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Politique - Législation

Le LCPS accuse le Parlement d’« étouffer les réformes »

Le Centre d’études pour les politiques publiques évalue la portée et l’efficacité des lois adoptées au cours des deux dernières séances.

La dernière réunion parlementaire s’est tenue au palais de l’Unesco. Photo tirée du compte Flickr du Parlement

Alors que le Liban ploie sous une crise économique et financière provoquée en grande partie par une corruption rampante et une mauvaise gouvernance, les réformes attendues pour stopper l’effondrement et remédier aux multiples dysfonctionnements avancent à pas de tortue, notamment du fait des blocages orchestrés par les parrains politiques du cabinet. Le Parlement, qui a récemment tenu deux séances législatives, semble à ce jour tout aussi récalcitrant à consentir à l’adoption de certains textes susceptibles de lancer la lutte contre la corruption et d’assainir la gestion du secteur public.

Sur les quinze propositions de loi examinées par le Parlement pour remédier à la détérioration de la crise financière, seuls six textes placés sous le label de la réforme ont été adoptés. Certains après avoir été vidés de leur substance en cours de route. Tel est le constat que dresse le Centre d’études pour les politiques publiques (Lebanese Center for Policy Studies-LCPS ) dans une étude intitulée « Le Parlement étouffe les réformes ».

Publiée jeudi dans le cadre d’un projet intitulé « The Government Monitor » (La surveillance de l’action du gouvernement ») destiné à suivre, sur trois ans, la productivité de l’exécutif et son aptitude à prendre les décisions adéquates, cette dernière étude braque néanmoins la lumière sur les atermoiements des députés en matière de réformes et leur maigre productivité. Paralysé pendant cinq semaines du fait de la pandémie de coronavirus, le Parlement a relancé ses activités le 20 avril dernier, avec une productivité critiquable. Sur un total de 103 propositions de loi touchant à divers secteurs (justice, santé, gouvernance, banques), « seules 15 d’entre elles (17 %) comportaient un élément de réforme, sachant que six textes en tout ont été finalement adoptés », note l’étude. Vingt-cinq autres propositions votées concernent des procédures administratives routinières, sachant que les 62 autres textes ont été enfouis dans les tiroirs.

« Les deux séances législatives ont été enrayées par les discordes politiques et l’absence de consensus. Un indicateur clair sur la résistance à la réforme dont ont fait preuve les différents groupes politiques représentés à l’hémicycle », souligne le LCPS.

Quelles sont les six propositions adoptées et comment évaluer leur valeur ajoutée en termes de réformes ? La loi sur la commission pour la lutte contre la corruption définit l’acte de corruption, comme l’octroi de pots-de-vin, et énumère les compétences requises chez les membres appelés à intégrer la commission. « Bien que cette loi constitue un pas important pour traduire en justice les malversations commises durant l’exercice d’une fonction publique, il faut rappeler que cette mesure remonte à 2018, date à laquelle le plan de réforme CEDRE avait été mis en place », commente le LCPS.

Les intouchables

Le deuxième texte voté consiste en un amendement de la loi sur les fonctionnaires, selon lequel l’administration publique est astreinte à répondre, dans un délai de quinze jours, aux requêtes qui lui sont soumises par le parquet souhaitant traduire en justice des fonctionnaires. Si l’administration ne réagit pas dans le délai fixé, les poursuites sont automatiquement engagées. Cette loi comporte toutefois des lacunes, sachant que l’amendement introduit ne s’applique pas aux personnalités publiques haut placées qui restent protégées par l’immunité constitutionnelle dont elles jouissent. Cela réduit notoirement les effets de cette loi, regrette en substance le LCPS.

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Le troisième texte adopté se rapporte au principe du secret bancaire. Le texte a toutefois été adopté après avoir été amendé de sorte à diluer sa portée et son efficacité. Le Parlement a fini par introduire, le 28 mai dernier, « un amendement qui place cette prérogative aux seules mains de la commission spéciale d’investigation (SIC), relevant de la Banque centrale, et de la commission nationale pour la lutte contre la corruption ». Le texte final, qui ne permet ainsi pas à la justice d’activer directement la levée du secret bancaire, ne sert donc plus à rien, car la SIC possède déjà la prérogative de lever le secret bancaire et la commission nationale pour la lutte contre la corruption n’existe pas encore – même si la loi qui l’institue prévoit qu’elle le soit dans un délai de trois mois.

Nominations

La quatrième loi adoptée porte sur le mécanisme des nominations, un processus qui fait depuis des années l’objet de marchandages et de tiraillements sur fond de distributions des quotes-parts politiques et communautaires. La nouvelle loi votée a l’avantage de permettre la promotion de la transparence et la compétence dans la procédure des nominations aux postes élevés de l’administration.

En outre la légalisation de la culture du cannabis à des fins thérapeutiques, dont « les estimations de rendements financiers sont excessivement optimistes », ne permettra pas aux cultivateurs, les premiers concernés, de pouvoir bénéficier de profits notoires.

Le Parlement a enfin adopté la loi sur les lanceurs d’alerte sur les affaires de corruption, qui se trouvent désormais légalement protégés, ce qui n’était pas le cas dans la mouture précédemment adoptée.

Qu’en est-il des autres propositions de loi rejetées par les parlementaires ? Promise depuis des années principalement par les partis politiques soucieux de satisfaire leur base électorale respective, le tandem chiite (Hezbollah-Amal) et le courant du Futur principalement, la proposition de loi sur l’amnistie a fini par être refoulée. Contestant l’étendue de son application, les partis chrétiens principalement ont mis en garde notamment contre les coûts sociaux que pourrait engendrer une telle loi qui risque par ailleurs de consacrer le principe de l’impunité.

Autre texte sensible et fondamental dans le cadre de la lutte contre la corruption, la loi sur l’enrichissement illégal a également été rejetée dans sa nouvelle mouture. L’amendement introduit à cette loi déjà existante devait faciliter les poursuites en cas de malversation et de détournement de fonds dans le secteur public, rappelle le LCPS.

A été également rejetée la loi sur la levée de l’immunité des ministres, une mesure qui nécessite un amendement de la Constitution. Idem pour la loi sur la levée de l’immunité du président de la République et du Premier ministre, qui a connu le même sort, ainsi que le texte visant à raccourcir le mandat du Parlement afin de tenir des élections anticipées.

Alors que le Liban ploie sous une crise économique et financière provoquée en grande partie par une corruption rampante et une mauvaise gouvernance, les réformes attendues pour stopper l’effondrement et remédier aux multiples dysfonctionnements avancent à pas de tortue, notamment du fait des blocages orchestrés par les parrains politiques du cabinet. Le Parlement, qui a récemment tenu...

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DANS LA CAVERNE ALIBABIQUE LE SEUL SOUCI EST DE COMMENT SE REMPLIR LES POCHES.

LA LIBRE EXPRESSION

11 h 00, le 06 juin 2020

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Commentaires (2)

  • DANS LA CAVERNE ALIBABIQUE LE SEUL SOUCI EST DE COMMENT SE REMPLIR LES POCHES.

    LA LIBRE EXPRESSION

    11 h 00, le 06 juin 2020

  • Raison pour laquelle il faut participer à la manifestation aujourd'hui !

    Abdallah TAMBEY

    08 h 30, le 06 juin 2020

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