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Moyen-Orient - Éclairage

La relation entre Israël et les Émirats déjà entachée par les F-35

Alors qu’Abou Dhabi a les chasseurs américains en ligne de mire, l’État hébreu s’oppose fermement à toute possible vente.

La relation entre Israël et les Émirats déjà entachée par les F-35

Des avions de combat italiens F-35 participent à l’exercice multinational de défense aérienne « Drapeau bleu » sur la base aérienne d’Ovda, au nord de la ville israélienne d’Eilat, le 11 novembre 2019. Jack Guez/AFP via Getty Images

Dix jours à peine après l’annonce surprise de la normalisation de la relation entre les Émirats arabes unis (EAU) et Israël, la polémique fait tache. Selon le site d’information américain Axios, Abou Dhabi a annulé une réunion trilatérale avec Washington et l’État hébreu à la suite des propos du Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, s’opposant à une possible vente d’avions de combat américains F-35 aux EAU. Prévue pour vendredi dernier à New York, la cérémonie officielle devait réunir publiquement les ambassadeurs aux Nations unies des trois pays concernés et être suivie de la publication d’un communiqué conjoint. Un retournement de situation qui intervient en outre au moment où le secrétaire d’État américain Mike Pompeo effectue une tournée dans la région en vue de promouvoir la normalisation des liens avec Israël auprès des pays arabes.

La controverse a débuté la semaine dernière quand le quotidien israélien Yediot Aharonot a fait état d’une clause secrète dans l’accord de normalisation, approuvée par Benjamin Netanyahu et donnant le feu vert à Washington pour procéder à la vente de F-35 et de drones, entre autres, à Abou Dhabi, suscitant une levée de boucliers du côté israélien. « L’accord de paix historique entre Israël et les EAU ne comprenait pas le consentement d’Israël à un accord d’armement quelconque entre les États-Unis et les EAU », a fustigé le Premier ministre de l’État hébreu dans un communiqué. Selon la loi américaine, les États-Unis doivent s’assurer que l’État hébreu conserve sa domination militaire sur le reste des États de la région dans le cadre de leurs ventes d’armes – un point essentiel, alors que Washington fournit à son allié une assistance dans ce domaine atteignant plusieurs milliards de dollars par an.

Ajoutant un peu plus d’huile sur le feu, le président américain Donald Trump a indiqué, lors d’une conférence de presse mercredi dernier, qu’une acquisition de F-35 par les EAU était « en train d’être passée en revue ». Confirmant la volonté d’Abou Dhabi d’acheter ces avions de combat, le ministre d’État émirati aux Affaires étrangères Anwar Gargash déclarait le lendemain, lors d’un entretien accordé au groupe de réflexion américain Atlantic Council, que « les EAU s’attendent à ce que (leurs) exigences soient acceptées et (…) qu’avec la signature de ce traité de paix dans les semaines ou les mois à venir… , aucun obstacle ne devrait plus être là ». « L’idée même d’un état de belligérance ou de guerre avec Israël n’existe plus », avait-il souligné, ajoutant qu’Abou Dhabi a les F-35 dans sa ligne de mire « depuis six ans ».

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Produit par l’entreprise américaine Lockheed Martin, « le F-35 est un chasseur de dernière génération qui a la particularité d’être furtif et d’être doté de systèmes contre-mesures électroniques qui lui permettent de ne pas être détecté par les systèmes de défense antiaérienne », explique à L’Orient-Le Jour Michael Horowitz, spécialiste du Moyen-Orient à LeBeck International, un think tank basé à Bahreïn. Israël, qui dispose de 26 de ces avions de combat et en a commandé 50 supplémentaires, est le seul pays de la région à avoir accès à cette technologie de pointe – les États-Unis ayant interrompu la vente de F-35 à la Turquie l’an dernier face au refus d’Ankara de mettre un terme à l’achat de missiles antiaériens russes S-400. « Le prince héritier d’Abou Dhabi, Mohammad ben Zayed, veut que (l’achat de F-35) consolide la supériorité aérienne des EAU dans le Golfe », remarque Bruce Riedel, ex-responsable au sein de la CIA et chercheur à la Brookings Institution.

Ambitions régionales d’Abou Dhabi
En mettant l’accent sur le matériel militaire et la maîtrise technique, les Émirats se sont déjà démarqués dans la région sur le plan de leur force aérienne, intervenant en Libye en 2011, en Syrie dans le cadre de la coalition contre l’État islamique ou encore au Yémen pour appuyer le gouvernement de Abd Rabbo Mansour Hadi contre les rebelles houthis, appuyés par l’Iran. Ajouter une technologie de pointe convoitée telle que les chasseurs F-35 à son arsenal permettrait également aux EAU de renforcer leur stratégie de dissuasion face à l’Iran, leur ennemi numéro un dans la région, et la Turquie, dont les velléités régionales empiètent sur celles des EAU. « Pour autant, je ne crois pas que son acquisition soit nécessairement une “priorité” pour les EAU, mais ce serait le signe d’une relation rapprochée avec Washington et cela servirait à “valider” les ambitions régionales d’Abou Dhabi », note Michael Horowitz.

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Alors que le gendre et conseiller de Donald Trump, Jared Kushner, serait le plus fervent partisan de cette vente, l’armée émiratie aurait récemment reçu un briefing classifié par des officiels américains au sujet des F-35, a rapporté le quotidien américain The New York Times. Un dossier qui est toutefois loin de faire l’unanimité du côté du Congrès américain, qui tient le rôle-clé d’approuver ou non le processus des ventes d’armes mené préalablement par le département d’État. S’il va de l’avant, le plus gros de ce dossier épineux pourrait alors se jouer sur le terrain du Congrès, appuyé par les batailles entre les lobbies pro-israéliens, pro-émiratis et des fabricants d’armement et dont les conséquences pourraient être lourdes. « Si Israël cherche activement à bloquer la vente de F-35 à Abou Dhabi, l’accord de normalisation s’effondrera », estime Bruce Riedel, avant de préciser que « si les Émiratis obtiennent le F-35, les Saoudiens feront pression à leur tour, ce qui sera beaucoup plus problématique pour Israël ». « Il ne faut pas exagérer cette polémique ni la place du F-35 dans les négociations entre Israël, les EAU et les États-Unis », nuance pour sa part Michael Horowitz. Selon lui, « les Émiratis sont certainement outrés de l’attitude de Netanyahu qui a dit qu’il ferait tout pour empêcher l’acquisition du F-35 par Abou Dhabi. Mais je ne suis pas sûr que les EAU aient pensé que, même avec le soutien d’Israël, l’acquisition de F-35 soit réaliste ».

Dix jours à peine après l’annonce surprise de la normalisation de la relation entre les Émirats arabes unis (EAU) et Israël, la polémique fait tache. Selon le site d’information américain Axios, Abou Dhabi a annulé une réunion trilatérale avec Washington et l’État hébreu à la suite des propos du Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, s’opposant à une possible vente...

commentaires (2)

Israel veut le beurre et l'argent du beurre ha ha

Eleni Caridopoulou

18 h 41, le 27 août 2020

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Commentaires (2)

  • Israel veut le beurre et l'argent du beurre ha ha

    Eleni Caridopoulou

    18 h 41, le 27 août 2020

  • Avec ces F-35 Abou Dhabi sera-t-elle traitée en suprématie comme Israël ?A suivre .

    Antoine Sabbagha

    18 h 37, le 27 août 2020

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