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Moyen-Orient - Éclairage

Haut-Karabakh : Israël et la Turquie dans le même camp, mais jusqu’à quand ?

Les deux pays comptent parmi les alliés de l’Azerbaïdjan dans le conflit qui l’oppose aux séparatistes pro-arméniens. Mais les rivalités entre ces deux puissances pourraient bien changer la donne.


Haut-Karabakh : Israël et la Turquie dans le même camp, mais jusqu’à quand ?

Des militaires arméniens à Stepanakert, le 2 octobre 2020. Narek Aleksanyan/AFP

Ces derniers jours, des avions azerbaïdjanais ont été repérés assurant la liaison entre Bakou et Ouvda, une base militaire située dans le sud d’Israël. Selon des médias arméniens, l’Azerbaïdjan s’y serait approvisionné en armes à plusieurs reprises dès jeudi dernier, trois jours avant le début de l’offensive des forces armées azéries contre les Arméniens dans la région montagneuse du Haut-Karabakh. De quoi illustrer l’intensité des relations israélo-azéries, vieilles de trois décennies. L’alliance de circonstance entre les deux pays s’appuie sur des liens historiques. Israël est l’un des premiers pays à avoir reconnu l’indépendance de l’Azerbaïdjan, en 1991, lors de la chute de l’URSS. Depuis, l’État hébreu et la République du Caucase sont devenus des partenaires commerciaux stratégiques, en particulier en matière de défense. Bakou y a vu l’opportunité de prendre militairement le dessus sur son voisin arménien dans le territoire disputé du Haut-Karabakh. Selon les données du Stockholm International Peace Research Institute (SIPRI), datées de mars 2020, les Israéliens sont les premiers fournisseurs d’armes de l’Azerbaïdjan, à l’origine de près de 60 % de ses importations. Pour Israël, cette coopération économique est surtout l’occasion de mettre en œuvre sa stratégie dite de « diplomatie de la périphérie ». Autrement dit, nouer des liens avec des États musulmans non arabes pour surmonter son encerclement par des pays arabo-musulmans hostiles.

Des échanges énergétiques unissent également les deux pays. Israël importe près de 40 % de son gaz d’Azerbaïdjan. Un chiffre important au regard des récents événements en Méditerranée orientale, où les réserves de gaz sont au centre des convoitises turques, grecques et chypriotes.

Malgré l’intensité des relations entre l’Azerbaïdjan et Israël, l’État hébreu s’est montré timide dans ses réactions et s’est abstenu de tout commentaire depuis le début des hostilités dans le territoire séparatiste azerbaïdjanais, le 27 septembre dernier. Son intérêt n’est pas de se mettre à dos l’Arménie alors que l’histoire des deux peuples partagent une mémoire commune. L’État hébreu est peut-être aussi mal à l’aise à l’idée de soutenir, dans le contexte actuel, un pays musulman à majorité chiite, qui plus est soutenu par la Turquie qui a récemment développé une politique offensive à l’égard d’Israël. Leader autoproclamé de la cause palestinienne, le président turc Recep Tayyip Erdogan n’a de cesse de dénoncer publiquement les violations des droits de l’homme faites aux Palestiniens par Israël. Face à lui, le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu critique régulièrement la politique répressive de la Turquie envers les Kurdes. Dernier exemple de tension entre les deux pays, Ankara s’est opposé à la normalisation des relations israéliennes avec les Émirats arabes unis puis Bahreïn, les 11 août et 13 septembre dernier.

Faire un choix

À couteaux tirés sur de nombreux dossiers, la Turquie et Israël se trouvent paradoxalement dans le même camp au Haut-Karabakh. Ankara compte parmi les premiers soutiens de l’Azerbaïdjan et est le premier pays au monde à avoir reconnu son indépendance. Les deux États mettent en avant leur solidarité ethnique et leur langue commune. Cette attitude, vieille de 30 ans, s’accompagne aujourd’hui d’un soutien militaire sans précédent. Selon des responsables arméniens, Ankara fournirait à l’Azerbaïdjan des avions F-16 ainsi que des drones. Sans compter le déploiement de mercenaires syriens pour combattre aux côtés de l’armée azerbaïdjanaise, comme l’a confirmé hier l’Observatoire syrien des droits de l’homme.

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Les drones turcs sont-ils en train de remplacer les drones israéliens, qualifiés de « très efficaces » par un haut responsable azéri, sur le terrain ? L’Azerbaïdjan serait-il devenu un théâtre de lutte d’influence entre Israël et la Turquie ? « Ankara se sert de la vague de violence actuelle pour démontrer à l’Azerbaïdjan qu’elle doit davantage utiliser des drones et autres armes turques afin de réduire sa dépendance à l’égard des armes de fabrication israélienne », souligne à L’OLJ Galla Lindenstrauss, spécialiste du conflit. « La Turquie est en train de pousser Bakou à s’éloigner de Tel-Aviv », estime même une source diplomatique proche du dossier, sous réserve d’anonymat

Si l’influence turque s’accroît, Bakou pourrait être contrainte de faire un choix entre ses deux alliés. Une rivalité qui serait toutefois à relativiser dans ce contexte. « La Turquie n’a pas intérêt à ce que les relations israélo-azéries cessent à cause du facteur iranien », souligne à L’OLJ Sinan Ulgan, spécialiste de la Turquie au Carnegie Europe. Et pour cause, l’Iran pourrait tenter d’étendre son influence sur son voisin chiite et ainsi contrecarrer les plans israéliens et turcs.

Nagorny-Karabakh : manifestations pro-Azerbaïdjan dispersées en Iran

La police iranienne a dispersé des manifestations de soutien à l’Azerbaïdjan dans son conflit contre l’Arménie au Nagorny-Karabakh, qui se sont déroulées dans le nord-ouest de l’Iran, où vit une importante minorité azérie, selon l’agence Fars. La manifestation a eu lieu jeudi à Tabriz, capitale de la province d’Azerbaïdjan-Oriental, a indiqué l’agence iranienne de presse, qui publie de brèves vidéos tournées apparemment à l’aide de téléphones portables. À Tabriz, « environ 500 personnes se sont rassemblées et ont scandé des slogans en faveur de la fin de l’occupation du Karabakh », enclave séparatiste arménienne au sein de l’Azerbaïdjan, selon l’agence. « Certains ont tenté de perturber l’atmosphère avec des slogans ethniques (mais) la police est intervenue pour mettre fin » au rassemblement, a poursuivi Fars, dans la nuit de jeudi à vendredi. Fars a publié deux vidéos montrant des dizaines de personnes rassemblées dans la rue et scandant « Karabakh » ou « Vive l’Azerbaïdjan ! » en langue azérie. Sur l’une d’elle, on semble discerner une charge de policiers.

À Zanjan et Ardabil, capitales des provinces iraniennes du même nom, les forces de police sont intervenues pour empêcher des manifestants de se rassembler pour manifester. « Quelques personnes » ont été arrêtées par les forces de l’ordre à Zanjan pour avoir scandé « sporadiquement des slogans ethnocentriques », ajoute Fars sans plus de détails. L’Iran compte une importante communauté azérie (turcophone), établie principalement dans le nord-ouest du pays. Selon certains estimations, les Azéris seraient environ 10 millions sur une population totale de plus de 80 millions d’habitants.

Ces derniers jours, des avions azerbaïdjanais ont été repérés assurant la liaison entre Bakou et Ouvda, une base militaire située dans le sud d’Israël. Selon des médias arméniens, l’Azerbaïdjan s’y serait approvisionné en armes à plusieurs reprises dès jeudi dernier, trois jours avant le début de l’offensive des forces armées azéries contre les Arméniens dans la région...

commentaires (3)

peuplades.la stupidite gagne

Antoine Hage

13 h 39, le 04 octobre 2020

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Commentaires (3)

  • peuplades.la stupidite gagne

    Antoine Hage

    13 h 39, le 04 octobre 2020

  • L'interminable adoration du "Veau d'or" par une Humanité qui n'en a aucune.

    Christine KHALIL

    13 h 26, le 03 octobre 2020

  • Il serait bon de noter que la province du haut Karabakh fut illégalement mise sous tutelle azérie par Staline en 1920 avec la province du Nakhichevan tous deux majoritairement arméniennes. Nakhichevan au cours des décennies à perdu sa majorité arménienne par des politiques de Baku. Le Karabagh où sévissaient les mêmes politiques a failli avoir le même sort. Le peuple du Nagorno-Karabagh s’est révolté et a voté en vertu de la constitution soviétique sa séparation de l’Azerbaïdjan.il est maintenant hors de question de revenir à une situation ex ante après plusieurs guerres armées et tant de pertes humaines et matérielles. L’Arménie est prête à redéfinir ses frontières avec l’Azerbaijan moyennant la reconnaissance définitive par ce dernier de l’indépendance du Nagorno-Karabakh et le droit de son peuple à vivre en paix et liberté .

    Diran Avedian

    04 h 33, le 03 octobre 2020

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