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Société - Reportage

« Nous sommes en train de sauver Beyrouth car personne ne le fait à part nous »

Installés à Mar Mikhaël, les volontaires du « Basecamp » fournissent les services d’aide et d’assistance aux personnes dans le besoin.

« Nous sommes en train de sauver Beyrouth car personne ne le fait à part nous »

L'entrée du « Basecamp » près des locaux de l'ancienne gare ferroviaire de Mar Mikhaël à Beyrouth, le 14 août. Photo Emilie Madi

D’ordinaire laissé à l’abandon, le site ressemble désormais à une véritable fourmilière humaine. Masques sur le nez et gilets fluorescents sur le dos, une armée de volontaires s’activent derrière les barrières de sécurité installées à l’entrée du parking de l’ancienne gare ferroviaire de Mar Mikhaël. Au milieu des immeubles dévastés de Beyrouth, le lieu rebaptisé « Basecamp » (camp de base) sert désormais de quartier général à ces Libanais qui ont décidé de retrousser leurs manches pour rebâtir la capitale et venir en aide à ceux dans le besoin. « Nous faisons indirectement le travail du gouvernement », lance la bloggeuse et activiste politique et sociale Hiba Dandachli, le ton déterminé. Et pour cause, alors que les autorités sont largement aux abonnés absents depuis la double explosion du port de Beyrouth qui a ravagé la capitale le 4 août, l’accès aux services de base dépend désormais uniquement de l’entraide entre citoyens.

Des volontaires travaillent sous les tentes. Photo Emilie Madi

Le « Basecamp » en est l’un des symboles. L’initiative, qui a débuté au lendemain des explosions avec la mobilisation d’un petit groupe pour déblayer les rues de la ville, rassemble désormais plus de 2 000 personnes, réparties entre 150 volontaires fixes et ceux qui viennent ponctuellement leur prêter main forte. Fruit des efforts conjoints des mouvements Menteshrin, Muwatin Lebnene, Baytna Baytak et de l’ONG Embrace, le camp est d’abord installé près de la tour de verre baptisée Skyline à Mar Mikhaël avant de déménager à deux reprises en raison du danger d’effondrement des immeubles alentour. « C’était magique de voir tous ces gens venir aider et de voir aujourd’hui comment cela a évolué », confie Hiba Dandachli, qui a suivi le projet depuis ses débuts. Tous les matins, une première réunion a lieu vers 8h pour faire le point sur les tâches à accomplir pendant la journée et ajuster l’emploi du temps en fonction des retours d’informations, puis une seconde en fin de journée pour faire le bilan.

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Sous les tentes beiges, kaki et rouges, le site de l’ancienne gare ferroviaire de Mar Mikhaël a été divisé en plusieurs stands : ingénierie civile et architecture ; matériel de nettoyage et de déblayage des décombres ; produits pour bébés ; assistance alimentaire ; soins médicaux ainsi que soutien psychologique et émotionnel. Un appui d’autant plus essentiel que les explosions ont traumatisé l’ensemble des Beyrouthins, réveillant aussi les mauvais souvenirs liés aux guerres et attentats passés. « Le fait que l’on soit présent sur place pour écouter peut aider à encourager les personnes à parler dans un environnement sûr et confidentiel », explique Rani, un grand brun aux cheveux bouclés âgé de 24 ans, volontaire au sein de l’ONG Embrace en tant qu’opérateur depuis environ un an.

Le stand des produits pour bébés. Photo Emilie Madi

Quadriller la ville

« C’est le minimum que l’on puisse faire. Nous avons un devoir moral envers nous-mêmes et le peuple qui est atteint », estime notre consœur, la journaliste Médéa Azouri, qui s’occupe de la gestion du stand de distribution des cartons alimentaires. Malgré la cohue, tout est organisé au millimètre près. Telle une cheffe d’orchestre, Médéa Azouri gère les allées et venues des camions remplis de nourriture, un portable qui ne cesse de sonner et les stocks de plats chauds et froids répartis entre les foyers inscrits sur une liste pré-établie et livrés en partenariat avec Toters. En plus des plats, les volontaires préparent également des caisses de provisions. Au-dessus des conserves entassées à l’ombre, une liste écrite au marqueur sur un bout de carton rappelle le contenu des boîtes à préparer : pain, pois chiches, thon, maïs, farine, huile… En fin de semaine dernière, 1 500 caisses avaient déjà été distribuées.

Dans le stand en face, des jeunes assis sur des chaises en plastique tapotent rapidement sur les claviers de leurs ordinateurs portables. De grandes cartes de Beyrouth en noir et blanc, bariolées de fluo, ont été scotchées à même la table. « Nous avons quadrillé la ville en îlots – de 1 à 75 – répartis à travers les quartiers les plus touchés soit Gemmayzé, Mar Mikhaël, la Quarantaine et Bourj Hammoud », explique Léa Ghorayeb. Cette architecte de 31 ans, manager des relations clients du groupe Factory People qui réunit différentes boîtes de nuit aujourd’hui pour la plupart détruites par la double explosion, a mis sa vie en suspens pour se consacrer pleinement, avec une équipe de bénévoles, à l’établissement d’une base de données sur les foyers dans le besoin et au contrôle de l’état des immeubles touchés. « Nous sommes en train de sauver Beyrouth car personne ne le fait à part nous », affirme-t-elle.

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Balayer, nettoyer et surtout rester debout

Pour que cette fourmilière fonctionne au mieux, une procédure précise a été mise en place. Elle commence par un numéro de téléphone que les personnes touchées par les explosions peuvent appeler pour entrer en contact avec les membres du « Basecamp ». Des équipes de volontaires sont, en outre, envoyées chaque jour pour faire des inspections, immeuble par immeuble, et sont accompagnées d’un ingénieur civil dans la mesure du possible. Munies d’un questionnaire numérique préparé avec l’aide de professionnels, elles viennent à la rencontre des familles pour faire l’état des lieux et le bilan de leurs besoins et mettent à jour la base de données en simultané. Si l’immeuble n’est plus habitable, les personnes sont alors redirigées vers les membres de « Baytna Baytak » pour leur assurer un foyer temporaire sécurisé le temps d’effectuer les réparations nécessaires – prises en charge gratuitement. Depuis la mise en place de l’initiative, 550 familles ont pu bénéficier d’aides.

À terme, l’objectif des volontaires est d’étendre un peu plus le site, afin d’inclure de nouvelles installations pour pouvoir aider les personnes dans le besoin sur place. Un travail de longue haleine auquel ces héros du quotidien ont choisi de dédier leur temps pour ces prochains mois.

Numéro du « Basecamp »: 81-233092

Numéro de l’ONG Embrace: 1564

D’ordinaire laissé à l’abandon, le site ressemble désormais à une véritable fourmilière humaine. Masques sur le nez et gilets fluorescents sur le dos, une armée de volontaires s’activent derrière les barrières de sécurité installées à l’entrée du parking de l’ancienne gare ferroviaire de Mar Mikhaël. Au milieu des immeubles dévastés de Beyrouth, le lieu rebaptisé «...

commentaires (6)

BRAVO À VOUS TOUS JEUNES ET MOINS JEUNES DE MONTRER À CES ABRUTIS AU POUVOIR QUE NOUS N’AVONS PAS BESOIN D’EUX ET QUE NOUS POUVONS NOUS RELEVER QUOI QU’IL ARRIVE. MERCI DU FOND DU CŒUR. NOUS SOMMES FIERS D’ÊTRE LIBANAIS PARCE QU’IL Y A DES GENS COMME VOUS QUI NE BAISSENT JAMAIS LES BRAS ET QUI MONTRENT QU’AVEC PEU DE MOYENS ON PEUT FAIRE BEAUCOUP. C’EST LA BONNE VOLONTÉ QUI A TOUJOURS MANQUÉE À CES POURRIS QUI NE PENSENT QU’A LEUR INTÉRÊT. ILS TOURNENT LE DOSAU PEUPLE AUSSITÔT QU’IL A BESOIN DE QUELQUE CHOSE ET ILS LE RECONNAISSENT QUAND IL S’AGIT DE LE DÉPOUILLER.

Sissi zayyat

15 h 05, le 19 août 2020

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Commentaires (6)

  • BRAVO À VOUS TOUS JEUNES ET MOINS JEUNES DE MONTRER À CES ABRUTIS AU POUVOIR QUE NOUS N’AVONS PAS BESOIN D’EUX ET QUE NOUS POUVONS NOUS RELEVER QUOI QU’IL ARRIVE. MERCI DU FOND DU CŒUR. NOUS SOMMES FIERS D’ÊTRE LIBANAIS PARCE QU’IL Y A DES GENS COMME VOUS QUI NE BAISSENT JAMAIS LES BRAS ET QUI MONTRENT QU’AVEC PEU DE MOYENS ON PEUT FAIRE BEAUCOUP. C’EST LA BONNE VOLONTÉ QUI A TOUJOURS MANQUÉE À CES POURRIS QUI NE PENSENT QU’A LEUR INTÉRÊT. ILS TOURNENT LE DOSAU PEUPLE AUSSITÔT QU’IL A BESOIN DE QUELQUE CHOSE ET ILS LE RECONNAISSENT QUAND IL S’AGIT DE LE DÉPOUILLER.

    Sissi zayyat

    15 h 05, le 19 août 2020

  • CHAPEAU !!!

    Cabbabe Nayla

    13 h 08, le 18 août 2020

  • La HONTE . Encore une fois de plus le gouvernement a montré son incapacité de gérer. Les libanais laissés à eux même, montrent une générosité sans limite. Bravo à tous ces volontaires,qui donnent tout. Par contre la classe politique dort tranquille sans se soucier du peuple. Vraiment ils n’ont aucune dignité.

    Elias

    12 h 53, le 18 août 2020

  • magnifique ,admirable! c'est à vous que l'on devrait donner la mission de gouverner le pays;vous en auriez le courage ,la faculté d'organiser ,la solidarité ,l'intelligence ,bref ,tout ce qui manque actuellement aux vieux chefs de guerre!

    Petmezakis Jacqueline

    07 h 51, le 18 août 2020

  • Vraiment, bravo! Vous êtes magnifiques!

    NAUFAL SORAYA

    06 h 52, le 18 août 2020

  • Que Dieu vous bénisse et vous protège; continuez vos bons soins de nos compatriotes. Un libanais a l étranger

    Robert Moumdjian

    01 h 37, le 18 août 2020

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