Le Conseil des ministres, consacré mardi à la crise économique et à ses répercussions sur le Liban, a été envenimé par de vifs débats autour du cabinet international Kroll, une des trois sociétés chargées de mener l'audit des comptes de la Banque du Liban, que des ministres chiites ont accusée d'être liée à Israël. Ce cabinet américain spécialiste de la forensic accounting ou juricomptabilité avait été mandaté fin avril par le gouvernement aux côtés des deux cabinets internationaux KPMG et Olivier Wyman. La question de la signature ou non du contrat entre l’État libanais et cette société devra être tranchée lors d'un nouveau Conseil jeudi.
Au cours de la réunion gouvernementale, le ministre des Finances Ghazi Wazni a fait savoir que "la partie qu'il représente (le mouvement Amal) n'accepte pas que l'audit soit mené par la société Kroll", selon notre correspondante à Baabda Hoda Chédid. Il a donc refusé de lancer les procédures d'audit, par crainte que "des informations ne filtrent chez l'ennemi" israélien. Son collègue à la Culture et l'Agriculture, Abbas Mortada (Amal), a indiqué qu'il s'agissait d'une société "israélienne liée au Mossad" (les services de renseignements de l’État hébreu).
Les ministres de la Justice, Marie-Claude Najm, et des Déplacés, Ghada Chreim, se sont opposées à ce que cette question soit de nouveau abordée par le cabinet, alors qu'elle avait été longuement débattue fin mars et qu'une décision officielle avait été prise de charger ce cabinet, avec deux autres, de mener l'audit des comptes de la Banque centrale.
Le chef de l’État, Michel Aoun, a lui aussi insisté sur l'importance de mettre en œuvre cette décision officielle d'auditer les finances de la BDL. Il s'est d'ailleurs interrogé sur les raisons du retard dans la signature des contrats avec les sociétés chargées de mener ces enquêtes. Il a aussi souligné que l'enquête devrait permettre de définir les raisons qui ont mené à la crise financière et monétaire actuelle, et d'obtenir des chiffres précis concernant les bilans de la Banque du Liban, ses profits et pertes et ses réserves en devises étrangères.
Le ministre de l'Industrie, Imad Hobballah, a finalement proposé de reporter les discussions sur ce sujet à la réunion gouvernementale prévue jeudi, ce qui a été accepté par le Conseil. Par ailleurs, la question de la démission du directeur général des Finances, Alain Bifani, présentée officiellement lundi, sera également étudiée lors de cette réunion.
Aides aux écoles
La réunion du gouvernement a par ailleurs été consacrée à la situation économique, qui affecte tous les secteurs du pays. Dans ce contexte, le ministre de l’Éducation, Tarek Majzoub, a annoncé que le gouvernement a approuvé un projet de loi prévoyant l'octroi de 500 milliards de livres libanaises de subventions au secteur éducatif. 150 milliards de livres seront versés aux écoles et instituts publics, tandis que les écoles privées percevront 350 milliards de livres, afin de payer les salaires des enseignants et du personnel administratif. M. Majzoub a en outre souligné qu'une circulaire serait bientôt publiée par son ministère, interdisant aux établissements de facturer les frais de scolarité en dollars.
Le ministre de l’Économie, Raoul Nehmé, a de son côté annoncé qu'il avait décidé une hausse du prix de la rabta (paquet) de 900 grammes de pain libanais à 2.000 livres libanaises, soit 500 livres de plus que le tarif fixé il y a moins d'un mois.
Pour sa part, le ministre des Télécommunications, Talal Hawat, a évoqué en séance la question des coupures intervenues sur le réseau dans certaines régions du pays, dues essentiellement à la pénurie de mazout servant à approvisionner les centraux téléphoniques. Il a annoncé qu'il se réunirait avec le ministre des Finances afin d'assurer le versement des fonds nécessaires au paiement du mazout nécessaire.
Le forage israélien en mer
S'exprimant au début de la réunion, le Premier ministre, Hassane Diab, a déploré que certaines personnes "souhaitent l'effondrement économique et financier du Liban et font tout pour empêcher le pays d'obtenir des aides" étrangères. Il a accusé ces personnes, qu'il n'a pas nommées, de chercher à "saboter le plan d'ouverture de l'Aéroport international de Beyrouth", prévu mercredi, en diffusant notamment des informations mensongères concernant des plafonds fixés pour l'entrée de devises dans le pays. Il a rappelé, comme l'avaient fait avant lui les douanes et la BDL, que les personnes arrivant au Liban peuvent faire entrer autant d'argent qu'elles le veulent. "Nous appelons la diaspora libanaise qui arrive au Liban à apporter des dollars afin d'aider leurs familles et la société", a-t-il lancé. "Dans les autres pays du monde, dont la monnaie nationale a connu pareille situation, le peuple a lutté contre ces pressions et envoyé des dollars afin de protéger sa monnaie, loin de toute considération politique. Au Liban, c'est l'inverse qui a lieu", a regretté le président du Conseil.
Abordant ensuite la question des forages israéliens dans une zone maritime contestée par le Liban, Hassane Diab a affirmé que "la souveraineté nationale est sacrée", assurant qu'il "la protégera par tous les moyens légaux". "Nous ne céderons aucun lopin de terre ni aucune goutte d'eau, point à la ligne", a-t-il déclaré.
Les interrogations de Zeina Acar
"Nous tenons au plan de redressement établi par le cabinet et aux chiffres des pertes établis dans ce texte", a encore déclaré M. Diab. Il a indiqué qu'il étudiait actuellement avec le gouverneur de la BDL, Riad Salamé, le secteur bancaire et le ministère des Finances, le meilleur moyen possible de répartir ces pertes. "Notre but n'est pas de faire plier le secteur bancaire, ni la BDL et nous ne ferons pas payer le prix de ces pertes aux déposants", a assuré M. Diab.
Pour sa part, la ministre de la Défense, Zeina Acar, a souligné, lors d'une intervention pendant la séance, que "cinq mois après la formation du gouvernement, nous nous demandons toujours ce que nous avons accompli et quel sera notre plan si le projet de redressement économique et financier n'est pas mis en œuvre". Elle a par ailleurs appelé ses collègues à trouver "des solutions techniques et politiques" à l'inflation et à appliquer les réformes "non pas pour obtenir des aides extérieures, mais parce que cela permet de construire l’État". "Il y certaines décisions que nous devons prendre immédiatement, nous ne pouvons plus perdre de temps", a-t-elle lancé, citant notamment la question de l'achat de pétrole sur le long terme, le sort des bâtiments qui abritaient des services publics ayant fusionné avec d'autres, la lutte contre le monopole des denrées de base et l'importance de "ne pas accepter que les fonds des gens soient transformés en actions dans les banques".
La ministre de la Justice, qui a déjà exprimé sa volonté de démissionner si aucune loi n'était adoptée pour consacrer l'indépendance de la justice, a quant à elle affirmé à sa sortie de la réunion qu'elle "ne comptait pas rendre son tablier, mais se battre".
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(DIAB ) a accusé ces personnes, qu'il n'a pas nommées, de chercher à "saboter le plan d'ouverture de l'Aéroport international de Beyrouth", prévu mercredi, en diffusant notamment des informations mensongères concernant des plafonds fixés pour l'entrée de devises dans le pays. IL A VITE APRIS A FAIRE COMME CEUX QUI L'ONT NOMME CAD ACCUSE SANS DEVOILER LES PERSONNES OU PARTIS RESPONSABLES BRAVO ICI 100% ACCOMPLI LA VERITE C'EST TRES VRAI QUE L'ON PEUT FAIRE ENTRER AU LIBAN TOUTE SOMME EN DEVISES MAIS AU DESSUS D'UN MONTANT ( 10000 EUROS OU DOLLARS DANS LE MONDE ENTIER ), IL FAUT FAIRE UNE DECLARATION A LA DOUANE EN ENTRANT si je suis un Libanais qui rentre au pays avec disont 15 ou 20000 dollars pour aider ma famille, je serai tres SCEPTIQUE A LES DECLARER CAR LES EMPLOYES DE L'AEROPORT POLITISES COMME ILS LE SONT OU PAS AURONT VITE COMMUNIQUE MON NOM A LEURS "AMIS 'A L'EXTERIEUR ET LA VOITURE QUI ME PRENDRA DE L'AEROPORT A MON DOMICILE AURA DISONS AVEC OPTIMISME 50% DE CHANCE D'ETRE STOPPEE ET LES DEVISES PERDUS CONTRE ME LAISSER EN VIE TEL EST LA TRISTE HISTOIRE DU LIBAN AUJOURDH'UI COMME ELLE L'ETAIT DURANT LA PERIODE SOMBRE DE 1975 A 2005
LA VERITE
14 h 30, le 02 juillet 2020