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Culture - Initiative

« Faites comme chez vous », à mille lieues du désastre... au Brésil

Quitter Beyrouth et tout ce qu’elle charrie de tristesse, de colère et de traumatismes pour rejoindre une résidence d’art et de... quiétude à São Paulo. Un rêve réalisé pour sept artistes visuels grâce à la dynamique solidaire de Kaaysá Art Residency et du réseau de Temporary Art Platform (TAP).

« Faites comme chez vous », à mille lieues du désastre... au Brésil

Le groupe d’artistes libanais participant à « Make Yourself At Home: Radical Care And Hospitality ». Photo DR

Parce que les artistes libanais ont été particulièrement impactés par cette année de multiples crises. Parce que nombre d’entre eux, installés dans les quartiers périphériques du port, ont vu leur maison, leur atelier, leur studio et tout ce qu’ils avaient construit soufflés par la terrible double explosion du 4 août – quand ils n’ont pas été eux-mêmes blessés –, un large réseau de solidarité s’est tissé autour d’eux. Globalement initiées par des Libanais de l’étranger, diverses formes de levées de fonds ont été lancées pour les aider à reconstruire leurs espaces de vie et de travail. Mais qu’en est-il de l’aide à leur rétablissement physique et psychologique post-traumatique ?

C’est à ce volet que s’est attelée la Temporary Art Platform (TAP). Fondée en 2007 par la commissaire d’exposition Amanda Abi Khalil, cette petite organisation fait preuve « d’activisme artistique en soutenant des pratiques d’art social et en élaborant différents projets de résidences ». Estimant qu’il fallait d’abord aider les artistes à « se » reconstruire après le choc, la plate-forme a ainsi déployé le maximum d’efforts pour concevoir un programme offrant à un groupe particulièrement touché par l’explosion du port de Beyrouth, l’opportunité de s’en éloigner temporairement, le temps de recharger leurs batteries et de dépasser le traumatisme vécu.

Grâce à son réseau collaboratif international et à l’appui du Goethe Institut, du consulat du Brésil à Beyrouth ainsi que de donateurs privés, la TAP a conçu, en partenariat avec Kaaysá Art Residency, « Make Yourself At Home: Radical Care And Hospitality » (Faites comme chez vous : soins radicaux et hospitalité), un programme de cinq semaines de résidence au Brésil pour sept artistes visuels libanais rescapés du drame. Une parenthèse de bien-être, de remise en forme physique et mentale, loin, très loin, de l’atmosphère plombante de Beyrouth.

Les sept artistes posant devant la Kaaysá Art Residency à São Paulo. Photo DR

Réacquérir la capacité de se projeter…

C’est en immersion en pleine nature, au cœur de la forêt atlantique bordant São Paulo que Lara Tabet, Omar Mismar, Maxime Hourani, Panos Aprahamian, Nour Sokhon, Betty Ketchedjian et Nour Osseiran se sont plongés le 9 octobre à leur arrivée à la Kaaysá Art Residency. Généreusement accueillis par cette structure de résidence, mêlant hospitalité, écoute, échanges interdisciplinaires, stratégies d’entraide et rituels de soins, ce groupe de talents émergents y expérimente également, jusqu’au 14 novembre, un contact intime avec la forêt brésilienne, la mer et la communauté locale de pêcheurs indigènes, à travers des expéditions qui apportent à certains le dépaysement nécessaire au renouvellement de leur inspiration et à l’élargissement de leurs pratiques et à d’autres un champ propice à leur rétablissement émotionnel.

« Un lieu préservé et sûr pour se remettre du choc et lentement réacquérir la capacité de se projeter à nouveau dans un avenir proche », assure, avec bonheur, l’artiste visuelle et biologiste de formation Lara Tabet. Tandis que le jeune cinéaste Panos Aprahamian, qui explore dans son travail la présence spectrale des passés traumatiques dans les corps, les espaces et les relations sociales, et l’artiste du son Betty Ketchedjian voient dans cette résidence l’opportunité de participer à une entreprise collective avec d’autres praticiens culturels du Liban, du Brésil et d’ailleurs.

Petit déjeuner collectif au premier jour de la résidence. Photo DR

Idem pour les artistes plasticiens Omar Mismar et Maxime Hourani qui se réjouissent d’être « loin des micro-déclencheurs incessants du traumatisme », pour poursuivre tranquillement leurs travaux de recherches centrés, pour le premier, sur « l’intrication de l’art et de la politique à la lumière de l’esthétique du désastre » et, pour le second, sur « l’exploration du lien entre nature et soins, dans le contexte des forêts ».

Ou encore pour Nour Osseiran, photographe et membre de l’équipe curatoriale de la TAP, qui les accompagne, et qui met à profit ce sursis bienfaisant pour rassembler ses esprits, ses idées et s’atteler à la finalisation de son projet de thèse universitaire.

Une belle initiative en somme que cette résidence où se conjuguent hospitalité, art et apaisement… Un séjour qui ne pouvait mieux tomber qu’en ces temps d’impasse suffocante auxquels nous sommes confrontés dans le monde en général et particulièrement au Liban.

Parce que les artistes libanais ont été particulièrement impactés par cette année de multiples crises. Parce que nombre d’entre eux, installés dans les quartiers périphériques du port, ont vu leur maison, leur atelier, leur studio et tout ce qu’ils avaient construit soufflés par la terrible double explosion du 4 août – quand ils n’ont pas été eux-mêmes blessés –, un large...

commentaires (1)

Serait-il possible de savoir comment ce voyage a pu être réalisé en ces temps de pénurie de devises, de vols limités, de confinement au Brésil ?

F. Oscar

15 h 00, le 04 novembre 2020

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Commentaires (1)

  • Serait-il possible de savoir comment ce voyage a pu être réalisé en ces temps de pénurie de devises, de vols limités, de confinement au Brésil ?

    F. Oscar

    15 h 00, le 04 novembre 2020

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