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Politique - Éclairage

Quelles chances pour un dialogue autour de la neutralité du Liban ?

Quelles chances pour un dialogue autour de la neutralité du Liban ?

La neutralité au cœur d’un entretien Aoun-Raï, la semaine dernière. Photo d’archives Dalati et Nohra

Le président Michel Aoun va-t-il se plier à la demande du patriarche maronite, le cardinal Béchara Raï, et convoquer un dialogue national à Baabda pour débattre du projet de neutralité du Liban, souhaité par Bkerké ? Jusque-là, rien n’indique que le chef de l’État envisage d’aller dans ce sens en prenant le risque de mécontenter ses alliés chiites, que l’initiative patriarcale indispose.

Michel Aoun avait pourtant salué l’appel de Mgr Raï à la neutralité du Liban tout en mettant en garde, dans le temps, contre les dangers qu’il recèle, dans la mesure où cette proposition ne fait pas l’unanimité, comme le montrent les réactions hostiles des forces et des personnalités politiques et religieuses proches du tandem chiite. Un tel sujet conflictuel risque de creuser davantage les clivages politiques, ce que le Liban ne peut se permettre à un moment où il est en proie à une crise financière et économique sans précédent, avait averti Michel Aoun, prié par le chef de l’Église maronite d’essayer de convaincre ses alliés, notamment le Hezbollah, de l’opportunité de cette initiative. Mgr Raï avait développé le même raisonnement devant le Premier ministre, Hassane Diab, qui lui avait rendu visite dans sa résidence d’été à Dimane. Pour le patriarche, il est important que les dirigeants qui se sont montrés favorables à son appel, tout en le conditionnant à une entente préalable, œuvrent pour le concrétiser et contribuent ainsi à la création d’un climat politique pouvant paver la voie à un règlement de la crise.

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Dans les cercles de l’opposition, on voit dans l’appel de Bkerké un projet de modus vivendi politique de nature à remédier à tous les dysfonctionnements qui font que le Liban se trouve aujourd’hui au ban de la communauté internationale, au profit d’un État central fort. La neutralité apparaîtrait ainsi comme un contre-projet face à une politique des axes qui dessert le Liban et affaiblit l’État. Pour Bkerké, il s’agit tout simplement d’un retour à la vocation première du Liban, ni trop à l’est ni trop à l’ouest, et à une époque où grâce justement à cette neutralité, le pays avait connu une période de grande prospérité.

Or ce retour à la neutralité aura un prix que le tandem chiite n’est pas prêt à payer, surtout en cette période de grands changements régionaux et de tiraillements internationaux autour du Moyen-Orient. Le fait que l’appel à la neutralité émane de la plus haute autorité religieuse chrétienne a importuné Amal et le Hezbollah qui se sont employés à le noyer en mettant en avant le conflit avec Israël et la menace qui pèse de ce fait sur le Liban. Les deux formations chiites n’auraient pas hésité une seconde à riposter si l’opposition avait prôné la neutralité du Liban, mais ni l’une ni l’autre ne peuvent se permettre de s’engager dans une querelle politique avec le patron de Bkerké. Ni l’une ni l’autre ne peuvent se permettre non plus de faire des concessions et de soutenir, même verbalement, un projet qui risque de signer leur arrêt de mort. Aussi ont-elles décidé de s’engager dans cette bataille à armes égales. Ce sont donc des dignitaires religieux chiites qui se sont employés à répondre au chef de l’Église maronite. Les réponses se sont succédé depuis vendredi, à l’occasion des prêches hebdomadaires, puis de nouveau dimanche avec une véritable diatribe lancée par le président du Conseil supérieur chiite, cheikh Abdel Amir Kabalan, qui avait sans autre forme de procès critiqué « une dérive ». Pas plus tard qu’hier, le mufti jaafarite, cheikh Ahmad Kabalan, a fait une déclaration au ton virulent, dans laquelle il a estimé que « le Liban n’est pas à vendre » et que « l’ONU et le Conseil de sécurité ne nous ont jamais été utiles », rappelant au passage que les chiites représentent la majorité au Liban. Il s’agit d’une réponse indirecte aux propos que le patriarche avait tenus un peu plus tôt devant une délégation Kataëb, lorsqu’il avait exprimé l’espoir d’une résolution du Conseil de sécurité sur la neutralité du Liban.

Parallèlement, les alliés chrétiens du Hezbollah multiplient les conditions pour la consécration de la neutralité, comme l’a fait le chef du Courant patriotique libre, Gebran Bassil, lorsqu’il a estimé, depuis Dimane, qu’il fallait d’abord que les Israéliens se retirent des territoires qu’ils continuent d’occuper au Liban, en finir avec le terrorisme sur le territoire national, délimiter les frontières avec la Syrie et Israël, régler les deux dossiers des réfugiés syriens et palestiniens, désarmer ces derniers et les répartir sur les pays arabes.

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Cette épreuve de force autour d’une question qui engage immanquablement le sort du pays et de certaines de ses composantes ruine ainsi toute chance de dialogue, estime-t-on dans certains milieux politiques, le Hezbollah ayant fait savoir à travers ses alliés qu’il n’est pas question pour lui de s’engager dans des discussions autour de projets qui risquent de lui rogner les ailes et de limiter sa marge de manœuvre. Il est vrai que le patriarche a reconnu que la neutralité n’empêche pas le Liban de soutenir les causes arabes justes et de considérer Israël comme un ennemi, mais ce ne sont pas là les propos que le Hezbollah a entendus. Ce qu’il a entendu, ce sont les critiques adressées à la politique des axes dans laquelle il est partie prenante et qui fait qu’il a réussi à s’imposer comme une force incontournable dans la région, mais aussi au Liban où il a réussi à constituer, avec son allié chrétien, le CPL, la majorité au pouvoir.

Le Hezbollah, qui a désavoué la déclaration de Baabda que ses ministres avaient pourtant signée et qui a par la suite tourné le dos à la politique de distanciation, approuvée par le gouvernement de Saad Hariri dont il faisait partie, peut-il aujourd’hui donner son feu vert à un projet de neutralité du Liban faisant l’objet d’une résolution de l’ONU ? La réponse est non, indique-t-on de sources concordantes.

Le président Michel Aoun va-t-il se plier à la demande du patriarche maronite, le cardinal Béchara Raï, et convoquer un dialogue national à Baabda pour débattre du projet de neutralité du Liban, souhaité par Bkerké ? Jusque-là, rien n’indique que le chef de l’État envisage d’aller dans ce sens en prenant le risque de mécontenter ses alliés chiites, que l’initiative...

commentaires (11)

Un rappel. Un livre publie en 2018 ,par Hareth Boustany des ecrits et articles de Fouad Ephrem al-Boustany, decede en 1994 , posait deja la question: Le Liban, une neutralite possible ?. Un receuil interessant a evaluer.

SATURNE

19 h 10, le 21 juillet 2020

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Commentaires (11)

  • Un rappel. Un livre publie en 2018 ,par Hareth Boustany des ecrits et articles de Fouad Ephrem al-Boustany, decede en 1994 , posait deja la question: Le Liban, une neutralite possible ?. Un receuil interessant a evaluer.

    SATURNE

    19 h 10, le 21 juillet 2020

  • IL Y A QUE DES IGNORANTS QUI CROIENT ENCORE QUE AOUN PEUT FAIRE QUELQUES CHOSES DE BIEN POUR LE PAYS. SON HISTORIQUE AU LIBAN N'EST PAS ÉCRIT PAR UN CRAYON, IL EST GRAVÉ SUR LES ROCHES. ET DES MALHEUREUX QUI CROIENT ENCORE QU'IL PEUT CHANGER.

    Gebran Eid

    13 h 58, le 21 juillet 2020

  • Pour avoir la paix il ne faut pas attendre un secours exterieuril faut affronter le hezballah les mains nus...ses armes ne lui srvent a rien...il ne peut pas les utiliser contre Israel ca sera son aneantissement et la mort du Liban....et il ne peut pas les utiliser contre les Libanais ilperdra toute credibilite et ca sera sa chute inevitable....alors il faut le defier et l'affronter de front avec toutes nos forces guider par notre PATRIARCHE la seule personne audasieuse qui a ose le braver

    Houri Ziad

    13 h 52, le 21 juillet 2020

  • Dès qu'il s'agit de neutralité, de distanciation, de tout simplement laisser ce pauvre Liban exsangue à l'abri des conflits régionaux et des tiraillements entre les différents axes, pour qu'il puisse se redresser un peu, et sortir son nez de l'eau, les Tartuffe crient à la trahison et exigent le consensus et même l'unanimité. Mais quand il s'agit d'avoir une milice armée, de guerroyer contre tout le monde, d'avoir un gouvernemt à leur botte, ils se contrefoutent d'avoir l'accord des autres factions de la population. Ils décident seuls de la pluie et du beau temps. Deux poids, deux mesures.

    Georges Airut

    13 h 37, le 21 juillet 2020

  • La neutralité du Liban est un projet permettant l'union nationale pour faire face aux problèmes que le pays traverse et nous positionner comme un acteur fort dans le contexte régional et nous donne une crédibilité sur la scène internationale.

    LTEIF Salim

    12 h 02, le 21 juillet 2020

  • La neutralité dans un pays comme le notre est le chemin vers une vrai démocratie où le peuple est souverain. Elle permettrai de s'attaquer aux problèmes des libanais avant ceux des autres pays !

    In Lebanon we (still) Trust

    10 h 47, le 21 juillet 2020

  • HEHEHE ! JOBRAN B N'A PAS SUER AFIN DE PONDRE SON PAPIER ! IL N'A FAIT QU'APPOSER SON NOM EN BAS DU TEXTE INITIALEMENT ECRIT,EDITE CHANTE PAR NASRALLAH. EN RESUME C'EST APRES L'ANNIHILATION D'ISRAEL,DES USA, DE L'OTAN,DE L'ARABIE SAOUDITE ET DONC DU SUNNISME MONDIAL QUE LE LIBAN POURRA ABOUTIR A LA NEUTRALITE

    Gaby SIOUFI

    10 h 16, le 21 juillet 2020

  • DE BONGRE AUCUNE CHANCE. DE MALGRE LA DISCUSSION S,IMPOSERA. CE SERA MALHEUREUX MAIS IL FAUT Y ARRIVER PAR TOUS LES MOYENS.

    LA LIBRE EXPRESSION

    09 h 44, le 21 juillet 2020

  • "Le président Michel Aoun va-t-il se plier à la demande du patriarche maronite, le cardinal Béchara Raï, et convoquer un dialogue national à Baabda pour débattre du projet de neutralité du Liban, souhaité par Bkerké ? " Si jamais il le convoque, ce sera un sacré dialogue de sourds, à n'en pas douter...

    Georges MELKI

    09 h 41, le 21 juillet 2020

  • On commence sérieusement à se demander qui a mandaté le patriarche Raï pour clamer sur tous les toits et du matin au soir sa théorie sur la distanciation/neutralité du Liban !? De la part de cette importante autorité religieuse...on aimerait plutôt voir des actions énergiques et salvatrices...aussi du matin au soir...et partout où la misère et le désespoir minent une grande partie de la population libanaise ! Après tout, le patriarche Raï n'exhibe-t-il pas ostensiblement une immense croix en or sur sa tenue...croix qui est le symbole du Christ ??? Irène Saïd

    Irene Said

    08 h 56, le 21 juillet 2020

  • CQFD .... le Hezbollah ne veut pas d'un état pour tous il veut être seul maitre à bord avec l'appui de notre cher président qui n'a encore rien compris au film ... toutes ces déclarations sont malheureusement la preuve même que le Liban est fini, du moins pour le moment, saccagé par des hommes indignes d'être ses représentants qu'ils soient religieux ou politiques. Plus particulièrement aujourd'hui le Hezbollah fonctionne comme les pervers narcissiques, il martyrise sa victime la maltraite l'humilie et crie au scandale et à l'incompréhension sort ses armes vieillies sur la trahison et la collaboration avec Israel dès qu'il se sent menacé. Alors comme le demande notre président sénile et son gendre mafieux faisons en sorte de discuter de rien pour ne rien obtenir et continuer ainsi comme avant sans armée souveraine et sans pays souverain non plus.

    Zeidan

    08 h 18, le 21 juillet 2020

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