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Politique - Explosions à Beyrouth

Interrogatoires en série, 16 arrestations, 7 responsables interdits de voyager : la justice suit son cours

Les appels à une enquête internationale se multiplient.

Interrogatoires en série, 16 arrestations, 7 responsables interdits de voyager : la justice suit son cours

Vue d'une portion du port de Beyrouth dévasté par la double explosion, le 6 août 2020. Photo FP / Patrick BAZ

Alors qu'au cours des deux derniers jours, les appels au Liban se multiplient pour qu'une enquête internationale soit menée sur les causes de la double explosion dans le port de Beyrouth, qui a tué près de 150 personnes et dévasté des pans complets de la capitale, l'enquête menée par la justice libanaise a mené jeudi à 16 arrestations et à une interdiction de quitter le territoire pour 7 responsables.

Dans ce cadre, l'ancien directeur général des Douanes Chafic Merhi et son successeur Badri Daher, le directeur général du port de Beyrouth Hassan Koraytem, ainsi que Nayla el-Hage, Moustapha Farchoukh, Michel Nahoul et Nehmé Brax sont interdits de voyager, selon une décision du procureur général près la cour de cassation, le juge Oueidate. La justice a encore demandé à la Commission d'enquête spéciale de la Banque du Liban de geler leurs comptes bancaires, ce que cette dernière n'a pas tardé à faire.

Par ailleurs, le commissaire par intérim du gouvernement près le Tribunal militaire, le juge Fady Akiki, a annoncé jeudi que seize fonctionnaires du port avaient été mis en détention. La justice a en tout interrogé jusqu'à présent 18 responsables de l'administration du port de Beyrouth, des douanes, ainsi que des personnes chargées de l'entretien et de différentes opérations dans le port.

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L'explosion de mardi a à son origine, selon les autorités, 2.750 tonnes de nitrate d'ammonium stockées depuis six ans dans un entrepôt "sans mesures de précaution", de l'aveu même du Premier ministre Hassane Diab. Les autorités libanaises affirment que l'entrepôt a explosé après un incendie. Autorités du port, services des douanes et certains services de sécurité étaient tous au courant que des matières chimiques dangereuses étaient entreposées là mais ils se sont rejetés mutuellement la responsabilité.
En juin 2019, la sûreté de l'Etat a lancé une enquête sur cette cargaison, après des plaintes répétées sur des odeurs nauséabondes qui émanaient du hangar. Elle avait signalé que l'entrepôt contenait "des matières dangereuses qu'il est nécessaire de déplacer" et indiqué que les parois de l'entrepôt étaient lézardées et recommandé qu'il soit réparé. La direction du port, qui était au courant du caractère dangereux des produits, a finalement envoyé il y a quelques jours des ouvriers colmater les fissures de l'entrepôt. Ces travaux, selon les sources de sécurité, auraient été à l'origine du drame, selon les autorités.

Interrogatoire d'un Russe à Chypre
La police chypriote a en outre indiqué avoir interrogé, à la demande des autorités libanaises, un ressortissant russe après la publication d'informations liant cet individu au bateau ayant transporté ces matières chimiques. "Les réponses de cet homme ont été envoyées au Liban", a indiqué un porte-parole de la police chypriote à l'AFP, précisant que cet homme, Igor Gretchouchkine, n'avait pas été arrêté mais seulement interrogé sur la cargaison du navire.

Selon plusieurs médias, dont le New York Times, M. Gretchouchkine avait loué le bateau, puis a été forcé d'accoster à Beyrouth en raison d'un trou dans la coque. Selon le site Marine Traffic, il est arrivé le 20 novembre 2013 et n'est jamais reparti. Il avait rencontré des problèmes techniques. D'après des sources sécuritaires libanaises, alors que le Rhosus était en transit à Beyrouth, une firme libanaise aurait porté plainte contre la compagnie à laquelle le bateau appartenait, poussant la justice locale à saisir l'embarcation. La cargaison a été placée dans un hangar et le bateau endommagé a fini par couler.

"C'est grave, on prend cela au sérieux"
Plus tôt dans la journée, le chef de la diplomatie libanaise, Charbel Wehbé, avait annoncé que les autorités libanaises avaient donné quatre jours à un "comité d'investigation" pour établir les responsabilités. "Depuis ce matin, une décision été prise de créer un comité d'investigation, qui a quatre jours maximum pour donner un rapport détaillé sur les responsabilités. Comment, qui, quoi, où ? Il y aura des décisions judiciaires, c'est grave et on prend ça au sérieux", a expliqué le ministre libanais des Affaires étrangères sur la radio française Europe 1. "Les coupables de ce crime affreux de négligence seront punis par un comité de juges", a-t-il ajouté. "C'est un accident (...) les rapports préliminaires indiquent que c'est une mauvaise gestion de produits explosifs. C'est une très grave négligence qui s'est poursuivie pendant six ans", a affirmé M. Wehbé jeudi.

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Mercredi, le gouvernement avait réclamé l'assignation à résidence des personnes responsables du stockage des produits chimiques dans le port. 

Appels à une enquête internationale
Répondant à une question sur une éventuelle enquête internationale sur les explosions, le nouveau ministre des Affaires étrangères s'est contenté de dire que "l'enquête est encore aux mains des autorités libanaises". De nombreux partis de l'opposition politique, ainsi que des Libanais opposés au pouvoir politique, réclament une enquête internationale car ne faisant pas confiance au gouvernement en place. "La commission spéciale d'enquête a lancé ses travaux, de même que les autorités sécuritaires", a ajouté M. Wehbé. "Beyrouth est dans un état d'urgence et aux mains de l'armée libanaise qui dirige l'enquête et assure la sécurité et la gestion des affaires publiques, économiques et sociales", a-t-il précisé. "L'enquête est en cours et nous ne voulons pas court-circuiter ses résultats (...)", a conclu Charbel Wehbé.

Jeudi, les appels à une enquête internationale se multipliaient. Ainsi, la ministre de la Justice, Marie-Claude Najm, a réclamé "l'assistance d'experts étrangers". Le mufti de la République, le cheikh Abdel Latif Deriane, a, lui, carrément appelé à "une enquête internationale pour déterminer ce qu'il s'est passé". Même son de cloche de la part du leader durze Walid Joumblatt. Le chef des Forces libanaises, Samir Geagea, a lui aussi réclamé que les explosions fassent l'objet d'une enquête internationale, menée par les Nations unies.

De son côté, le ministre de l'Intérieur, Mohammad Fahmi, a déclaré dans la presse qu'il démissionnerait "si la commission ne nomme pas dans son rapport d'enquête au moins trois personnes afin de leur demander des comptes". Il a par ailleurs indiqué qu'aucune plainte concernant le hangar dans lequel étaient stockées les 2.750 tonnes de nitrate d'ammonium n'avait été déposée au ministère de l'Intérieur lors de son mandat ou celui de sa prédécesseure, Raya el-Hassan. 

Alors qu'au cours des deux derniers jours, les appels au Liban se multiplient pour qu'une enquête internationale soit menée sur les causes de la double explosion dans le port de Beyrouth, qui a tué près de 150 personnes et dévasté des pans complets de la capitale, l'enquête menée par la justice libanaise a mené jeudi à 16 arrestations et à une interdiction de quitter le territoire pour...

commentaires (21)

Je viens de lire sur CNN que les autorités portuaires du Mozambique et le ministère des transports refute la notion que ce bateau était en route vers le Mozambique... Ceci expliquerait que la saisie était bidon, que les explosifs sont resté entreposés sur place sans que personne n'ose les déplacer. Leur appartenance non officielle étant donc bien connue.... Au moins, une piste qu'une enquête internationale pourrait vérifier, alors qu'une enquête locale est vouée à l'échec.

Bachir Karim

14 h 40, le 07 août 2020

Tous les commentaires

Commentaires (21)

  • Je viens de lire sur CNN que les autorités portuaires du Mozambique et le ministère des transports refute la notion que ce bateau était en route vers le Mozambique... Ceci expliquerait que la saisie était bidon, que les explosifs sont resté entreposés sur place sans que personne n'ose les déplacer. Leur appartenance non officielle étant donc bien connue.... Au moins, une piste qu'une enquête internationale pourrait vérifier, alors qu'une enquête locale est vouée à l'échec.

    Bachir Karim

    14 h 40, le 07 août 2020

  • 16 arrestations... que des sous-fifres ! 7 responsables interdits de voyager... Dommage pas de côte d'azur cet été ! La justice suit son cours... La justice dont la nouvelles affectations décidée par le conseil supérieur de la magistrature ont été enterrées dans le tiroir de l'irresponsable suprême ! yahya aahd el faouda !!!

    DJACK

    14 h 18, le 07 août 2020

  • La même armée qui a tabassé et gazé les manifestants hier, les mêmes services de sécurité qui n’ont pas su que 2750 tonnes de nitrates d’ammonium étaient entreposés la depuis 6 ans? Malheureusement les Wissam Eid ne sont plus de ce monde. Ne restent que les corrompus, valais de ceux qui contrôlent le port.

    Bachir Karim

    13 h 24, le 07 août 2020

  • Est ce qu’il a été nommé comme ministre de la défense? Procureur, ministre de la justice ou comme j’ai bien lu m’insister des AE? Alors de quoi je me mêle.? Contentez-vous de faire votre boulot de sabotage au ministère des EA et épargnez-nous vos commentaires sur celui de la justice. Non mais quel poulailler?

    Sissi zayyat

    11 h 51, le 07 août 2020

  • Assez étonnante, cette déclaration du ministre de l'intérieur: "J'exige trois boucs émissaires!". "Bien sûr, monsieur! On vous les trouvera. Facile!" Les vrais responsables, on s'en fiche!

    Yves Prevost

    07 h 17, le 07 août 2020

  • Pardon: "d'un cube de 14 mètres de côté" et non pas 14 m3, sorry

    Shou fi

    23 h 55, le 06 août 2020

  • How can the ministry of defense, the Lebanese Army and National Security Forces not be aware of the presence of thousands of tonnes of explosives in the Port of Beirut? This is first and foremost a national security issue. Investigations take time and cannot be completed in five days; otherwise, some lower officials could be scapegoated and accused of wrong-doing while innocent. The ministers, prime ministers, and presidents should be held accountable even when they're not directly responsible. How many more stashes of weapons and explosives are stored in warehouses across the country that may cause another disaster? Shouldn't there be an inventory made to prevent other future accidents?

    Mireille Kang

    23 h 24, le 06 août 2020

  • Beaucoup de coïncidence. Une épave qui tombe en panne en face du port, on la décharge en 2014 et elle repart sans sa cargaison !!! Stockage de la marchandise dans un hangar, l’équivalent de 14 m cube, énorme place. Qui paye les frais? selon internet la tonne vaut 400 USD, donc une marchandise qui vaut plus qu'un million d'USD se trouve confisquer. Qui sont les propriétaires, où sont les propriétaires, pourquoi ils ne la reprennent pas? Aucun avocat libanais n'a ouvert sa bouche pour s'exprimer, pourquoi? il est où le bâtonnier, pourquoi il ne dit rien? Le bon peuple libanais ne va pas avaler l'histoire officielle aussi facilement. Pourquoi les journalistes ne font pas leurs travail d'investigations ?

    Shou fi

    23 h 21, le 06 août 2020

  • La justice ! Quelle justice ? Celle qui a enquêté sur l’assassinat des responsables politiques libanais? Celle qui a enquêté sur les dossiers de corruption ÉNORMES, qui s’appellent je-suis-là ? Un peu comme faire un procès à la companie qui fabrique des thermomètres car le patient est malade !

    LeRougeEtLeNoir

    22 h 43, le 06 août 2020

  • Si nous comprenons définitivement le schéma de la gestion du port ce dernier est une belle rose dont le Hezbollah déguste avec joie les pétales et laisse les épines aux autres. Non les amis la vie c’est pas ça du tout !Vous étiez les maîtres du port quand vous preniez nos devises convertis en produits vitaux pour notre économie et vous les livriez à Bachar Assad sans demander l’avis de personne. Alors au port vous étiez ceux qui maîtrisiez tout et saviez tout! Car connaissant votre organisation vous n’auriez jamais laissé un hangar ou dépôt méconnu vous saviez tout ce qu il y avait !mais alors tout!

    PROFIL BAS

    22 h 43, le 06 août 2020

  • ON CACHE ENCORE LE NOM DU OU DES PROPRIETAIRES DE CES MATIERES ET A RAISON PARAIT-IL DANS LA RECHERCHE D,UN BOUC EMISSAIRE.

    LA LIBRE EXPRESSION

    15 h 54, le 06 août 2020

  • ENQUTE INTERNATIONALE OU ARABE. RIEN D,AUTRE.

    LA LIBRE EXPRESSION

    15 h 03, le 06 août 2020

  • Bien sûr qu'il est sérieux: il défend sa peau, car si l'enquête échappait au contrôle de la pseudo-justice libanaise (celle à qui le pouvoir demande de boucler l'enquête en trois jours !), alors s'en serait fini de son impunité.

    quiniou christophe

    14 h 58, le 06 août 2020

  • Monsieur le ministre, vous en déplaise, vous ne pouvez pas être juge et partie !!! On imagine en effet très bien tous les efforts qui seront déployés pour trouver des bouc émissaires afin une fois de plus de disculper les vrais reponsables, c'est à dire ceux qui nomment des "proches" incompétents aux postes clés plutôt que des gens compétents !!! Mais là, on touche à l'origine du mal...et personne n'est moins sourd...

    In Lebanon we (still) Trust

    14 h 57, le 06 août 2020

  • Il est sérieux en disant ça ? Il est d’un ridicule dont on ne sait pas s’il faut rire ou pleurer

    Lecteur excédé par la censure

    14 h 00, le 06 août 2020

  • Vite quelques lampions pour se protéger. Et surtout pas plus loin. Au nom de la paix et de la concorde civile comme d’habitude! Dégoûtant. Cette fois ci, ça ne passera plus.

    Bachir Karim

    12 h 56, le 06 août 2020

  • avec son sérieux la ,on ne risque pas de lui faire confiance!!!! on rève! meme un Trump n'aurait pas pu ètre aussi léger ,que dis je ,aussi inconscient;J.P

    Petmezakis Jacqueline

    12 h 48, le 06 août 2020

  • Mais qu’est ce qu’ils sont forts! 4 jours pour identifier les coupables, allons donc ils ont déjà la liste de ceux qu’ils veulent faussement incriminer et vite à la place des vrais coupables pour clore le dossier. Ceux là continueront à agir impunément jusqu’à la catastrophe finale. La perte du pays. Nous voulons d’abord savoir ce qui a provoqué cette explosion et ce nuage atomique. Tout le monde sait que la première explosion venait justement du hangar de nitrate mais la suivante provenait d’ailleurs avec une toute autre force et une autre couleur. alors les experts vont punir ceux du hangar 12 sans se pencher sur la vraie cause de la déflagration? Ah oui j’oublie qu’ils n’ont pas le droit de mettre leur nez dans les affaires de Hassan Nasrallah.

    Sissi zayyat

    12 h 11, le 06 août 2020

  • Il n'y a qu'au Liban ou un responsable se permet de dire qu'il prennent la destruction de la capitale au serieux. Comme-ci c'est un sujet qui aurait pu prendre a la legere. Malheuresement nous savons tous comment tout cela va finir... quelques petites mains vont etre inculpées et on va feliciter les megalomanes et on passe a autre chose.

    Toni Pantaloni

    11 h 57, le 06 août 2020

  • Ils sont suffisamment retors pour trouver des coupables, en l’occurrence quelques sous_fifres qui paieront pour les vrais responsables qui eux jouissent d' une irresponsabilité pénale attachée le plus souvent à leurs qualités d'élus, cette "mansuétude" est justifiée par l’exigence de la protection d’intérêts considérés comme supérieurs à la justice du tout-venant.... depuis 2019 un rapport attestant de la dangerosité de la situation à été soumis aux autorités compétentes au plus haut niveau de l'état, nonobstant tout danger "ces responsables" n'ont pas donné suite. Et là ce ministre sorti de nulle part se donne quatre jours afin d'élucider le problème, une insulte, une de plus, à l’intelligence des Libanais.

    C…

    11 h 48, le 06 août 2020

  • "... Les autorités libanaises se donnent quatre jours pour établir les responsabilités du drame qui a fait plus de 137 morts et 5.000 blessés. ..." ... et 5 milliards de dollars de dégâts (il faut toujours parler en dollars aux libanais pour qu’il réalisent l’ampleur de la chose)...

    Gros Gnon

    11 h 38, le 06 août 2020

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