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Politique - Enquête

Explosions à Beyrouth : qui savait quoi, quand et comment ?

Les autorités n'ont rien fait et personne ne veut assumer. Une affaire qui met une nouvelle fois en lumière les manquements et les lourdeurs d'une administration sclérosée et gangrenée par la corruption.

Explosions à Beyrouth : qui savait quoi, quand et comment ?

Un drapeau libanais recouvre partiellement, le 12 août, un bâtiment endommagé par l'explosion qui a ravagé le port de Beyrouth et la capitale, le 4 août 2020. Photo AFP / JOSEPH EID

Toute la République au Liban était au courant. Pendant des mois et jusqu'à la veille de la tragique explosion, les messages alertant sur les dangers posés par le stockage d'une énorme quantité de nitrate d'ammonium au port de Beyrouth se sont succédé.

Mais les autorités n'ont rien fait et personne ne veut assumer. Une affaire qui met une nouvelle fois en lumière les manquements et les lourdeurs d'une administration sclérosée et gangrenée par la corruption.

Le 3 août, un jour avant le drame qui a fait plus de 171 morts et dévasté Beyrouth, le ministre des Travaux publics Michel Najjar reçoit une lettre du Conseil supérieur de défense soulignant le danger que représente la présence d'un énorme stock de nitrate d'ammonium au port. "J'ai été mis au courant 24 heures avant l'explosion, lorsque j'ai reçu la lettre du Conseil", a affirmé à l'AFP M. Najjar, dont le gouvernement a démissionné lundi face à la colère de la rue. La lettre, datée du 24 juillet, ne lui parvient que dix jours plus tard. Pendant plusieurs jours, les administrations officielles ont fermé dans le cadre des restrictions liées au nouveau coronavirus et en raison de la fête de l'Adha.

L'édito de Issa GORAIEB

Le syndrome des hauteurs

M. Najjar demande alors à son conseiller de contacter le président du conseil d'administration du port, Hassan Koraytem, aujourd'hui en détention, pour lui réclamer tous les documents relatifs au dossier. Ce dernier s'exécute. Et la direction du port se décide enfin à colmater une brèche dans l'entrepôt, comme le lui demandait une directive envoyée il y a trois mois par la Sûreté de l'Etat.

Dans ce même entrepôt numéro 12, il y avait aussi "de la poudre à canon, des feux d'artifice et des seaux de peinture", des produits hautement inflammables, selon une source de sécurité. D'après cette source, les travaux de maintenance menés le 4 août ont probablement provoqué un incendie, qui a causé la gigantesque explosion ayant soufflé des quartiers entiers de Beyrouth et blessé plus de 6.500 personnes.

Dans le tiroir

Pourquoi 2.750 tonnes de nitrate d'ammonium -une substance entrant dans la composition de certains engrais mais aussi d'explosifs- ont-elles été entreposées au port depuis six ans, au cœur de Beyrouth ? Et de surcroît "sans mesures de précaution" de l'aveu même du Premier ministre démissionnaire Hassan Diab ?

La cargaison avait été saisie sur un bateau ayant fait escale à Beyrouth en novembre 2013, et gardée dans un entrepôt dédié aux marchandises confisquées. Ce n'est qu'en janvier 2020 qu'un important organisme de sécurité du pays, la Sécurité de l'Etat, entame son enquête.

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Dans son rapport interne conclu quelques semaines plus tard, et que l'AFP a pu consulter, elle y souligne que "des matières dangereuses utilisées pour la fabrication d'explosifs" se trouvent dans l'entrepôt et qu'une "matière liquide du genre nitroglycérine hautement inflammable suinte" du hangar. Elle cite également une experte en chimie qui s'était rendue sur place et selon laquelle "ces matières, si elles prennent feu, provoqueront un énorme incendie dont les conséquences pourraient presque entièrement détruire le port".

Mais pour une raison indéterminée ce rapport restera dans les tiroirs pendant plusieurs mois. Ce n'est que fin mai que le rapport est envoyé au procureur, qui donne l'ordre de faire garder le hangar et de colmater la brèche. Le même rapport est juste après envoyé à la direction du port.

Pas moi !

Depuis l'explosion, responsables politiques, judiciaires et sécuritaires se rejettent la responsabilité. Le 20 juillet, le président Michel Aoun et Hassane Diab reçoivent à leur tour le rapport de la Sécurité de l'Etat. Vendredi dernier, M. Aoun a confirmé sa réception en disant l'avoir envoyé au Conseil supérieur de défense qui s'est adressé au ministre des Travaux publics. "Je ne suis pas responsable, je n'ai pas les prérogatives de traiter directement avec le port, il y a une hiérarchie qui doit connaître ses devoirs", a dit Aoun.

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Après l'explosion, le directeur général des douanes Badri Daher, également arrêté, a laissé fuiter pour se disculper le texte d'une lettre qu'il avait adressée en 2017 à un juge des référés. Il y renouvelait sa demande de réexporter ou de vendre la cargaison dangereuse que personne ne réclamait.

Et même en 2014, la Sûreté générale, un autre appareil sécuritaire, mettait en garde contre le danger dans une lettre au président, au chef du gouvernement et aux ministres de l'Intérieur et des Travaux publics, selon une source judiciaire. Ces responsables ne sont plus en poste aujourd'hui. Mais tous sont issus de la même classe politique dont le mouvement de protestation populaire réclame le départ.

Toute la République au Liban était au courant. Pendant des mois et jusqu'à la veille de la tragique explosion, les messages alertant sur les dangers posés par le stockage d'une énorme quantité de nitrate d'ammonium au port de Beyrouth se sont succédé. Mais les autorités n'ont rien fait et personne ne veut assumer. Une affaire qui met une nouvelle fois en lumière les manquements et...

commentaires (6)

N,ALLEZ PAS TROP LOIN DANS VOS RECHERCHES. IL N,Y A QUE LE HEZBOLLAH QUI CACHE DES MUNITIONS ET DES COMBATTANTS PARMI LES CIVILS ET DANS ET AUTOUR DES PORTS ET PROBABLEMENT DE L,AEROPORT.

LA LIBRE EXPRESSION

09 h 18, le 13 août 2020

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Commentaires (6)

  • N,ALLEZ PAS TROP LOIN DANS VOS RECHERCHES. IL N,Y A QUE LE HEZBOLLAH QUI CACHE DES MUNITIONS ET DES COMBATTANTS PARMI LES CIVILS ET DANS ET AUTOUR DES PORTS ET PROBABLEMENT DE L,AEROPORT.

    LA LIBRE EXPRESSION

    09 h 18, le 13 août 2020

  • "Dans ce même entrepot numéro 12 il y avait aussi de la poudre à canon des feux d'artifice et des sceaux de peinture, des produits hautement inflammables, selon une source de sécurité." Ca y est on commence à parler d'autre chose que de feux d'artifice. Du matériel militaire, la poudre à canon, stockée au milieu de matériel civil hautement inflammable. Ca ne rappelle pas une certaine milice qui dissimule ses combattants parmi les civils maximisant ainsi les dégats occasionnés par les frappes ennemies et désignant cette lâcheté sous le terme de résistance ?

    Citoyen libanais

    07 h 48, le 13 août 2020

  • Je m’excuse pour mon manque de tact, manque d’humilité .... c’est moi qui suit pas éduquer ni intelligent ... je suis profondément désolé ... seulement sur le fait été C ... J’espère être publier car je le dois à tous les autres intervenants

    Bery tus

    01 h 17, le 13 août 2020

  • A L’OLJ FAITE ATTENTION DE NE PAS VOUS MÉLANGER AVEC CE QUE LA RUE VEUT CAR ILS NE SONT PAS ÉDUQUER ... IL SE PEUT QUE JE NE RENOUVELLERAI PLUS MALHEUREUSEMENT MON ABONNEMENT ... et vous savez pourquoi ... comment se fait il que vous ayez fait un article sur le speech du Sayyed mais lorsque le Hakim a parler vous n’avez rien reproduit !!! Malheureusement vous n’êtes plus impartiale et vous avez pris fait et cause pour les manifestants ( moi aussi je suis avec les manifestants mais avec un peu d’intelligence) Je ne comprend pas comment et pourquoi vos journalistes pourtant cultiver ne font pas un décryptage (et pas ceux de Mme HADDAD svp) Sur le fait que selon la constitution même si on arrive à 66 députés le parlement n’est pas démissionnaire ?!?!? D’ailleurs aussi j’ai annuler mon abonnement à la MTV car pareil ils poussent les gens à démissionner sans même avoir une stratégie ni un plan de secours LES LIBANAIS LE PEUPLE ET LE GOUV SONT PATHÉTIQUES POURTANT CULTIVER C’EST DOMMAGE

    Bery tus

    21 h 33, le 12 août 2020

  • Comment un general commandant en chef ne connait pas l'indice d'explosion du nitrate? On voit bien que les promotions au Liban sont par droit d'anciennete et non par merite. Heureusement que je n'ai pas a servir sous le drapeau car j'aurais deserte.

    sancrainte

    21 h 00, le 12 août 2020

  • Pourquoi il n'y pas pas les noms de ceux qui officiaient entre 2014 et maintenant? Ni bien sûr leurs affiliations politiques? Ca fait 6 ans quand même que cette cargaison a été arrimée puis confisquée, Donc faut incriminer tous ceux qui ont été en place depuis. En espérant que l'enquête éclaircira tout. Qu'elle soit faite en toute transparence. Et que ceux qui ont réellement fauté assument. Pour une fois. C'est fini d'échapper à ses responsabilités. Stop de protéger les malfaiteurs. Stop de rester au pouvoir coûte que coûte. Vous vous êtes suffisamment rempli les poches. Pour une fois rendez justice au peuple. Et fichez lui la paix. Il le mérite amplement.

    Sybille S. Hneine

    20 h 25, le 12 août 2020

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