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Politique - Éclairage

Face à Bassil, Chamel Roukoz passe à la vitesse supérieure

Le député du Kesrouan ne cache plus ses ambitions politiques et multiplie les attaques contre son rival, au risque d’égratigner Baabda.

Face à Bassil, Chamel Roukoz passe à la vitesse supérieure

Gebran Bassil et Chamel Roukoz. Combo Marc Fayad et Hassan Assal/Photos d’archives

Depuis plusieurs semaines, Chamel Roukoz, député du Kesrouan et gendre du président de la République Michel Aoun, dont il semble s’éloigner de plus en plus, multiplie les apparitions publiques et poursuit son matraquage contre la politique du sexennat et le système en place. S’étant identifié dès le début au mouvement de contestation du 17 octobre, cet ancien officier de l’armée, qui a annoncé son divorce de manière irrémédiable avec le groupe parlementaire du Liban fort (aouniste), qui lui avait servi de plateforme électorale durant les dernières législatives sans qu’il ne bénéficie pour autant des voix aounistes, avance ses pions lentement et méthodiquement.

Bien qu’il soit dans une situation inconfortable du fait de son alliance avec l’une des filles du président, Claudine, Chamel Roukoz ne cache plus désormais ses ambitions politiques. Se posant comme une alternative à l’actuel homme fort du aounisme et chef du Courant patriotique libre Gebran Bassil, qui se trouve être un autre gendre du chef de l’État, et qui est en perte de popularité depuis un certain temps, l’ancien militaire ne mâche plus ses mots et lance de virulentes attaques contre lui sans plus ménager le président qu’il avait quelque peu épargné auparavant.

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Contraint en définitive de trancher et de choisir son camp s’il veut espérer écarter son rival – qui reste à ce jour le favori de Baabda –, le député du Kesrouan a décidé de couper définitivement le cordon ombilical. Mais il évite toujours de critiquer la personne du président de manière directe. Ainsi, lors de ses dernières apparitions médiatiques, il a préféré s’en prendre au « sexennat » et à ses parrains, à leur tête le chef du CPL.

Face à ces attaques frontales et répétées, M. Bassil s’est retenu à ce jour de riposter directement dans le cadre de cette guerre familiale pour la course au pouvoir, laissant vraisemblablement la charge à sa base qui, par réseaux sociaux interposés, contre-attaque en rangs plus ou moins serrés.

Dans une conversation devant ses partisans qui a fuité sur la Toile la semaine dernière, le général Roukoz promettait une « chute prochaine du système » dont il dénonce les déviations, telles que clientélisme et le communautarisme exacerbé. Par ces propos, il justifiait devant ses partisans sa décision de ne pas prendre part aux rassemblements de samedi dernier, « par peur du chaos et d’éventuels accrochages », disait-il. L’ancien officier s’engageait également à organiser un grand rassemblement populaire de contestation « qui serait mieux contrôlé ». Autant de messages perçus par la base aouniste comme une attaque directe contre le mandat de Michel Aoun et, par ricochet, contre Gebran Bassil.

« Je persiste et signe »

Le député, qui a repris à son compte depuis plusieurs semaines les principes du changement et de la réforme, un slogan-clé sur lequel le CPL a édifié sa propagande politique, a été accusé de « trahison » par des ténors du courant aouniste qui lui reprochent d’adopter une attitude « ôte-toi-de-là-que-je-m’y-mette ». « Le CPL n’avalise pas les propos insultants exprimés sur la Toile et qui viennent principalement des militants de base aounistes », commente pour L’Orient-Le Jour Eddy Maalouf, député du bloc du Liban fort qui évoque des dérapages malheureux. « Il faut juste comprendre que la base aouniste est très contrariée par le retrait de M. Roukoz du bloc », dit-il.

Ce dernier n’a pas tardé à réagir aux attaques. Dans un discours fiévreux tenu vendredi soir devant ses partisans rassemblés à Sahel Alma, il s’est demandé si les reproches qui lui étaient adressés ne s’appliquaient pas plutôt à leurs auteurs, une allusion on ne peut plus claire à M. Bassil.

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« Je n’ai pas honte de ce que j’ai dit. Je souhaite effectivement que le système s’effondre. Je persiste et signe : l’engrenage de la distribution des quotes-parts politiques, du clientélisme et de l’incompétence doit être freiné », a lancé l’ancien officier. S’adressant à ses détracteurs parmi les aounistes, il ajoute : « N’est-ce pas vous qui disiez refuser le diktat du fait accompli et préconisiez le changement et la réforme ? Que s’est-il donc passé ? Vous ne voulez plus du changement ? » Et de retourner alors l’opportunité en sa faveur en annonçant, point par point, ce qui a semblé être un véritable programme électoral vraisemblablement destiné, selon un observateur politique qui a requis l’anonymat, à « briguer le siège de la présidence de la République une fois qu’il sera vacant ».

Reprenant à son compte une série de revendications populaires, comme l’indépendance de la justice, la lutte contre la corruption, l’abolition du confessionnalisme politique et l’édification d’un État de droit, le député a également présenté un échantillon de sa vision sociale et économique de l’avenir en évoquant des secteurs vitaux comme l’enseignement public, l’agriculture, l’environnement, l’électricité, autant de domaines à réformer.

Dans les milieux proches de l’ancien officier, on insiste pour dire que ses ambitions politiques « sont légitimes ». « Tout d’abord, il cherche à consolider sa base populaire au Kesrouan en prévision des prochaines législatives et, pourquoi pas, briguer à long terme la présidence, si le pays parvient à survivre à cette crise », commente pour L’Orient-Le Jour le général Sami Rammah, un compagnon d’armes de M. Roukoz. « Gebran Bassil est-il mieux placé pour cette position ? » s’interroge-t-il. Une ambition qu’Eddy Maalouf trouve tout à fait « justifiée ». « C’est son droit que d’aspirer au poste politique qu’il souhaite », dit-il.

La 1559, partie remise

Si la cible préférée de M. Roukoz reste, sans le moindre doute, le chef du CPL, il ne ménage cependant pas le reste de la classe politique et endosse le slogan de la reddition des comptes sur les trois dernières décennies, scandé depuis le déclenchement de la révolte du 17 octobre. Dans une tentative de sécuriser le soutien d’une large frange de la population dépitée par la faillite de la classe politique actuelle, il a affirmé dans son discours de vendredi dernier qu’il ne « veut s’allier ni avec les politiques actuels ni avec les entrepreneurs, encore moins avec ceux qui profitent du système ». Eddy Maalouf en est persuadé : selon lui, le compromis politique qui avait été conclu entre le chef de l’État et l’ancien Premier ministre Saad Hariri en amont de l’élection de Michel Aoun à la présidence serait « la raison principale » qui aurait incité Chamel Roukoz à claquer la porte.

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Dans son discours de vendredi, l’ancien officier a consacré à la « résistance contre l’occupant » une phrase orpheline, estimant que la résistance fait partie des « constantes historiques ». « Par cette position, il semble vouloir épargner le Hezbollah », commente l’observateur politique cité plus haut. Il y a un an, M. Roukoz avait déjà exprimé son avis sur la question de la résistance, en évoquant, lors d’un entretien accordé à la NTV, « un partage des rôles entre l’armée chargée de la sécurité, de la stabilité intérieure et la lutte contre le terrorisme, et le Hezbollah », laissant entendre que c’est ce dernier qui assure pour l’heure l’équilibre stratégique avec Israël.

« Nous sommes en faveur de l’application de la résolution 1559 du Conseil de sécurité », qui prévoit le désarmement des milices. « Sauf que nous estimons que le moment n’est pas encore propice, encore moins le contexte régional. Cette question ne peut être abordée que par le biais d’un débat sur la stratégie de défense nationale auquel devrait également prendre part la société civile », indique le général Rammah. Et de faire remarquer qu’il est absolument « irréaliste » de croire que les électeurs chrétiens du Kesrouan, que M. Roukoz cherche à gagner dès à présent, pourraient accepter rien de moins que le désarmement du Hezbollah.

Depuis plusieurs semaines, Chamel Roukoz, député du Kesrouan et gendre du président de la République Michel Aoun, dont il semble s’éloigner de plus en plus, multiplie les apparitions publiques et poursuit son matraquage contre la politique du sexennat et le système en place. S’étant identifié dès le début au mouvement de contestation du 17 octobre, cet ancien officier de l’armée,...

commentaires (15)

Les 2 gendres ont bien compris l'astuce pour vivre longtemps et content ..... devenir président de la République ou du Parlement! Ils peuvent alors vivre longtemps, les gens crient haut leurs noms malgré tout le désarroi qu'ils nous lancent dedans, ils font à leurs guides et personne ne peut les corriger...!!! Haram ya Lébnèn...

Wlek Sanferlou

23 h 08, le 09 juin 2020

Tous les commentaires

Commentaires (15)

  • Les 2 gendres ont bien compris l'astuce pour vivre longtemps et content ..... devenir président de la République ou du Parlement! Ils peuvent alors vivre longtemps, les gens crient haut leurs noms malgré tout le désarroi qu'ils nous lancent dedans, ils font à leurs guides et personne ne peut les corriger...!!! Haram ya Lébnèn...

    Wlek Sanferlou

    23 h 08, le 09 juin 2020

  • Je pensait que Mr. Roukoz avait des principes et s’était retiré du groupe CPL au parlement justement pour éviter un amalgame qui ne lui serait pas favorable et allant a l'encontre de ses convictions. Malheureusement après de telles déclarations malencontreuses je me permet de remettre en doute sa capacité a gérer le pays pour avoir simplement accepté l’idée que le rôle de l’armée se limite a celui d'une police alors que le Hezbollah continue a avoir la main haute dans les décisions stratégiques de l’état. Je ne pense pas que cela soit la philosophie d'une armée nationale. De plus, il était de ceux qui voulait participer aux manifestations du 6 Juin et a la dernière minute il s'en est retiré car il n'est pas d'accord avec le slogan contre les armes du Hezbollah. En bref il a fuit devant sa responsabilité en tant qu'ex responsable militaire comme son beau père en 1990. Décidément cela devient une tradition familiale! General Rammah a raison, qu'il ne rêve pas avoir le consentement Chrétien sans démembrement de la milice Hezbollahi. Il n'aura même pas son siège parlementaire s'il continue dans cette voie! L’expérience de Bassil aurai du lui servir d'exemple. Il n'y est arrivé que lorsqu'on a traficoté les urnes en sa faveur. Est-ce ce que Chamel Roukoz cherche? J'en doute!

    Pierre Hadjigeorgiou

    13 h 44, le 09 juin 2020

  • INTELLIGENT NOTRE PRESIDENT OFFICIEL ( pas celui qui tient la barre en sous main ) IL A COMPRIS QU'UN PREMIER GENDRE EST BRULE PARTOUT LOCALEMENT ET INTERNATIONALEMENT , IL DONNE DE LA VOIX A L'AUTRE GENDRE ( meme en l'autorisant a le critique un peu pour faire vrai ) PERSONNE N'A DONC COMPRIS QUE LE PEUPLE NE VEUT PLUS DE CETTE CLASSE POLITIQUE DE PERE EN FILS EN PETIT FILS, DE GENDRE A GENDRE DE FRERE A FRERE, ETC... LE PEUPLE RECLAME DES REFORMES TELLEMENT EVIDENTE QUI SONT APPLIQUEES DANS TOUT LE MONDE CIVILISE: UNE JUSTICE INDEPENDANTE, NON NOMME PAR LES POLITICIENS, UNE CLAIRETE DANS LES ADJUDICATIONS ET UN CONTROLE DES EXECUTIONS DE CES CONTRATS TRANSPARENTS ( pas avec une clause de secret absolu par tous les signataires qui veut dire corruption, qu'on le veuille ou non ), UN NIVEAU DE RETRAITE SUFFISNAT POUR ASSURER SES VIEUX JOURS, UNE HOSPITALISATION GRATUITE OU TRES RAISONNABLE, L'ARRET DE LA CONTREBANDE PAR LES PASSAGES LEGAUX ET ILLEGSUX DE DU PAYS ETC... EST CE TELLEMENT DIFFICILE A COMPRENDRE???? MR DIAB OU VOUS POUVEZ LE FAIRE OU DEMISSIONNEZ POUR LAISSER LA PLACE A CEUX QUI PEUVENT LE FAIRE SANS DIRE ON M'A EMPECHE, CAR COMME TOUT LE MONDE LE VOIT VOUS ALLEZ DIRE LA MEME CHOSE LORS DE VOTRE DEPART

    LA VERITE

    13 h 31, le 09 juin 2020

  • Serait il l’homme de la situation pour sauver le pays? Reste à clarifier sa position vis à vis des ennemis du pays. Nous lui souhaitons longue vie et beaucoup de courage pour arriver à son but clairement détaillé qui est le même que celui de la majorité des libanais et qui consiste à débarrasser le pays de tous les vendus et à récupérer les rênes de la patrie enchaînée. J’espère qu’il ne s’acoquinera avec aucun des alliés siro-iraniens comme son précédent pour accéder au fauteuil mais sur l’appui des libanais pour seuls alliés pour le propulser vers la victoire.

    Sissi zayyat

    11 h 39, le 09 juin 2020

  • Chamel Roukoz president ? Pourquoi pas ,c'est un homme de principes au moins mais a condition qu'on puisse survivre le 'mandat fort' et sa reublique bananiere .

    EL KHALIL ABDALLAH

    11 h 31, le 09 juin 2020

  • Il est vrail que du point de vue comportement personnel...il inspire plus de respect et de confiance que son beau-frère par alliance...Ne reste plus qu'à espérer que son ramage soit aussi brillant que son plumage...! Irène Saïd

    Irene Said

    10 h 05, le 09 juin 2020

  • Quelques défauts (gendre de l’autre, ex général et position sur la milice), quelques qualités également (intégrité et capable de féderer l’armée et le peuple), il faut lui donner sa chance. De toute façon, tous les politiciens actuels , même si certains d’entre eux sont plus intégres que d’autres sont totalement discrédités.

    Bachir Karim

    09 h 59, le 09 juin 2020

  • Est ce la version libanaise de la guerre Assad Makhlouf?

    HABIBI FRANCAIS

    09 h 22, le 09 juin 2020

  • Mr Roukoz tout cela est bien beau sauf votre positionement sur la milice, j'espere que cela est juste tactique. Votre beau pere tenait aussi le meme discours il y n'a pas longtemps disant vouloir les integrer dans la cellule de l'etat. On a vu le resultat; pour devenir president c'est lui qui s'est integre dans leur structure milicienne. Ceci est la stricte verite ..assez de couverture aux armes illegales.

    Liban Libre

    08 h 51, le 09 juin 2020

  • CQFD Gendre ET General

    Salhani Alain

    08 h 02, le 09 juin 2020

  • Ça doit pas trop rigoler leurs déjeuners de famille du dimanche...

    Gros Gnon

    06 h 46, le 09 juin 2020

  • Si le Président pense que Bassil a perdu et que la base populaire du CPL le lâche, Roukoz serait une nécessité pour récupérer les Aounistes désillusionnés. Mais il est trop tôt d'assurer que Roukoz fonctionne en solo. Il reprend les slogans du Général Aoun qui aussi besoin d'instaurer un nouveau leadership pour le remplacer au Keserwan. En tous les cas, Bassil is-off-the-chart.

    Zovighian Michel

    05 h 55, le 09 juin 2020

  • Aurons-nous encore une fois un président maronite (ou même chrétien) au Liban ? Qui analyse la situation ne pourrait logiquement pas en être sûr et certain . L'affaire est hasardeuse par les temps qui courent . La révolution pourrait tout chambarder de fond en comble . La guerre civile larvée aussi ! Toutes ces querelles résonnent comme étant absurdes et mal conçues. Un peu de décence donc , et de réserve dans le discours ! S'il vous plaît !

    Chucri Abboud

    02 h 35, le 09 juin 2020

  • Petit à petit l’oiseau fait son nid. Ceci dit, vu la conjoncture actuelle Vu que le pays a besoin d’un président DYNAMIQUE qui devra voyager dans les 4 coins du liban.... les libanais ont besoin de sentir que « ces » dirigeants ne sont pas sur des sièges en or... là-haut... intouchables et loin du peuple.. OR comme il ne peut pas bouger agilement ( Âge notamment).. Arrivera un moment où la démission sera une option obligée. Les gendres le savent bien... D’où la course en cours.

    LE FRANCOPHONE

    01 h 49, le 09 juin 2020

  • DE GENDRE A GENDRE JE NE SAIS PAS. MAIS IL ME PARAIT FRANC ET SERIEUX.

    LA LIBRE EXPRESSION

    00 h 49, le 09 juin 2020

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