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Moyen-Orient - Diplomatie

Entre Israël et Bahreïn, un « coming-out » prévisible

Donald Trump a annoncé hier que Manama et l’État hébreu allaient établir des relations diplomatiques.


Entre Israël et Bahreïn, un « coming-out » prévisible

Une combinaison de photos avec, à gauche, le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu et, à droite, le roi de Bahreïn Hamad ben Issa al-Khalifa. Photo AFP

Un mois après l’accord entre les Émirats arabes unis et Israël, Bahreïn est devenu hier le second État du Golfe, le quatrième dans le monde arabe, à normaliser ses relations avec l’État hébreu. Dans une mise en scène très proche de celle qui avait été orchestrée le mois dernier, c’est le président américain Donald Trump qui a annoncé hier soir dans un tweet que les deux pays ont convenu d’établir des relations diplomatiques. Il ne s’agit pas d’un accord de paix puisqu’ils n’ont jamais été en guerre, mais cela implique la reconnaissance officielle d’Israël par Manama.

L’annonce n’est pas surprenante, mais le timing peut interpeller. Bahreïn était depuis des années le pays du Golfe qui semblait le plus proche d’une normalisation avec Israël. En mai 2018, Manama avait brisé un tabou en soulignant le « droit d’Israël de se défendre », après des frappes israéliennes contre des positions iraniennes en Syrie, une façon implicite de reconnaître l’existence de l’État hébreu. Entre ce dernier et l’Iran, cela fait des années que Manama a fait son choix, considérant Israël comme un allié contre la menace iranienne. Mais Bahreïn faisait jusque-là une distinction entre le dossier iranien et le dossier palestinien, conditionnant une normalisation de ses relations avec Israël à la création d’un État palestinien dans les frontières de 1967, se conformant ainsi à l’initiative de paix arabe de 2002.

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L’accord de normalisation entre les Émirats arabes unis et Israël semble avoir changé la donne pour Manama, d’autant plus que celui-ci a été suivi d’une offensive diplomatique américaine pour pousser d’autres pays arabes à agir dans le même sens. Le secrétaire d’État américain Mike Pompeo et le gendre et conseiller spécial du président américain, Jared Kushner, se sont rendus récemment dans le royaume pour l’encourager à suivre l’exemple émirati. On aurait pu penser que Manama allait attendre d’évaluer les conséquences du deal israélo-arabe avant de s’engager dans cette voie, d’autant plus que, contrairement aux Émirats, le petit royaume doit gérer une opinion publique politiquement engagée et hostile à la normalisation.

Le manque de réactions diplomatiques, mais aussi au niveau des rues arabes, à la suite de la décision émiratie, a dû convaincre le royaume de faire le même pari. « La décision est plus facile à assumer après celle des Émirats, d’autant plus que l’initiative d’Abou Dhabi n’a pas créé de grands remous dans le monde arabe », décrypte Hussein Ibish, chercheur à l’Arab Gulf States Institutes à Washington. Même la Ligue arabe, dont les leaders rivalisaient par le passé de surenchère anti-israélienne, n’a pas condamné le marché israélo-émirati. Bahreïn tout comme l’Arabie saoudite ont accepté que les avions israéliens survolent leur territoire pour rejoindre les Émirats.

Moyen-Orient postaméricain

Les pays du Golfe assument, les uns après les autres, ce qui était implicite depuis des années. La question palestinienne ne les intéresse plus. La rivalité avec l’Iran mais aussi avec la Turquie fait d’Israël un allié objectif, et une normalisation avec l’État hébreu permet d’être dans les bonnes grâces de l’administration Trump qui a fait de l’Iran son principal adversaire dans la région. Le royaume de Bahreïn dominé par la famille Khalifa, qui fait partie de la minorité sunnite, est d’autant plus sensible à la menace iranienne que sa population est majoritairement chiite. Le royaume accuse tous ses opposants de liens avec l’Iran, afin de museler toute critique à son égard.

« Pour Bahreïn, le réel intérêt de se rapprocher d’Israël est stratégique et entièrement centré autour de la question iranienne, considérée comme une menace existentielle », développe Hussein Ibish. Israël multiplie les frappes aériennes contre l’Iran et ses alliés en Syrie, et dans une très moindre mesure, en Irak et peut apparaître pour les pétromonarchies du Golfe comme le pays, à l’exception des États-Unis, le plus susceptible d’affaiblir « l’axe de la résistance ». La stratégie israélienne est toutefois centrée uniquement sur ses propres intérêts, et il paraît peu probable que l’État hébreu se transforme demain en gendarme régional pour les pays du Golfe. Mais ces derniers anticipent aussi le Moyen-Orient postaméricain dans lequel, avec ou sans Donald Trump, ils considèrent qu’ils ont intérêt à faire front commun avec Israël contre l’Iran. Benjamin Netanyahu travaille depuis des années sur un rapprochement avec les pays du Golfe afin de marginaliser un peu plus les Palestiniens en vue de les pousser à accepter toutes ses conditions. Donald Trump peut également s’enorgueillir de ce second rapprochement en un mois et apporter ainsi une nouvelle preuve à sa base évangéliste qu’il est le président le plus favorable à Israël de l’histoire des États-Unis. « Le président Trump veut montrer qu’il est capable d’obtenir de vraies avancées diplomatiques avant l’élection de novembre », estime Ibrahim al-Assil, chercheur au Middle East Institute à Washington.

Pour mémoire

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La prise de Bahreïn est d’autant plus intéressante pour le couple américano-israélien qu’elle suppose que l’Arabie saoudite, le gros poisson de la péninsule, n’est pas insensible à leurs chants des sirène malgré les déclarations officielles. « Il est évident que Bahreïn a reçu un feu vert saoudien », dit Hussein Ibish, qui rappelle que le petit royaume dépend entièrement de son grand frère en matière de sécurité. Le royaume saoudien devra cependant prendre en compte beaucoup plus de paramètres, notamment sur le plan religieux, pour en faire de même, mais sera sans doute particulièrement attentif à l’évolution des relations entre Israël, Abou Dhabi et Manama.

« Coup de poignard dans le dos »

Si les trois protagonistes ont tous mis en avant le fait que l’accord allait favoriser la paix dans la région, l’objectif de ce point de vue-là est on ne peut plus clair : faire comprendre aux Palestiniens qu’ils sont isolés et qu’ils n’ont d’autres choix que d’accepter les termes du gouvernement de Netanyahu.

Alors que les Émirats avaient justifié leur normalisation par un renoncement – une suspension si l’on en croit la version israélienne – de l’annexion de pans de la Cisjordanie, Manama n’a même pas pris la peine de trouver une excuse convenable pour tenter de garder la face auprès des Palestiniens. Bahreïn avait déjà accueilli la conférence annonçant le volet économique du plan Kushner et ne cachait pas depuis son soutien à cette initiative diplomatique rejetée par toutes les factions palestiniennes. « L’accord entre Bahreïn et Israël est un coup de poignard dans le dos de la cause palestinienne et du peuple palestinien », a déclaré hier à l’AFP Ahmad Majdalani, ministre des Affaires sociales de l’Autorité palestinienne. Le Hamas, qui contrôle la bande de Gaza, a dénoncé pour sa part une « agression » portant un « grave préjudice » à la cause palestinienne.

Le communiqué commun diffusé par la Maison-Blanche précise que Bahreïn se joindra à la cérémonie de signature de l’accord de normalisation entre les Émirats et Israël prévue mardi à la Maison-Blanche en présence de Benjamin Netanyahu. Prochaine étape, « faire d’Israël un membre du Conseil de coopération du Golfe », s’amusaient hier soir les commentateurs sur la toile.

Un mois après l’accord entre les Émirats arabes unis et Israël, Bahreïn est devenu hier le second État du Golfe, le quatrième dans le monde arabe, à normaliser ses relations avec l’État hébreu. Dans une mise en scène très proche de celle qui avait été orchestrée le mois dernier, c’est le président américain Donald Trump qui a annoncé hier soir dans un tweet que les deux...

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BARAM EL DOULEB. LES MOUMANA3ISTES N,ONT PLUS DE PAIN.

LA LIBRE EXPRESSION

10 h 34, le 12 septembre 2020

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Commentaires (2)

  • BARAM EL DOULEB. LES MOUMANA3ISTES N,ONT PLUS DE PAIN.

    LA LIBRE EXPRESSION

    10 h 34, le 12 septembre 2020

  • La fin du chantage palestinien!

    IMB a SPO

    05 h 23, le 12 septembre 2020

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