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Politique - Partis

Hariri de retour pour tenter de rassembler l’opposition

Le Futur, le Parti socialiste progressiste et les Forces libanaises devraient joindre leurs forces, mais une opposition issue de la classe politique traditionnelle est-elle crédible après le soulèvement populaire du 17 octobre?

M. Hariri à son arrivée à l’Aéroport international de Beyrouth vendredi. L’ancien Premier ministre a été testé négatif au coronavirus. Photo tirée du site Mustaqbal Web

Rentré vendredi soir de Paris où il se trouvait depuis le début de la pandémie de coronavirus, l’ancien Premier ministre et chef du courant du Futur Saad Hariri semble déterminé à intensifier son opposition au gouvernement Diab et à œuvrer en faveur de la constitution d’un front commun avec plusieurs forces politiques, notamment le Parti socialiste progressiste (PSP) et les Forces libanaises (FL). Mais une opposition composée des partis traditionnels, s’ils parviennent à surmonter leurs différences, sera-t-elle efficace et surtout crédible alors que la classe politique traditionnelle, au pouvoir ou non, semble avoir perdu la confiance de nombreux Libanais ?

M. Hariri, qui selon des sources du courant du Futur devrait rester confiné pendant quatorze jours, bien qu’il ait été testé négatif à son arrivée par avion privé à Beyrouth, est immédiatement entré en contact avec le chef du PSP Walid Joumblatt. Une source du Futur souligne à L’Orient-Le Jour qu’il y a une « coordination totale » entre les deux hommes, qui ont récemment intensifié leurs attaques contre le gouvernement de Hassane Diab.

Pour cette source, la « période de grâce » accordée par Saad Hariri au gouvernement Diab est désormais terminée, d’autant que ce cabinet n’a pas été capable de mener une politique cohérente à même de sortir le pays de la crise. M. Hariri, qui s’était abstenu dans un premier temps de critiquer violemment le gouvernement Diab, est monté au créneau après la publication du projet de réformes économiques du cabinet, l’accusant de vouloir établir « un plan de suicide économique basé sur la confiscation de l’argent des Libanais déposé dans les banques ».

Pour sa part, le leader druze Walid Joumblatt, qui avait lui aussi indiqué dans un premier temps vouloir donner une chance au gouvernement, a récemment intensifié ses critiques, allant jusqu’à reprocher il y a dix jours à Hassane Diab de vouloir mener un « putsch politico-financier », faisant allusion aux craintes de « haircut » (ponction) sur certains dépôts bancaires.

« Il y a une coordination et une concertation » continue avec le courant du Futur et les autres partis face à la politique du gouvernement, affirme à L’OLJ Rami Rayès, conseiller de M. Joumblatt, qui souligne que la coordination avec le Futur a commencé bien avant la crise du coronavirus et s’était également concrétisée par des réunions entre les cadres des deux partis, au niveau des régions.

Selon des sources politiques, MM. Hariri, Joumblatt et le chef des FL Samir Geagea œuvreraient à resserrer leurs rangs pour tenter de constituer un front unifié qui ferait pression sur le pouvoir.

C’est dans cette perspective qu’il faudrait interpréter la rencontre, vendredi dernier, entre deux émissaires de M. Joumblatt, les députés du bloc joumblattiste Akram Chehayeb et Nehmé Tohmé, et M. Geagea. Selon une source au sein des FL, « la rencontre s’inscrit dans le cadre de la coordination entre les deux parties ». « Chacune d’entre elles a présenté sa lecture des crises sanitaire et financière, de la situation politique et de la prestation du gouvernement, et il y avait une convergence des points de vue », ajoute cette source.

M. Geagea, lui aussi, n’a pas ménagé ses critiques à l’égard du gouvernement, estimant que « tant que le trio sinistre contrôle le pouvoir au Liban, il n’y a aucun espoir de réformes ou de plan de sauvetage véritable », dans une allusion au Courant patriotique libre et au tandem chiite (Hezbollah-Amal).

La source FL indique que les formations de Samir Geagea et Walid Joumblatt ont décidé d’intensifier leur coordination, tout en précisant qu’une redynamisation de l’alliance du 14 mars n’est pas envisagée pour le moment.

Une source proche du PSP explique pour sa part que le leader druze ne veut pas antagoniser le chef du mouvement Amal et président du Parlement, Nabih Berry, ni le leader des Marada, Sleiman Frangié, estimant qu’il vaut mieux garder des alliés à l’intérieur du gouvernement, d’autant que ces deux partis ne ménagent pas leurs critiques à l’égard du Premier ministre.

M. Rayès estime lui aussi que la constitution d’un front uni de l’opposition est encore « prématurée ». D’autant que Saad Hariri et Samir Geagea doivent d’abord normaliser leurs relations, encore éprouvées depuis que les FL s’étaient abstenues de nommer le chef du courant du Futur lors des consultations parlementaires pour le choix d’un Premier ministre en décembre dernier, consécutives à la démission de M. Hariri le 29 octobre, quelques jours après le déclenchement du soulèvement populaire.


(Lire aussi : Et les réformes, ça vient ?, l’édito de Michel TOUMA)


« Ceux qui ont détruit le pays ne pourront pas le reconstruire »

Sur le front interne, Saad Hariri doit également œuvrer à consolider sa base populaire, ébranlée, comme celles de plusieurs partis traditionnels, par le soulèvement populaire. Il doit aussi composer avec un nouvel élément, la volonté de son frère aîné Baha’ Hariri de se faire une place sur la scène politique. Ce dernier « se prépare à l’ouverture de bureaux dans toutes les régions libanaises », affirme à L’OLJ l’avocat Nabil Halabi, qui se présente comme un proche de Baha’ Hariri. Selon l’avocat, ce dernier « soutient les jeunes qui se sont soulevés » contre la classe politique, mais n’a aucunement l’ambition de devenir Premier ministre.

Depuis sa démission, Saad Hariri tente également d’écouter ceux qui, parmi ses partisans, l’avaient critiqué pour avoir fait des concessions dans le cadre du compromis présidentiel qui a permis l’accession de Michel Aoun à la présidence de la République en 2016. Et aussi pour avoir fait preuve de complaisance à l’égard du Hezbollah, en affirmant dès l’ouverture du procès au Tribunal spécial pour le Liban en 2014 qu’il voulait privilégier la stabilité interne du pays, alors que les principaux accusés dans l’assassinat de son père sont des membres présumés de la formation pro-iranienne.

Est-ce dans ce contexte qu’il a tenu à adresser, dès son retour vendredi soir, un message de fermeté en s’en prenant au député Jamil Sayyed, qui selon ses détracteurs a joué un rôle influent dans la formation du gouvernement Diab et serait l’une des éminences grises du cabinet ? Rappelons que M. Sayyed et trois autres anciens responsables des services de renseignements et de sécurité avaient été arrêtés en 2005 dans le cadre de l’enquête sur l’assassinat, avant d’être libérés quatre ans plus tard, faute de preuves, et que le TSL devrait, en principe, prononcer son jugement dans l’affaire de l’assassinat de Rafic Hariri vers la mi-mai.

Dans un communiqué de son bureau de presse publié dès son arrivée, M. Hariri a demandé au représentant légal des victimes auprès du TSL d’informer le tribunal d’un tweet publié par le député prosyrien le 11 avril. Dans ce texte, ce dernier « reconnaît d’une façon détournée avoir reçu la somme de 27 millions de dollars pour l’assassinat » de Rafic Hariri, selon Saad Hariri, qui a demandé la levée de l’immunité parlementaire du député en vue de poursuite « devant la justice compétente ». Une charge à laquelle Jamil Sayyed s’est dépêché de répondre dans un autre tweet, accusant M. Hariri de mentir et affirmant qu’il avait devancé l’ancien Premier ministre en préparant, lui aussi, un dossier au TSL l’accusant d’avoir forgé de faux documents.

Mais tous ces calculs politiques ne prennent pas en compte le séisme politique provoqué par le soulèvement populaire du 17 octobre, qui a montré qu’une grande partie des Libanais ne se reconnaissaient plus dans la classe politique traditionnelle.

Pour Pierre Issa, secrétaire général du Bloc national engagé dans le mouvement populaire, la constitution d’un front d’opposition de la part des partis traditionnels « n’est pas du tout crédible. Il y a un manque de confiance des Libanais à l’égard de la classe politique traditionnelle et une faillite des partis politiques », affirme-t-il à L’OLJ. « Pour nous, les six grands partis communautaires et les petits partis qui gravitent autour d’eux sont finis, souligne-t-il. Il est impossible qu’ils nous sortent de la crise, car ceux qui ont détruit le pays ne pourront pas le reconstruire. »


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Rentré vendredi soir de Paris où il se trouvait depuis le début de la pandémie de coronavirus, l’ancien Premier ministre et chef du courant du Futur Saad Hariri semble déterminé à intensifier son opposition au gouvernement Diab et à œuvrer en faveur de la constitution d’un front commun avec plusieurs forces politiques, notamment le Parti socialiste progressiste (PSP) et les Forces...

commentaires (14)

Ils avaient dit un gouvernement de technocrates ? Et maintenant c'est quoi Amal - Hezbollah, Hezbollah - Amal? Ha ha ha ou pleurer?

Eleni Caridopoulou

18 h 34, le 21 avril 2020

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Commentaires (14)

  • Ils avaient dit un gouvernement de technocrates ? Et maintenant c'est quoi Amal - Hezbollah, Hezbollah - Amal? Ha ha ha ou pleurer?

    Eleni Caridopoulou

    18 h 34, le 21 avril 2020

  • Pour être entendus, il faut d’abord qu’ils restituent les sommes volées et balancer tous leurs partenaires de fortune avec preuve à l’appui, puis on avisera... Tous les assassins et vendus qui tiennent le pouvoir dans notre pays doivent être jugés. C’est notre seul salut. Tant que tous les opposants ménagent la chèvre et le chou ils resteront coupables des crimes contre le pays et son peuple puisque complices. Ce qu’il nous faut c’est une équipe courageuse qui sera capable d’affronter ces bandits qui se sont approprié notre pays et son peuple, mais pour ça il faut qu’ils aient les mains propres et la conscience tranquille ou faute de quoi il faut avouer leurs fautes peut être qu’elles seront à moitié pardonnées.

    Sissi zayyat

    13 h 29, le 21 avril 2020

  • Hariri de retour pour tenter de rassembler l’opposition. Le Futur, le Parti socialiste progressiste et Les Forces libanaises devraient joindre leurs forces. Bravo, bravo, bravo ! Mais Pour Qui ? Pour Quoi ? Pourtant, Mme Tabbara, les caisses de l’Etat sont vides !?!?!? Que vont-ils faire s’ils reviennent au pouvoir ? Il ne reste plus un dollar à prendre, un seul dollar. Pourquoi devraient-ils donc joindre leur force ? Peut-être, insinuez-vous, ont-ils l’intention de faire leur mea culpa, mea culpa, mea maxima culpa avec force ? Ou alors faire une déclaration solennelle au peuple Libanais s’excusant pour le gâchis et la corruption, pour ne pas dire la merde que la précédente force rassemblée avec le duo chiite a épanché à ce pauvre peuple libanais durant les 30 dernières années ? Toute Force de l’avenir s’y tiendrait à l’écart de ce rassemblement de La Chienlit. Vivement, la 3ième République …

    Aref El Yafi

    12 h 19, le 21 avril 2020

  • Hariri ne doit-il pas produire un bilan critique de sa gestion du Liban comme premier ministre et comme introduction à un nouveau projet politique?

    Beauchard Jacques

    12 h 12, le 21 avril 2020

  • C'est du Grand guignolesque ! Allez on reprend l'avion et on va loin loin.....

    Brunet Odile

    11 h 44, le 21 avril 2020

  • ILS,ce Trio infernal qui se veut Opposition, tout comme l'autre trio au pouvoir ne veut pas comprendre que Kelloun yaani Kelloun. ILS, ce Trio ne veut pas comprendre qu'on ne leur fait pas confiance ! pour la simple raison que tous etaient associes d'une facon ou d'une autre a edifier la guillotine qui a coupe le cou de la Nation.

    Gaby SIOUFI

    11 h 38, le 21 avril 2020

  • ILS,ce Trio infernal qui se veut Opposition, tout comme l'autre trio au pouvoir ne veut pas comprendre que Kelloun yaani Kelloun. ILS, ce Trio ne veut pas comprendre qu'on ne leur fait pas confiance ! pour la simple raison que tous etaient associes d'une facon ou d'une autre a edifier la guillotine qui a coupe le cou de la Nation.

    Gaby SIOUFI

    10 h 58, le 21 avril 2020

  • Kellon yaane kellon. Ouste !!!! Dehors ! Circulez.

    Tabet Karim

    09 h 40, le 21 avril 2020

  • Aujourd'hui ce dont on a besoin c'est d'un projet, d'un programme, des solutions. Écrire ce programme, l'expliquer, l'argumenter c'est ce qu'a besoin le peuple Libanais..... À vos idées d'abord messieurs.... Réunissez vous autour d'un programme commun, se réunir contre quelqu'un ne sert à rien, se réunir autour d'un projet c'est mieux, surtout que le gouvernement en place, lui il en a un, laissons lui au moins le temps d'étudier toutes ses dimensions !

    SABBAGH IMAD

    09 h 36, le 21 avril 2020

  • LES CLOCHES SONNENT DE TOUS COTES MAIS CHACUNE SON REFRAIN. POINT D,UNITE.

    LA LIBRE EXPRESSION

    09 h 32, le 21 avril 2020

  • Une opposition comme cela existe dans tous les pays réellement démocratiques, on veut bien ! Mais l'opposition que tentent de former ces éternels incapables devrait uniquement servir à empêcher les réformes qui sonneraient le glas de leur pillage des ressources du pays. Donc, une opposition qui n'agirait pas pour le bien de tout le pays et de son peuple, mais uniquement pour préserver leurs intérêts et avantages personnels ! Et on doute fort qu'un vrai patriotisme anime brusquement ces personnages !!! Irène Saïd

    Irene Said

    08 h 42, le 21 avril 2020

  • Une opposition comme cela existe dans tous les pays réellement démocratiques, on veut bien ! Mais l'opposition que tentent de former ces éternels incapables devrait uniquement servir à empêcher les réformes qui sonneraient le glas de leur pillage des ressources du pays. Donc, une opposition qui n'agirait pas pour le bien de tout le pays et de son peuple, mais uniquement pour préserver leurs intérêts et avantages personnels ! Et on doute fort qu'un vrai patriotisme anime brusquement ces personnages !!! Irène Saïd

    Irene Said

    07 h 41, le 21 avril 2020

  • Mr. Hariri a toujours exhibé un cran de retard dans sa lecture d'une situation. Ses premières réactions ont systématiquement étaient de bouder ses partenaires et ensuite de pardonner à ses adversaires "pour le bien du pays". Il ne se ressaisit qu'après avoir perdu du terrain. Il est responsable de son propre affaiblissement, de celui du 14 mars, d'avoir joué les cartes du 8 mars, et finalement d'avoir affaibli la Révolte quand il a dit a ses constituants de ne plus se joindre aux rassemblements. À t'il une nouvelle vision à nous offrir ou il veut juste être "calife à la place du calife"?

    Zovighian Michel

    06 h 23, le 21 avril 2020

  • Comment peut-on encore faire confiance à cette clique de politiciens corrompus, toutes tendances confondues, qui gouvernent ce pays depuis plus de 40 ans et qui l'ont pillé et mené à la ruine et à la faillite déclarée, et qui viennent maintenant se poser en sauveurs, s'étant reconstruit une virginité? Qui peut encore les croire? Une nouvelle génération d'hommes propres et compétents devrait prendre le pouvoir. C'est la seule planche de salut à espérer.

    Georges Airut

    02 h 24, le 21 avril 2020

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