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Société - Éducation

La Mission laïque française impose une cure d’austérité à ses enseignants libanais

Sit-in, hier, au GLFL d’Achrafieh d’une centaine de professeurs, pour protester contre une atteinte à leurs droits acquis.

La Mission laïque française impose une cure d’austérité à ses enseignants libanais

Dans l’enceinte du GLFL, des enseignants mécontents. Photo DR

Une centaine de professeurs du Grand Lycée franco-libanais de Beyrouth (GLFL) ont observé un sit-in hier, dans l’enceinte de l’établissement scolaire d’Achrafieh, pour protester contre des mesures d’austérité qui les toucheront à la rentrée prochaine, et qui réduiront les droits acquis des enseignants libanais. Par droits acquis, ils entendent les avantages financiers dont ils bénéficiaient jusque-là au sein des cinq établissements de la Mission laïque française au Liban, sous forme de primes d’ancienneté, de treizième et quatorzième mois ou d’aide à l’assurance. Et ce, sachant qu’ils continuent de recevoir la totalité de leur salaire sur base de la loi 46, les six échelons exceptionnels inclus. Après le licenciement ou l’invitation à la démission de 180 enseignants de la MLF, le 15 juin, sur fond de crise économico-financière sans précédent, le corps enseignant toujours en place est invité à signer cette modification de son contrat d’ici à demain, 1er juillet, sous peine de licenciement. En effet, conformément à la législation libanaise, les établissements éducatifs privés ont l’obligation de procéder aux licenciements avant le 5 juillet. L’effondrement de la livre libanaise par rapport au dollar et l’explosion du taux de chômage ont accru le non-paiement des écolages par les parents d’élèves, tandis que de nombreux élèves du privé ont rejoint les bancs de l’école publique ou d’établissements privés moins onéreux. Autant de facteurs qui provoquent des licenciements d’enseignants dans des proportions inquiétantes dans le secteur éducatif privé.

Les enseignants craignent une violation de leurs droits

« Nous ne sommes pas sûrs que ce nouveau contrat à signer d’ici au 1er juillet est dans l’intérêt des enseignants », regrette la présidente du comité d’enseignants du GLFL, Ghada Fahd Rached, elle-même démissionnaire, dans une déclaration à L’Orient-Le Jour. En effet, « les primes d’ancienneté et d’assurance seront remplacées par d’autres versées sur la base d’évaluations professionnelles des enseignants, et seront conditionnées par les bénéfices réalisés par les institutions », précise-t-elle. Privés de leurs treizième et quatorzième mois (certains professeurs bénéficient même de dix-huit mois de salaire), « les enseignants de la MLF voient aujourd’hui leurs salaires alignés sur ceux des professeurs des écoles publiques », ce qui est loin de leur plaire. « Les enseignants des écoles de la MLF se sentaient privilégiés par rapport à tous les autres enseignants du privé et du public. Mais aujourd’hui, ils ont perdu tous leurs avantages », se désole Mme Fahd Rached.

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Les protestataires se sont donc tournés vers le proviseur du GLFL, Brice Lethier, pour lui faire part de leurs appréhensions. Ils ont aussi fait appel à des avocats spécialistes du travail, car ils refusent de signer l’avenant à leur contrat si ce dernier viole leurs droits. « Sur les 260 professeurs du GLFL, 145 ont déjà chargé l’avocate Maya Dgheidi d’engager des pourparlers avec l’administration en leur nom, précise Mme Rached. Et davantage d’enseignants se joignent régulièrement à la liste. »

Outre ces avantages perdus qui les ont longtemps distingués de leurs confrères d’autres écoles privées, les enseignants du GLFL et des autres établissements de la MLF craignent de voir effacées toutes leurs années d’ancienneté. « C’est comme si on leur demandait de signer un nouveau contrat », commente Mme Fahd Rached.

Les enseignants du Grand Lycée franco-libanais de Beyrouth protestent contre les mesures d’austérité qui les toucheront à la rentrée de septembre. Photo DR

Pour la MLF, une mesure de survie

Du côté de la Mission laïque, on présente cette mesure comme « la seule issue possible pour assurer la survie de ces écoles qui scolarisent quelque 8 000 élèves au Liban ». D’autant que « les seules ressources des établissements scolaires sont les frais de scolarité payés par les familles ». « Ces familles ont du mal, en ces temps de crise, explique à ce propos une source informée. Tous les comités de parents d’élèves nous demandent de réduire les écolages. Et lorsque les recettes ne permettent plus de faire fonctionner la structure, la MLF n’a d’autre choix que de prendre des mesures pour réduire les coûts des scolarités, qui passent par la nécessité de réduire les avantages du corps enseignant. »

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Cette source rappelle d’ailleurs qu’en trois ans, les pertes accumulées des écoles de la MLF au Liban se chiffrent à 24 milliards de livres libanaises. Et révèle un nombre record d’élèves non réinscrits pour la rentrée scolaire de septembre dans ses cinq établissements : « À Nabatiyé, 250 élèves ; à Nahr Ibrahim, 300 environ ; à Verdun, 700 élèves ; à Tripoli, 300 ; et au GLFL, entre 200 et 300 », affirme-t-elle, précisant que « les chiffres sont susceptibles d’évoluer si le gouvernement français décidait d’accorder une aide à l’institution ». Pour l’instant donc, la MLF a « atteint ses limites » et craint que « l’année à venir soit pire encore ». La priorité est aujourd’hui « que les élèves restent scolarisés et que les professeurs gardent leur emploi ». D’où cette décision de « remplacer le complément de salaire automatique par un nouveau dispositif basé sur l’évaluation des enseignants », avec « des primes proportionnelles aux recettes ». « Nous espérons que les enseignants s’adapteront », souligne la source, assurant au passage que « les dispositions de la loi 46 sur l’échelle des salaires sont respectées », et qu’il n’est « pas question de faire signer un nouveau contrat aux professeurs, mais un avenant qui vient modifier le contrat précédent, dans le respect de la continuité ».

Une centaine de professeurs du Grand Lycée franco-libanais de Beyrouth (GLFL) ont observé un sit-in hier, dans l’enceinte de l’établissement scolaire d’Achrafieh, pour protester contre des mesures d’austérité qui les toucheront à la rentrée prochaine, et qui réduiront les droits acquis des enseignants libanais. Par droits acquis, ils entendent les avantages financiers dont ils...

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Chacun doit faire un effort. Encore heureux qu’ils encaissent un salaire dans un pays où le taux de chômage atteint 50%

Lecteur excédé par la censure

09 h 30, le 30 juin 2020

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Commentaires (1)

  • Chacun doit faire un effort. Encore heureux qu’ils encaissent un salaire dans un pays où le taux de chômage atteint 50%

    Lecteur excédé par la censure

    09 h 30, le 30 juin 2020

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