Bien au-delà de ses réponses mesurées aux attaques lancées contre sa formation pendant la semaine écoulée, notamment de la part du chef des Marada Sleiman Frangié, le leader du Courant patriotique libre, Gebran Bassil, s’est une nouvelle fois posé en champion de la lutte contre la corruption et a tracé les grandes lignes de son action dans la prochaine phase, sans pour autant définir de nouvelles alliances.
Au cours d’une allocution télévisée hier, M. Bassil a évidemment répondu aux attaques du leader des Marada sur la polémique autour du fuel défectueux qui secoue le pays depuis plusieurs semaines. Ce dernier avait dénoncé les poursuites à l’encontre de l’un de ses proches, Sarkis Hleiss, directeur des installations pétrolières au sein du ministère de l’Énergie, dénonçant « une justice politisée ». Sur ce plan, Gebran Bassil s’est voulu très clair. Se posant en champion de la lutte contre la corruption, il a assuré : « Nous ne couvrons pas les corrompus. Mais nous ne laisserons pas l’injustice porter atteinte à la dignité des gens et des innocents et nous n’hésitons pas à défendre ces personnes-là. » « Qu’on n’essaie pas de faire pression sur nous », a-t-il prévenu. « La justice n’accepte pas la logique du compromis », a-t-il encore dit, démentant que la procureure générale du Mont-Liban Ghada Aoun soit « la juge du palais de Baabda ». Encore une pique en direction de Bnechii dont le leader, candidat potentiel à la présidence comme M. Bassil, s’en était pris à Ghada Aoun, l’accusant d’être « politisée à fond » et proche du binôme Baabda-CPL. « Nous poursuivrons cette bataille jusqu’au bout », a encore assuré Gebran Bassil à l’adresse de M. Frangié, qui avait déclaré il y a une semaine la guerre contre le tandem Baabda-CPL, critiquant par la même occasion et pour la toute première fois le chef de l’État, Michel Aoun.
Réagissant à ces critiques, l’ancien ministre de l’Énergie a affirmé : « Au Liban, le président de la République ne peut pas être destitué, sauf s’il désire démissionner. Et cela n’est certainement pas le cas du général Aoun. » Et de poursuivre : « La crise actuelle ne provoquera pas l’effondrement du CPL, mais une opportunité de rectifier le tir en corrigeant les erreurs commises pendant plus de trente ans. » Une flèche décochée en direction du camp Hariri, arrivé au pouvoir en 1992, et à qui Gebran Bassil a imputé la responsabilité de la crise actuelle, surtout pour ce qui est de l’endettement du Liban et du déficit budgétaire. Aux protagonistes qui « attaquent le CPL et lui envoient des émissaires loin des feux de la rampe », M. Bassil a adressé ce message : « Vous nous attaquez quand vous sentez que vos intérêts sont menacés. Notre problème avec vous n’est pas personnel, mais réside dans la politique que vous avez adoptée, qui a mené à l’effondrement du pays. »
Le leader du CPL s’est aussitôt attiré les foudres de plusieurs députés haririens. Sur Twitter, ces parlementaires s’en sont pris à l’ancien ministre, l’accusant de « mentir » et de « se laver les mains » du dossier de l’électricité, bien qu’il ait occupé le poste de ministre de l’Énergie à plusieurs reprises entre 2009 et 2014. De même, les Forces libanaises ont dénoncé les propos de M. Bassil selon qui « le dossier de l’électricité n’est pas la cause principale du déficit budgétaire ». Un responsable FL rappelle ainsi que « les pertes subies par ce secteur sont supérieures à 25 milliards de dollars » et que le ministère est détenu depuis plus de 15 ans par le CPL.
Appel à Raï
En dépit de ces attaques contre Saad Hariri et Sleiman Frangié, Gebran Bassil s’est présenté comme celui qui veut « présenter les solutions aux crises actuelles », pour reprendre les termes d’un proche du chef du CPL contacté par L’Orient-Le Jour. L’ex-chef de la diplomatie s’est donc dit « prêt à toute entente qui serait à même de consolider le processus de sauvetage »... à une condition près : toute entente de ce genre ne devrait pas « porter atteinte aux principes du CPL ». M. Bassil a appelé par ailleurs à la mise en place d’une « décentralisation administrative et financière élargie ». Il a en outre invité le patriarche maronite, Mgr Béchara Raï, à « rassembler les leaders chrétiens afin de fédérer leurs efforts pour lutter contre la crise économique dans le cadre d’une initiative menée par l’Église ». Cela concerne évidemment Sleiman Frangié, dans la mesure où tout le monde devrait prendre part au processus de relance, assure un proche de M. Bassil, expliquant que l’heure n’est pas aux querelles liées à la politique politicienne, mais à la mise en place de solutions à même de redresser le pays. C’est dans ce cadre que s’inscrit « son appel à adopter la décentralisation administrative, comme le veut l’accord de Taëf, sachant que le problème réside dans le système en vigueur qui devrait être modifié dans le sens de l’édification d’un État civil », dit-il.
En attendant, Gebran Bassil semble déterminé à poursuivre la fameuse lutte « pour le recouvrement des droits des chrétiens ». C’est ainsi qu’il a commenté la polémique au sujet du remplacement du mohafez de Beyrouth opposant le Premier ministre Hassane Diab au métropolite grec-orthodoxe Mgr Élias Audi. « Nous ne permettons qu’aucune communauté se sente marginalisée, notamment les grecs-orthodoxes », a-t-il lancé, rappelant que le chef de l’État a mis la main sur le dossier à l’issue de sa rencontre avec Mgr Audi, lundi dernier.
Parallèlement, le leader du courant aouniste s’est dit ouvert à une amélioration des rapports de son parti avec toute partie extérieure, si cela pouvait contribuer au redressement du pays, « sans porter atteinte à la souveraineté nationale », a-t-il prévenu.
Par ailleurs, Gebran Bassil a défendu une démarche de normalisation avec le régime syrien, dans le sillage des conseils du secrétaire général du Hezbollah Hassan Nasrallah qui avait lancé un appel en ce sens mercredi. « Il ne s’agit pas de messages politiques adressés à qui que ce soit, d’autant que le pays est dans une phase de reconstruction totale. Et nous n’évoquons pas la question des nouvelles alliances », souligne enfin ce proche de Gebran Bassil, commentant le clin d’œil de ce dernier en direction du président de la Chambre Nabih Berry et du chef du Parti socialiste progressiste Walid Joumblatt, par sa référence à l’accord de paix libano-israélien conclu le 17 mai 1983, puis tombé à l’eau moins d’un an après sa signature, sous l’effet de la pression populaire et de celle de partis comme le PSP et le mouvement Amal.
commentaires (23)
Cheikh Sélim el-Khoury, dit le Sultan Sélim, , frère du président de la République Cheikh Béchara el-Khoury fut la cause de la démission de son frère le président El-Khoury le 18 septembre 1952 et ce, à cause de ses incalculables corruptions et malversations.
Un Libanais
17 h 39, le 19 mai 2020