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Société - Solidarité

« Je l’ai supplié, ya Watan, baisse ton arme, mais il m’a ignoré et a tiré »

Un rassemblement pour la liberté de la presse et en faveur des manifestants blessés par balles lors des manifestations du 8 août a été organisé devant le Palais de justice en signe de soutien aux journalistes Riad Tawk et Dima Sadek et à l’activiste Farouk Yaacoub, entendus par le parquet.

« Je l’ai supplié, ya Watan, baisse ton arme, mais il m’a ignoré et a tiré »

« Deviens assassin et tu t’en sortiras, deviens espion et on t’aidera à t’enfuir, reste un individu libre et tu seras jugé », peut-on lire sur cette banderole.

Des dizaines de manifestants issus de la société civile se sont rassemblés hier matin devant le Palais de justice de Beyrouth, en signe de solidarité avec des journalistes auditionnés par le parquet après une plainte en diffamation déposée contre eux par le président du Parlement, Nabih Berry. Les contestataires sont venus réclamer « l’arrêt des atteintes aux libertés et des poursuites contre les journalistes ». Plusieurs médecins regroupés au sein du collectif « Les blouses blanches » étaient également présents pour soutenir les journalistes et continuer à défendre les blessés des manifestations du 8 août dernier. Le collectif avait été créé pour dénoncer les blessures graves infligées aux contestataires par la garde du Parlement lors des protestations organisées dans le périmètre de la Chambre, à cause de l’usage de balles de caoutchouc et de balles réelles.

Les journalistes Dima Sadek et Riad Tawk, ainsi que l’activiste Farouk Yaacoub ont ainsi été auditionnés par le parquet général près la Cour de cassation dans le cadre du procès intenté contre eux et contre la chaîne MTV par le chef du législatif, l’une des figures les plus conspuées par la rue qui réclame depuis le 17 octobre le départ de la classe dirigeante. M. Berry a voulu les poursuivre en justice pour « diffamation et calomnie, ainsi que pour fausses informations et incitations aux dissensions confessionnelles » à la suite de l’émission Bi Esm el-Chaab (Au nom du peuple) diffusée le 19 août et présentée par Riad Tawk. Dans le cadre de cette émission, les invités Dima Sadek et Farouk Yaacoub avaient critiqué la police du Parlement, qui dépend de la présidence de la Chambre, à la suite de tirs à balles réelles contre des manifestants qui accusaient les dirigeants d’être responsables de l’explosion au port de Beyrouth quatre jours après le drame. Les invités avaient qualifié la police du Parlement de « bande criminelle » et les policiers du Parlement de « voyous ».

Des médecins membres du collectif « Les blouses blanches » montrent des photos des blessures infligées par la garde parlementaire aux manifestants et appellent les ONG internationales à réagir. Photo Samir Moukheiber

Devant le Palais de justice, l’hymne national est entonné puis plusieurs personnes prennent la parole pour à la fois rappeler l’importance de la liberté de la presse au Liban, « où elle porte une valeur constitutionnelle », et dénoncer « les violences policières » de la garde du Parlement. Le Dr Georges Ghanem, membre du collectif « Les blouses blanches », ne cache pas sa colère face à l’usage de cartouches à grenailles de plomb « qui ont déchiré les corps de dizaines de blessés ». « Il faut qu’une enquête internationale sous la supervision de l’ONU soit menée. La police du Parlement écume les plaintes civiles sans pour autant faire elle-même l’objet de poursuites ni même d’enquête de la part du ministère public », déplore-t-il. Il annonce ensuite avoir mobilisé les organisations de défense des droits de l’homme Human Rights Watch et Amnesty International à ce sujet.

Le général Georges Nader, un officier à la retraite et une des figures de proue du mouvement du 17 octobre, explique qu’« il est interdit, conformément aux conventions internationales, de tirer des balles en caoutchouc à bout portant contre des manifestants à moins de 50 mètres, et encore moins sur la partie supérieure du corps ». Ces balles ne doivent en effet être utilisées qu’en dernier recours, après avoir épuisé toutes les autres techniques de répression policière, comme l’indique l’article 7 du code de conduite des FSI et en respectant une série de précautions. « Ce sont eux les criminels qui doivent être interpellés, et non pas Riad Tawk et Dima Sadek qui ne faisaient que leur métier de journalistes libres », déclare-t-il devant la foule. Un autre militaire à la retraite, ayant servi quarante ans dans l’armée libanaise, s’est dit victime « de la milice du Parlement », en montrant ses pieds. « Ils m’ont tiré une balle dans le pied. Ils ne font partie d’aucune institution sécuritaire officielle. Je ne vois pas de quel autre mot on pourrait les qualifier », en allusion au terme « voyous » qui a valu des poursuites judiciaires aux trois activistes.

Abdallah a perdu un œil durant les affrontements du 8 août. « Je me trouvais à 15 mètres d’un agent de la garde parlementaire. Je l’ai supplié de baisser son arme en criant, “Ya Watan, baisse ton arme”, mais il m’a ignoré et a tiré quand même. J’ai reçu une balle dans l’œil et une autre sur le torse », raconte-t-il, avec rancœur.

En attendant que les accusés sortent, des contestataires accrochent des nœuds coulants à l’entrée du Palais de justice, symboles de leur volonté de voir les dirigeants jugés et condamnés pour leurs actes. Une banderole est également placardée sur la barrière du Palais, avec cette phrase lourde de sens : « Deviens assassin et tu t’en sortiras, deviens espion et on t’aidera à t’enfuir, reste un individu libre et tu seras jugé. »

Les manifestants scandent avec énergie des slogans et des chants révolutionnaires jusqu’à la sortie des trois accusés de l’enceinte du tribunal. Le présentateur Riad Tawk explique avoir « réaffirmé devant le juge que le tir à balles réelles est un acte criminel ». « Ce combat judiciaire ne fait que commencer et nous le poursuivrons jusqu’à ce que la justice fasse son travail. Ils compteront jusqu’à mille avant de nous tirer dessus la prochaine fois », ajoute-t-il. L’activiste politique Farouk Yaacoub renchérit, en assurant devant la presse : « Nous n’avions pas peur lorsque nous étions sous la botte sécuritaire syrienne. Ce n’est pas aujourd’hui que cela va changer. » Quant à la journaliste Dima Sadek, elle annonce avoir réclamé, avec ses collègues accusés, la comparution de Nabih Berry lui-même devant la justice, « puisqu’il est le supérieur hiérarchique de la police du Parlement ».

Les trois disent avoir aussi demandé l’audition des chefs des principaux organes sécuritaires libanais pour clarifier le cadre juridique et institutionnel de la garde du Parlement, d’autant que l’ancienne ministre de l’Intérieur, Raya el-Hassan, avait révélé en novembre dernier que celle-ci ne relevait pas des FSI et qu’elle avait un statut particulier.

L’affaire est à présent clôturée au niveau du parquet général près la Cour de cassation. Elle poursuivra son cours devant le tribunal des imprimés, où elle sera transférée dans les jours à venir.

Des dizaines de manifestants issus de la société civile se sont rassemblés hier matin devant le Palais de justice de Beyrouth, en signe de solidarité avec des journalistes auditionnés par le parquet après une plainte en diffamation déposée contre eux par le président du Parlement, Nabih Berry. Les contestataires sont venus réclamer « l’arrêt des atteintes aux libertés et des...

commentaires (4)

IL FAUT QUE TOUTES CES CLIQUES DE LA PEGRE QUI ETOUFFE LE PAYS DEPUIS DES DECENNIES ET LE DETRUIT DEGAGE DE BONGRE... SINON, DEGAGEZ-LES DE MALGRE !

LA LIBRE EXPRESSION

14 h 13, le 16 septembre 2020

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Commentaires (4)

  • IL FAUT QUE TOUTES CES CLIQUES DE LA PEGRE QUI ETOUFFE LE PAYS DEPUIS DES DECENNIES ET LE DETRUIT DEGAGE DE BONGRE... SINON, DEGAGEZ-LES DE MALGRE !

    LA LIBRE EXPRESSION

    14 h 13, le 16 septembre 2020

  • Le Liban est le seul pays au monde a avoir une "police du parlement" qui n'est en fait qu'une milice a la solde de Berry puisqu'il paye une partie des salaires. A partir de la, leur comportement s'explique. Cette unité qui ne répond de personne et a personne, juridiquement, devient de facto une milice et se doit d'être dissoute.

    Pierre Hadjigeorgiou

    09 h 39, le 16 septembre 2020

  • Est ce que le président Berry a le courage d’expliquer le fonctionnement de la police du parlement qui n’est pas sous les ordres du ministère de l’Intérieur tout en endossant l’uniforme des FSI. Je crains que non, car c’est tout simplement une milice composée de voyous et de racaille

    Lecteur excédé par la censure

    08 h 04, le 16 septembre 2020

  • Berry prend ses aises avec ses milices et ses attaques en diffamation. J’aimerai voir sa tronche le jour où il sera lui même devant un juge. Il veut limoger tout le monde et museler la presse et le peuple comme si ses délits étaient un secret. Les médias devraient se mettre d’accord pour faire une UNE collective le concernant si jamais il réitère ses plaintes ou qu’il touche à un cheveu d’un journaliste. Ça s’appelle de la solidarité.

    Sissi zayyat

    02 h 32, le 16 septembre 2020

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