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Politique - Double explosion

"Nous avons alerté six fois la justice sur la dangerosité du nitrate d'ammonium. En vain" , affirme le directeur des douanes

"Chaque carton qui est entreposé dans le port de Beyrouth relève de la responsabilité de la direction de ce port",selon Badri Daher.

Un homme portant un masque de protection contre le coronavirus observe le port de Beyrouth, le 5 août 2020, au lendemain d'explosions qui l'ont dévasté. Photo AFP / STR

Moins de 24h après deux explosions d'une violence inouïe qui ont dévasté le port de Beyrouth et de large pans de la capitale, deux enquêtes, l'une judiciaire et l'autre sécuritaire, ont été ouvertes. Avec une centaine de morts, près de 5.000 blessés, 300.000 sans-abris et des dégâts matériels considérables, les responsabilités sont extrêmement lourdes. Face à ce drame, Badri Daher, directeur général des douanes libanaises, laisse exploser sa colère. Pourquoi ? Car il avait alerté à de multiples reprises, assure-t-il à L'Orient-Le Jour, la justice sur le danger que représentait le stockage de plus de 2.700 tonnes de nitrate d'ammonium dans le port. C'est cet entrepôt qui, en explosant mardi, a provoqué une déflagration d'une violence inouïe, ressentie jusqu'à Chypre.

Le nitrate d'ammonium, substance qui entre dans la composition de certains engrais mais aussi d'explosifs, est un sel blanc et inodore utilisé comme base de nombreux engrais azotés sous forme de granulés, et a causé plusieurs accidents industriels.  Cette cargaison de nitrate d'ammonium était entreposée dans le port depuis 2015. Cette année, rappelle l'agence Reuters, Shiparrested.com, un réseau spécialisé dans les aspects juridiques du transport maritime, avait rapporté que le cargo Rhosus, battant pavillon moldave, avait fait escale à Beyrouth en septembre 2013 en raison de problèmes techniques alors qu'il devait relier la Géorgie au Mozambique avec 2.750 tonnes de nitrate d'ammonium dans ses cales. Il précise que le bateau s'est vu interdire de reprendre la mer après une inspection et qu'il a été abandonné peu après par ses propriétaires, ce qui a déclenché une série de procédures judiciaires de leurs créanciers. "En raison des risques liés au maintien du nitrate d'ammonium à bord du navire, les autorités portuaires ont déchargé la cargaison dans les entrepôts du port", était-il précisé.

"La justice ne nous a pas écoutés"
Une version confirmée à L'OLJ par Badri Daher. "Sa cargaison avait été déchargée suite à une décision de justice. Cette cargaison de nitrate d'ammonium était stockée dans le hangar numéro 12 du port de Beyrouth", explique-t-il. Celui-là même qui a explosé hier. Dans une déclaration aux médias un peu plus tôt, M. Daher a également confirmé qu'il y avait effectivement "un entrepôt de feux d'artifices" à côté de l’entrepôt de nitrate d’ammonium qui a explosé.

"Nous avons alerté la justice à six reprises, entre 2014 et jusqu'à récemment, sur la nécessité de ré-exporter cette marchandise hors du pays, mais la justice ne nous a pas écoutés", s'emporte le directeur des douanes, joint par téléphone. "Il ne s'agit pas d'une question relevant des douanes, car cette marchandise était stockée dans un hangar du port de Beyrouth. Ces hangars sont dirigés et exploités par la direction du port. Et cette direction est sous la tutelle du ministère des Travaux", affirme Badri Daher.

"Travaux de rénovation"
Que s'est-il donc passé mardi, quelques instants avant la première déflagration ? "A priori, ce sont des travaux de rénovation sous la responsabilité de la direction du port qui auraient provoqué les déflagrations hier", avance avec prudence le directeur des douanes, dont le service est sous la tutelle du ministère des Finances. Cette version des faits circule largement dans les milieux officiels libanais depuis hier. "Je ne veux accuser personne, car il y a une enquête judiciaire en cours. Mais chaque carton qui est entreposé dans le port de Beyrouth relève de la responsabilité de la direction de ce port", lâche Badri Daher.

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Le directeur de la société de Gestion et d’exploitation du port de Beyrouth (GEPB), Hassan Koraytem, n'a pas tardé à réagir. "(...) Les documents qui circulent et qui ont pour but de se lancer la balle des responsabilités et court-circuiter l'enquête ne sont pas la preuve d'un sens des responsabilités. Il faut une enquête ferme et transparente qui détermine les responsabilités", affirme-t-il, dans des propos rapportés par la chaîne LBCI. Hassan Koraytem s'est en outre dit "surpris du fait qu'on ne se soit pas débarrassé du matériel entreposé, malgré les correspondances entre les douanes et le juge des référés". Le directeur général affirme ensuite que cette marchandise était stockée dans un hangar séparé, et sous la garde d'un représentant de la justice, pendant six ans, "sans que la direction du port n'ait le droit de disposer de cette marchandise". Hassan Koraytem affirme enfin que la direction du port "a reçu des instructions de la justice, récemment, pour effectuer, après toutes ces années, des travaux pour colmater une brèche dans la porte du hangar afin de protéger la marchandise d'une possible détérioration ou des vols". "C'est exactement ce qu'a fait la direction du port", confirme-t-il.

Selon Riad Kobaissi, un journaliste d'investigation libanais spécialisé dans les affaires de corruption et qui a beaucoup enquêté sur le port de Beyrouth, les services des douanes cherchent à se décharger de toute responsabilité, rapporte l'AFP. Soulignant qu'à la base il est interdit d'introduire de tels produits chimiques au Liban sans autorisation, il estime que cette affaire "met en lumière l'état de délabrement et la corruption au sein des douanes, qui assument en premier lieu, mais pas exclusivement, la responsabilité" du drame.

Pour éclaircir les circonstances du drame, le procureur général près la Cour de cassation, Ghassan Oueidate, a demandé mercredi aux forces de sécurité de mener les enquêtes nécessaires. "Nous vous demandons de nous transmettre tous les rapports et documents liées au stockage de matières explosives dans l'entrepôt où l'explosion a eu lieu, d'identifier les responsables de leur stockage et de leur protection et des personnes chargées de la maintenance de l'entrepôt", conclut le juge.

Le décryptage de Scarlett Haddad

Le Liban suspendu aux résultats de l’enquête

Le gouvernement, qui s'est réuni en Conseil des ministres au palais présidentiel de Baabda, a pour sa part décrété un état d'urgence de deux semaines dans la capitale, entérinant ainsi les recommandations du Conseil supérieur de la défense qui s'était réuni dans la nuit de mardi à mercredi. Le cabinet a également décidé de donner à l'armée la possibilité de placer en résidence surveillée tous les personnes qui seront suspectées d'avoir joué un rôle dans le stockage du nitrate d'ammonium. Le cabinet a également décidé de la création d'une commission d'enquête administrative, présidée par le Premier ministre, qui devra remettre les résultats de ses investigations au gouvernement, puis aux autorités judiciaires compétentes, dans cinq jours. La justice civile et militaire a également ouvert son enquête.

Moins de 24h après deux explosions d'une violence inouïe qui ont dévasté le port de Beyrouth et de large pans de la capitale, deux enquêtes, l'une judiciaire et l'autre sécuritaire, ont été ouvertes. Avec une centaine de morts, près de 5.000 blessés, 300.000 sans-abris et des dégâts matériels considérables, les responsabilités sont extrêmement lourdes. Face à ce drame, Badri...

commentaires (15)

Tout le monde s’est concentré sur ce hangar numéro 12. Et s’il s’agissait d’un autre Hagar qui lui contenait autre chose de des feux d’artifices ou de nitrate ou même de denrées alimentaires mais des armes et des explosifs puisque l’état n’a pas un droit de regard sur ce qui se passe sur nos frontières et dans nos ports. N’était ce pas la condition sine qua non pour racler les tiroirs et piller l’état et le peuple? Il faut regarder plus loin que son nez. Si des armes et des explosifs se trouvaient au port c’est parce que c’est une cachette sûre pour le HB qui croit qu'Israël n’aura pas l’affront de bombarder un endroit aussi peuplé et qui est le cœur de la ville. Ils ont toujours misé sur son respect des citoyens innocents qu’elle a essayer d’épargner lorsque ses derniers allaient de leur provocations. Il faut croire que les choses ont changé pour Israël et que dieu nous viennent en aide car cette fois ci personne, aucune région ou le parti a planté ses armes ne sera épargné et le HB doit s’en douter après cet « accident » mais puisqu’il en a rien à cirer il ira jusqu’à détruire le pays et les citoyens avec. Il faut le désarmer avant qu’un catastrophe de plus grande ampleur ne s’abatte sur nos têtes.

Sissi zayyat

10 h 45, le 06 août 2020

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Commentaires (15)

  • Tout le monde s’est concentré sur ce hangar numéro 12. Et s’il s’agissait d’un autre Hagar qui lui contenait autre chose de des feux d’artifices ou de nitrate ou même de denrées alimentaires mais des armes et des explosifs puisque l’état n’a pas un droit de regard sur ce qui se passe sur nos frontières et dans nos ports. N’était ce pas la condition sine qua non pour racler les tiroirs et piller l’état et le peuple? Il faut regarder plus loin que son nez. Si des armes et des explosifs se trouvaient au port c’est parce que c’est une cachette sûre pour le HB qui croit qu'Israël n’aura pas l’affront de bombarder un endroit aussi peuplé et qui est le cœur de la ville. Ils ont toujours misé sur son respect des citoyens innocents qu’elle a essayer d’épargner lorsque ses derniers allaient de leur provocations. Il faut croire que les choses ont changé pour Israël et que dieu nous viennent en aide car cette fois ci personne, aucune région ou le parti a planté ses armes ne sera épargné et le HB doit s’en douter après cet « accident » mais puisqu’il en a rien à cirer il ira jusqu’à détruire le pays et les citoyens avec. Il faut le désarmer avant qu’un catastrophe de plus grande ampleur ne s’abatte sur nos têtes.

    Sissi zayyat

    10 h 45, le 06 août 2020

  • Il faut dire à leur décharge que les douanes et la direction des transports étaient trop occupées à harceler les propriétaires de bateaux de moins de 15 mètres pour les forcer à arborer des pavillons Libanais. Beaucoup plus important! Et pourquoi moins de 15 mètres me demanderez-vous? Mais parce que les bateaux de plus de 15 mètres sont exemptés de droits de douane bien sûr, 15 mètres étant la taille minimale qu'accepteraient de s'acheter ces messieurs de la haute société politique... Walaw, ils ne vont quand même pas apparaître comme faisant partie de la vulgaire classe moyenne, ya 3ayb el choum...

    Gros Gnon

    09 h 41, le 06 août 2020

  • On sait parfaitement bien qui fait la loi au port. On sait parfaitemnt bien qui a besoin de substances dangereuse et exposives dans ce pays (et non... ce ne sont pas nos agriculteurs)... on sait parfaitement bien qui intimide, menaçe et décide. Au fait... ils sont étrangement silencieux les enturbanés... non!?

    dimitri anid

    09 h 16, le 06 août 2020

  • Vous avez dit bizarre, comme c’est bizarre ... Et pour conclure les résultats des enquêtes doivent être envoyés au gouvernement avant d’être remisà la justice. Et pourquoi donc? Pour barrer les faits et les noms des responsables avant que ça soit vu par les juges? VOILÀ POURQUOI ON DEMANDE UNE JUSTICE INDÉPENDANTE DEPUIS DES LUSTRES ET QUE LE POUVOIR REFUSE. COMMENT PEUT IN ENVOYER UN RAPPORT QUI MET EN QUESTION LE GOUVERNEMENT ET LUI ENVOYER EN PREMIER LA LISTE DES COUPABLES? QU’IN NOUS EXPLIQUE COMMENT FONCTIONNE NOTRE JUSTICE DANS CETTE BOUTIQUE.

    Sissi zayyat

    08 h 53, le 06 août 2020

  • Je suis déçu de voir que l'OLJ a offert une plateforme aux mensonges des responsables dont celui des douanes. Il suffit de regarder l'émission de Riad Kobeissi diffusée hier pour comprendre que ces responsables ont été au mieux négligeants.

    Aftimos Philippe

    08 h 37, le 06 août 2020

  • DE QUELLE JUSTICE PARLE-T-IL ? DE CELLE DES VENDUS, DES CORROMPUS, DES VOLEURS ET DES M,ENFOUTISTES INCOMPETENTS ? OU CELLE DU MEGA BORDEL DONT ILS ONT FAIT DU PAYS ?

    LA LIBRE EXPRESSION

    08 h 18, le 06 août 2020

  • Une certitude: la direction des douanes est sous la tutelle du ministère des finances qui est lui-même sous la tutelle d'un parti politique bien connu qui le monopolise depuis des années. De plus le stockage de nitrate d'amonium n'est pas risqué en soi, il s'agit d'un comburant et pas d'un combustible. Il faut donc identifier le combustible. Feux d'artifices ? Cargaison secrète à destination de l'Axe des armes illégales ? Etant donné le contrôle exercé par les partis de la bande des cinq : Amal PSP Futur Hezbollah CPL sur notre justice nationale, la certitude est que seule une enquête internationale du même ordre que celle du TSL pourra faire toute la lumière sur cette affaire.

    Citoyen libanais

    08 h 13, le 06 août 2020

  • Et le voilà le coupable!!! Il s'agit de l'ouvrier qui a colmaté la brèche dans la porte du hangar. Simple et facile. A quoi bon mener des enquêtes?

    C EL K

    05 h 42, le 06 août 2020

  • Cette justice qui traîne les dossiers, même urgents, des années durant, n'est plus qu'une usure des droits.

    Esber

    05 h 09, le 06 août 2020

  • Dégueulasse ... le nitrate ne se décharge pas comme ça sans autorisation de certains organismes inter !! 2 on ne mets pas des détonateurs possible à côté du nitrate 3 qui a autoriser la décharge ?!?!! Le port en 2015 d’ailleurs jusqu’à maintenant et chapeauté par quel parti politique ?!?!

    Bery tus

    21 h 05, le 05 août 2020

  • Comme pour l’assassinat de Hariri il faut trois à quatre jours pour nettoyer les preuves compromettantes après ça ira

    PROFIL BAS

    19 h 56, le 05 août 2020

  • L'enquête doit être public et retransmise en directe à commencer par la confrontation entre le juge et Badri Daher.

    Salim Naufal / SOFTNET ENGINEERING

    19 h 30, le 05 août 2020

  • Bravo la Justice... Félicitations pour votre nonchalance et attentisme. Vous attendiez des ordres de vos maitres respectifs pour vous bouger?? Abject!!!

    Sybille S. Hneine

    18 h 42, le 05 août 2020

  • Il vont nous servir la même daube, pour protéger les mêmes criminels enturbannés qui ont étouffé, noyé et enterré ce pays à coup de victoires divines pour le compte de l"Iran, a vomir.

    Christine KHALIL

    17 h 48, le 05 août 2020

  • Comment peut on être responsable d'un port et placer des feux d'artifices à côté du nitrate d'ammonium.

    Alors...

    17 h 40, le 05 août 2020

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