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Moyen-Orient - Éclairage

Le régime syrien réhabilite, à petits pas, ses chemins de fer

Une société publique chinoise a récemment fait une offre dans un projet ferroviaire qui relierait Damas à sa banlieue via quatre lignes.

Le régime syrien réhabilite, à petits pas, ses chemins de fer

Le premier train recirculant dans Alep en janvier 2017 après la reprise totale de la ville un mois plus tôt. Archives AFP

« Sikket Halab ma’tou3a » (la ligne de chemin de fer vers Alep est coupée). Ce titre populaire du chanteur syrien Hossam Jneid pourrait bientôt être de l’histoire ancienne, à en croire les médias progouvernementaux. L’axe ferroviaire qui relie la capitale damascène à Alep serait en phase finale de réhabilitation en vue d’une réouverture prochaine, selon le ministère syrien des Transports. Après avoir reconquis de vastes pans de territoire ces dernières années, le régime a rouvert à la circulation en février dernier cet axe stratégique de 400 km qui avait été coupé en 2012 lors des combats.

Si le projet ferroviaire semblait en suspens malgré divers effets d’annonces cette dernière année, l’État est toutefois parvenu à reconnecter certaines voies permettant le transport commercial et des passagers, comme celles de Homs-Damas ou Hama-Damas fortement endommagées durant la guerre. En 2015, les services passagers et de fret ont notamment repris entre les villes côtières de Lattaquié et Tartous, loin des principales zones de conflit, sur une distance d’environ 80 km. Et en 2020, les services de fret ont repris sur la ligne de 309 km reliant le port de Tartous à al-Sabinah, dans l’ouest de la Ghouta, au sud de Damas. Mais avec la crise économique sans précédent que traverse le pays, il est difficile d’entrevoir une nouvelle vague de réhabilitations dans ce secteur par l’État sans investissements extérieurs. Les sanctions occidentales qui paralysent Damas limitent d’autant plus les choix d’investisseurs, laissant Moscou et Téhéran, les deux parrains du régime, en pôle position. Des compagnies iraniennes et russes ont montré ces dernières années leur intérêt à engager leurs billes sur des projets ferroviaires en Syrie, d’autant plus stratégiques qu’ils leur permettraient de gagner en influence sur le territoire. En juillet 2019, Téhéran a annoncé qu’un projet majeur était en cours d’élaboration pour relier le port de Khomeyni, situé du côté iranien des eaux du Golfe, au port de Lattaquié. Un projet qui permettrait à l’Iran de faciliter le mouvement de ses milices et d’acheminer de l’armement. Mais sous pression maximale côté américain et face au risque de bombardements israéliens, l’entreprise est clairement compromise. Côté russe, il y aurait eu des discussions avec la société de construction Stroytransgaz fin 2019 dans l’optique de relier le port de Tartous (contrôlé par la société susnommée pour une durée de 49 ans) par voie ferrée au Golfe via l’Irak. Un pays pourrait bien passer devant Téhéran et Moscou dans la course qui les oppose pour le partage du gâteau syrien, du moins dans ce domaine : la Chine. Selon le quotidien prorégime al-Thawra, une société publique chinoise se serait placée sur les rangs la semaine dernière en faisant une offre de financement, de construction et de développement d’un projet ferroviaire qui relierait Damas à sa banlieue via quatre lignes.

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Si le projet aboutit, il n’augure toutefois pas d’un placement de la Syrie sur la nouvelle route de la soie, le monumental projet lancé par la Chine en 2013 afin d’investir dans des infrastructures de transport dans plus de 70 pays. Dans une interview à la télévision chinoise fin 2019, Bachar el-Assad n’avait pourtant pas caché son intention de tout faire pour y intégrer la Syrie.

Poste-frontière-clef de Nassib

L’organisation générale des chemins de fer syriens et son équivalent irakien ont, par ailleurs, signé le mois dernier un accord de coopération en vue de procéder au transfert de marchandises, de matières premières et de matériaux manufacturés depuis les ports syriens vers l’Irak, et inversement. La deuxième compagnie publique de transport ferroviaire syrien, la Hijaz, a de son côté annoncé son intention de lancer des travaux pour réparer la ligne Amman-Damas. Une annonce qui avait déjà été faite peu après la réouverture du poste-frontière-clef de Nassib avec la Jordanie le 15 octobre 2018.

Le réseau ferroviaire syrien de plus de 2 500 kilomètres, qui figurait parmi les plus performants du Moyen-Orient, a été gravement endommagé ces dix dernières années. Dans une interview accordée en début de semaine dernière à Sputnik, le directeur de la Compagnie générale des chemins de fer syriens, Nagib al-Fares, estimait les pertes à près d’un milliard 700 millions de dollars. Selon le site économique The Syria Report, les dégâts étaient estimés à 489 milliards de livres syriennes en 2017.

Or, pour le régime, la relance des chemins de fer est cruciale pour sa politique de reconstruction. Depuis qu’il est parvenu à reprendre plus des deux tiers du territoire grâce à l’intervention de ses alliés, Bachar el-Assad a fait de la reconstruction sa « priorité absolue ». Avec une économie à plat, le régime compte beaucoup sur ce moyen de transport pour revitaliser le commerce interne et externe.

Il s’agit aussi de redorer l’image de l’État. Pendant plus d’un siècle, des trains ont sillonné la Syrie en transportant passagers et biens sur des centaines de kilomètres, avant que les combats n’immobilisent les wagons à quai en 2012. Un mois à peine après la chute d’Alep, le régime diffusait des vidéos et des photos d’un train sillonnant la ville dévastée avec à son bord des badauds brandissant des portraits d’Assad. Quelques mois plus tard, ce sera au tour d’une vieille locomotive à vapeur de fabrication suisse, affublée de drapeaux syriens, d’effectuer son premier trajet depuis le début de la guerre entre Damas et al-Zabadani proche de la frontière libanaise.


« Sikket Halab ma’tou3a » (la ligne de chemin de fer vers Alep est coupée). Ce titre populaire du chanteur syrien Hossam Jneid pourrait bientôt être de l’histoire ancienne, à en croire les médias progouvernementaux. L’axe ferroviaire qui relie la capitale damascène à Alep serait en phase finale de réhabilitation en vue d’une réouverture prochaine, selon le ministère...

commentaires (3)

Meme sans conflit en Syrie, l'industrie chinoise gagne du terrain en automobiles et aussi en trains / chemins de fer ... Quand il y a 50 ans on pouvait voir encore quelques Peugeots ou Mercedes au Liban/Syrie, de nos jours les marques asiatiques ou chinoises sont omni-presents. Cela pour les voitures mais aussi pour chemins de fer ...

Stes David

20 h 58, le 15 décembre 2020

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Commentaires (3)

  • Meme sans conflit en Syrie, l'industrie chinoise gagne du terrain en automobiles et aussi en trains / chemins de fer ... Quand il y a 50 ans on pouvait voir encore quelques Peugeots ou Mercedes au Liban/Syrie, de nos jours les marques asiatiques ou chinoises sont omni-presents. Cela pour les voitures mais aussi pour chemins de fer ...

    Stes David

    20 h 58, le 15 décembre 2020

  • quell est l'interet de cet article..??

    MOBIUS

    13 h 28, le 15 décembre 2020

  • C est le dernier de nos soucis !

    Robert Moumdjian

    03 h 20, le 15 décembre 2020

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