, afin de mettre un terme à l’impunité ». L’organisation lie cet assassinat à celui, en début de mois, du colonel des douanes à la retraite Mounir Abourjeily, battu à la tête à l’aide d’un objet contondant et retrouvé mort à son domicile dans la région de Jbeil. Quelques semaines plus tôt, l’ancien militaire avait été interrogé dans le cadre de l’affaire de l’explosion au port de Beyrouth.

« Le Liban ne supporterait pas de nouvelles crises, étant donné que la situation politique et sécuritaire y est très précaire, poursuit le texte. Un tel crime peut mener à un éclatement sur le terrain, qui compliquerait encore plus la configuration démographique et politique du pays. »

Enfin, l’observatoire a appelé les autorités libanaises à « ouvrir une enquête immédiate dans l’affaire du meurtre de Joe Bejjani et à arrêter au plus vite les tueurs, afin de protéger le pays de scénarios inquiétants dont il est très difficile de prédire l’issue ».

Le choc était toujours visible hier sur les visages des habitants de Kahalé et du caza de Aley, qui se sont déplacés en grand nombre pour faire leurs adieux à l’enfant du pays, Joe Bejjani, assassiné la veille alors qu’il s’apprêtait à emmener ses enfants à l’école. Ce crime horrible a secoué la paisible bourgade, d’autant plus qu’il a visé un homme populaire, un père de...

commentaires (2)

Les attentats recommencent qui est dérriere ? Faites un effort et vous comprendrez

Eleni Caridopoulou

20 h 05, le 23 décembre 2020

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Commentaires (2)

  • Les attentats recommencent qui est dérriere ? Faites un effort et vous comprendrez

    Eleni Caridopoulou

    20 h 05, le 23 décembre 2020

  • CES IR RESPONSABLES SONT TRÈS FORTS dans la gesticulation et les simulacres d’empathie et d’indignation. En fait ils attendent que le soufflé tombe pour enterrer d’un geste rapide toutes les affaires louches sans perdre leurs partisans pour les prochaines votations. Pauvres libanais, il ne vous reste que vos yeux pour pleurer vos morts et vos biens puisqu’ils ont réussi à vous anesthésier pour vous empêcher de vous révolter alors que que c’est la seule solution à nos problèmes. LES DÉGAGER. En France des dizaines de milliers de citoyens sont descendus dans la rue pour protester contre un passage à tabac par des policiers sur un de leurs concitoyens pendant qu’au Liban des centaines de morts et des liquidations s’enchaînent sans que les libanais ne sentent concernés. A croire que le pouvoir a instillé du GHB (drogue du violeur) dans leur eau pour pouvoir violer leurs droits et abuser de leur faiblesse sans que ses derniers ne se souviennent de ce qui s’était passé. Je n’ai pas d’autres explications. C’est plus que navrant, les mots me manquent pour expliquer cette apathie.

    Sissi zayyat

    11 h 29, le 23 décembre 2020

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