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Monde - Portrait

Kamala Harris, ex-procureure « dure » qui ne fait pas l’unanimité en Californie

Kamala Harris, ex-procureure « dure » qui ne fait pas l’unanimité en Californie

La sénatrice américaine Kamala Harris, qui a été choisie par le candidat démocrate Joe Biden pour l’épauler dans la course présidentielle. Saul Loeb/AFP

Bilan marqué par l’attentisme, ex-procureure à la réputation « dure » qui passe mal auprès d’une partie des électeurs noirs et d’origine latino-américaine, la sénatrice Kamala Harris, choisie par Joe Biden pour l’épauler dans la course présidentielle, ne fait pas l’unanimité dans sa Californie natale. « En Californie, Kamala Harris avait la réputation d’une procureure qui attendait plutôt qu’elle ne montrait le chemin, qui ne bougeait sur les sujets polémiques que lorsqu’elle voyait qu’ils étaient politiquement viables », résumait en juin le quotidien Sacramento Bee. Et d’égrener les revirements politico-juridiques de Mme Harris en tant que procureure du district de San Francisco (2003 à 2010) puis procureure générale pour toute la Californie et ses 40 millions d’habitants, jusqu’à son élection au Congrès en 2016.

En 2004, elle s’opposait à l’assouplissement des peines planchers, qu’elle a pourtant assuré vouloir réformer lorsqu’elle a fait campagne l’an dernier pour l’investiture démocrate à l’élection présidentielle.

En 2010, elle avait tout simplement éclaté de rire à une question sur la légalisation du cannabis à titre récréatif, un enjeu pourtant très emblématique en Californie, qui a fini par l’adopter en 2018. Certes, elle n’était pas la seule à l’époque à traîner les pieds sur ces sujets, mais la sénatrice afro-américaine, née dans la contestataire ville d’Oakland, n’a certainement pas laissé une image de « procureure progressiste », contrairement à la façon dont elle avait elle-même qualifié son bilan. « De manière répétée, lorsque les progressistes l’exhortaient à s’investir dans des réformes de la justice criminelle (...) Mme Harris s’y est opposée ou est restée silencieuse », résumait en janvier 2019 Lara Bazelon, juriste et ancienne responsable d’une ONG californienne combattant les erreurs judiciaires. Mme Harris « était trop souvent du mauvais côté de l’histoire », accusait-elle dans les colonnes du New York Times.

Absentéisme criminel ?

Sur les violences policières, sujet d’actualité particulièrement sensible, elle n’a pas non plus fait preuve d’une grande audace. Elle s’était par exemple abstenue en 2015 de prendre position sur une proposition de loi visant à rendre systématiques les enquêtes indépendantes en cas d’ « usage de la force mortelle » par un policier. Des cas qui affectent de manière disproportionnée les populations noire et hispanique (respectivement 6 % et 37 % de la population californienne), dont beaucoup n’ont toujours pas pardonné la tiédeur de leur sénatrice.

Une autre décision a valu une pluie de critiques à Kamala Harris : à San Francisco, elle avait pris le parti de poursuivre des parents d’enfants manquant trop souvent l’école, là encore souvent au détriment de foyers défavorisés issus de minorités ethniques. « Je crois qu’un enfant qui n’a pas d’éducation est l’équivalent d’un crime », s’était-elle justifiée à l’époque. Mme Harris a toutefois aussi été à l’origine d’initiatives bien accueillies chez les réformateurs.

Elle a initié un programme offrant aux primo-délinquants l’abandon des poursuites en échange d’une formation professionnelle et a imposé à toutes les forces de l’ordre californiennes de former leurs agents contre les discriminations et autres arrestations « au faciès ». Pour les militants des droits civiques mais aussi les policiers, le succès le plus emblématique de Kamala Harris fut la création d’un portail internet ouvrant au public une kyrielle de données judiciaires, en particulier les violences commises par la police lors d’arrestations, pour rétablir la réalité des faits. « Ça a vraiment beaucoup aidé notre mouvement, parce que avant ça il n’y avait aucun endroit où l’on pouvait trouver les chiffres », selon Melina Abdullah, cofondatrice de Black Lives Matter à Los Angeles. « Elle a mis en place des programmes très progressistes, un point c’est tout », martèle l’avocate Niki Solis, qui a souvent plaidé face à Mme Harris lorsque celle-ci était procureure à San Francisco. « En tant que procureure générale de l’État de Californie, elle devait défendre au tribunal les lois en place, qu’elle soit d’accord avec elles ou non », explique Jack Pitney, professeur de politique américaine de l’université californienne Claremont McKenna College.

Pour ce spécialiste, les critiques disant que Kamala Harris n’était pas assez progressiste lorsqu’elle était procureure sont au contraire un atout pour l’élection de novembre, alors que les conservateurs vont très probablement l’accuser d’être trop « à gauche » et « radicale ». Cela permettra ainsi à Mme Harris de dire « regardez tous ces progressistes, ils me critiquent en disant que je suis trop conservatrice, je dois sûrement être pile à la bonne place », souligne M. Pitney.

Laurent BANGUET/AFP

Bilan marqué par l’attentisme, ex-procureure à la réputation « dure » qui passe mal auprès d’une partie des électeurs noirs et d’origine latino-américaine, la sénatrice Kamala Harris, choisie par Joe Biden pour l’épauler dans la course présidentielle, ne fait pas l’unanimité dans sa Californie natale. « En Californie, Kamala Harris avait la réputation...

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