Rechercher
Rechercher

Moyen-Orient - Éclairage

Le FMI répondra-t-il à l’appel de Téhéran pour contrer le coronavirus ?

La question principale reste de savoir quelle position adopteront les États-Unis au sein de l’institution.

Des Iraniens font la queue pour recevoir des kits de protection contre le coronavirus, à Téhéran. Stringer/AFP

C’est une hécatombe qui n’épargne personne en Iran, ni la population ni les dirigeants. Troisième pays le plus touché par la pandémie liée au coronavirus – après la Chine et l’Italie–, la République islamique fait face à une crise sanitaire sans précédent, exacerbée par l’impact des sanctions américaines mises en œuvre par l’administration Trump dans le cadre de sa politique de « pression maximale » contre Téhéran. Selon un comptage de l’AFP à partir de sources officielles hier en fin de matinée, le pays répertorierait à ce jour 14 991 cas dont 853 décès. Des chiffres qui pourraient s’avérer bien plus importants tant le manque de transparence du gouvernement a été pointé du doigt au cours des dernières semaines. Tantôt qualifiée de complot visant à dissuader les Iraniens de sortir pour aller voter, tantôt décrite comme une bénédiction, la pandémie liée au coronavirus a été largement sous-estimée par l’ensemble du pouvoir, à commencer par l’ayatollah Ali Khamenei, guide suprême de la révolution et pilier du régime. Les hôpitaux sont débordés et en grave pénurie de masques, de combinaisons de protection, de gants, ou encore de médicaments. Le personnel médical succombe en nombre, tout comme les patients qui, faute de moyens, rendent l’âme avant même que le diagnostic ne leur ait été donné. Le virus va jusqu’à contaminer les hauts fonctionnaires, parmi lesquels des députés, des ministres, ou encore des membres des gardiens de la révolution.

Certaines images satellite publiées par le New York Times semblent même montrer que des tranchées ont été creusées à la va-vite pour enterrer les morts dans le vaste cimetière de Behesht-e Masoumeh, dans la ville sainte de Qom, épicentre de l’épidémie sur le territoire iranien.


(Lire aussi : Le coronavirus, nouvelle variable de la "pression maximale" de Trump contre l'Iran)



« Pas comme l’ONU »

Un climat morbide que les autorités elles-mêmes ont fini par reconnaître, au point qu’elles ont fait appel au Fonds monétaire international (FMI) pour un financement d’urgence à hauteur de 5 milliards de dollars afin d’aider le pays à lutter contre l’impact socio-économique du Covid-19. Au début du mois, la directrice générale de l’institution financière, Kristalina Georgieva, a déclaré que le FMI mettrait « environ 50 milliards de dollars à disposition des pays à faible revenu et des pays émergents pour répondre à leurs éventuels besoins », dans le but de riposter au coronavirus. Dans la foulée, le gouverneur de la Banque centrale iranienne, Abdolnaser Hemmati, a confié avoir écrit à Mme Georgieva pour requérir le soutien du fonds d’urgence. Une première pour Téhéran qui n’avait pas fait appel au FMI depuis 1962. « Il s’agit en effet d’une décision sans précédent pour l’Iran. Cela ne fait que démontrer les lourdes restrictions financières dont souffre l’État et qui sont à mettre sur le compte de l’impact des sanctions américaines sur ses exportations de pétrole et aux milliards de dollars de dommages économiques qui s’en sont suivis. L’année économique actuelle a connu une contraction de la croissance de 10 %. L’épidémie du coronavirus entraîne un préjudice économique supplémentaire », commente pour L’Orient-Le Jour Ali Fathollah-Nejad, chercheur associé au Brookings Doha Center. Poussé dans ses derniers retranchements économiques par la pandémie, le pays devra composer avec les États-Unis, le plus gros contributeur financier au FMI. L’octroi de 5 milliards de dollars à l’Iran remettrait en cause la politique de « pression maximale » mise en œuvre par Washington contre Téhéran, depuis son retrait unilatéral en mai 2018 de l’accord sur le nucléaire iranien. La stratégie américaine vise à paralyser les finances du gouvernement iranien. Selon Téhéran, ces mesures poussent les banques centrales à empêcher l’Iran d’utiliser ses réserves de change. L’administration Trump avait approuvé une dérogation aux sanctions afin de transférer l’aide humanitaire via un canal suisse. Une action qu’a démentie le porte-parole du ministère iranien des Affaires étrangères qui a affirmé mercredi dernier que l’accès au canal était toujours bloqué par les États-Unis. Quand bien même le FMI accepterait d’accorder le prêt, Washington pourrait y opposer son veto.

« Les États-Unis disposent du droit de vote le plus important au sein du FMI, mais ils ne disposent pas de la majorité. Les autres membres de l’organisation ont suffisamment de droits de vote pour accorder un prêt à l’Iran. Étant donné les circonstances humanitaires actuelles, je m’attends à ce qu’un prêt soit accordé, car le monde ne peut pas se permettre les coûts élevés qu’engendrerait une propagation de la crise au Moyen-Orient », estime Kenneth Katzman, spécialiste de l’Iran au Congressional Research Service. « Le FMI ne fonctionne pas comme l’ONU. Ce n’est pas un veto qui peut mettre un coup d’arrêt à un processus. Il faut de la négociation », souligne pour sa part à L’OLJ une source diplomatique occidentale sous le couvert de l’anonymat.


Obstacles techniques

Même si le prêt du FMI est accordé, le transfert d’argent serait confronté à des difficultés techniques de taille. Le Groupe d’action financière (GAFI) a replacé en février dernier l’Iran sur sa liste noire, invoquant l’échec par Téhéran de se conformer aux normes internationales sur la lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme. Cette décision contribue à accroître l’isolement de la République islamique vis-à-vis des marchés financiers. Concrètement, cela se traduit par une plus grande attention portée aux transactions avec l’Iran, une intensification des pressions sur les quelques banques et compagnies internationales à l’œuvre sur place et des règles d’audit externes plus sévères. Si prêt d’urgence du FMI il y a, toutes les transactions qui lui sont liées pourraient être bloquées par d’autres banques et canaux financiers.


Pour mémoire

Plus de 10 000 malades en Iran, Téhéran exhorte le FMI à l’aider

C’est une hécatombe qui n’épargne personne en Iran, ni la population ni les dirigeants. Troisième pays le plus touché par la pandémie liée au coronavirus – après la Chine et l’Italie–, la République islamique fait face à une crise sanitaire sans précédent, exacerbée par l’impact des sanctions américaines mises en œuvre par l’administration Trump dans le cadre de sa...

commentaires (3)

Le FMI est à court de finances , il est sollicité par de nombreux pays et n'arrivera pas à joindre les deux bouts .

Chucri Abboud

22 h 48, le 17 mars 2020

Tous les commentaires

Commentaires (3)

  • Le FMI est à court de finances , il est sollicité par de nombreux pays et n'arrivera pas à joindre les deux bouts .

    Chucri Abboud

    22 h 48, le 17 mars 2020

  • Les mollahs veulent le beurre et l argent du beurre...ils declarent les USA grand satan et ensuite demandent de l argent au FMI...c est trop facile ...il faut leir imposer des conditions en echange......

    HABIBI FRANCAIS

    11 h 59, le 17 mars 2020

  • En dehors de toute considération politique , on devrait toujours venir en aide aux personnes atteintes , médicalement. Si les usa bloquent cet appel , cela ne confirmera que ce qu'on a toujours pensé d'eux . Des maîtres chanteurs sans foi ni loi .

    FRIK-A-FRAK

    11 h 07, le 17 mars 2020

Retour en haut