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À La Une - L'Orient littéraire

Du printemps avorté à la révolution d’octobre

Julien Ricour-Brasseur publie un ouvrage intitulé "Le Printemps de Beyrouth n’aura pas lieu : Analyse de l’œuvre inachevée de Samir Kassir".

Photo D.R.

Dans son ouvrage Le Printemps de Beyrouth n’aura pas lieu : Analyse de l’œuvre inachevée de Samir Kassir, Julien Ricour-Brasseur explore le travail, l’engagement politique de l’intellectuel beyrouthin et certains épisodes de sa vie durant la décennie qui a précédé son assassinat le 2 juin 2005.

Le livre s’articule autour de trois axes. Le premier dresse un portrait de Kassir à « l’identité plurielle », libanaise, palestinienne, syrienne et française, passionné de la vie, de l’esthétisme et des arts, défiant les tabous politiques comme culturels, et bravant la censure et la peur jusqu’à son dernier souffle.

Le second axe présente son « Œuvre ». Celle illustrée par ses livres autour de la guerre du Liban, l’histoire de Beyrouth et le « malheur arabe », mais aussi par sa production journalistique dans le quotidien an-Nahar, et son expérience assez singulière dans le mensuel francophone L’Orient Express qu’il a fondé. Singulière car dans ce dernier, il se révéla surtout comme « l’Arabe de gauche qui écrivait en français », à l’opposé d’une certaine tradition francophone libanaise, connotée plus à droite et plus « libaniste ».

Dans le troisième axe, Ricour-Brasseur développe la vision politique de Samir Kassir. Cette dernière s’est affinée dans la deuxième moitié des années 1990, à son retour de Paris pour enseigner à l’Université Saint-Joseph et écrire dans les colonnes d’an-Nahar. Ces années ont plus largement vu mûrir au sein de la gauche libanaise un discours critique sur la reconstruction du centre-ville de Beyrouth et les politiques économiques du Haririsme, sur l’hégémonie syrienne et surtout sur les pratiques des Services de renseignement, que Samir avait fait sien ; ce qui lui a valu de nombreuses intimidations (surveillance et confiscation de son passeport par la Sûreté générale) et menaces. Il a, dans la même période, contribué au Forum démocratique né officiellement en 2001 (après la fin de l’occupation israélienne du Sud-Liban), avant de co-fonder le Mouvement de la gauche démocratique.

La suite en 2005 est connue : de l’assassinat de Rafic Hariri au soulèvement de l’indépendance contre le régime syrien et ses alliés libanais, de l’espoir naissant, cette « victoire de courte durée » comme la qualifie à juste titre Ricour-Brasseur, aux élections parlementaires qui ont signé des compromis entre les ténors de la classe politique (des deux camps rivaux) et le maintien des équilibres confessionnels. Les possibilités de réformes politiques, économiques et sociales ont aussitôt avorté, quelques semaines seulement avant l'inhumation de Samir, tué dans l’explosion de sa voiture à Achrafieh.

Depuis, le Liban a connu une série de bouleversements politiques, de crises, de guerres, d’assassinats et de retournements d’alliances. Il a aussi vu naître des campagnes citoyennes réclamant des réformes, des mobilisations contre la corruption et les violations des droits humains. Et pendant que la société évoluait, qu’une nouvelle génération élaborait sa propre culture politique, rythmée par les révolutions et les contre-révolutions arabes, la même classe dirigeante et ses « élites » politico-financières stagnaient et tentaient par tous les moyens de préserver un statuquo protégeant leurs privilèges et biens (souvent mal acquis) ainsi que leur impunité.

Tous, cela veut dire tous !
En octobre 2019, à la surprise générale, un grand soulèvement populaire a éclaté dans le pays. Les scènes de rassemblements rappelant celles de mars 2005 ont, des semaines durant, eu lieu. Mais elles contestent cette fois tout un système, un modèle de gouvernance oligarchique, confessionnel, corrompu, raciste et patriarcal, qui n’a pas été touché en 2005. Dans les rues comme sur les réseaux sociaux (absents par le passé), à Beyrouth comme dans le Nord, la Montagne, le Sud et la Beqaa, des valeurs basées sur la liberté, la justice sociale, l’égalité entre hommes et femmes, l’indépendance du système judiciaire et le dépassement du confessionalisme sont quotidiennement défendues.

« Le Printemps de Beyrouth » va-t-il enfin avoir lieu, en 2020 ?
La réponse réside dans la capacité du soulèvement révolutionnaire actuel à résister à la contre-révolution en cours, à la répression et à la violence qu’exercent les forces de l’ordre et les banques, et au nouveau gouvernement formé par le Hezbollah et ses alliés. Elle réside également dans la possibilité de sauver le pays de la faillite financière et d’opérer un changement irréversible dans les clivages, les mentalités et la conscience politique.

Il n’y aura probablement ni victoire décisive ni défaite inévitable. C’est toutefois un processus lent, long et risqué qu’il faudra patiemment accompagner et soutenir jusqu’à ce que s’esquissent des perspectives viables pour tous ceux et celles qui aspirent à vivre dignement dans la société libanaise. Celle que Samir et bien d’autres auraient aimé voir.


Le Printemps de Beyrouth n’aura pas lieu : Analyse de l’œuvre inachevée de Samir Kassir de Julien Ricour-Brasseur,


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Dans son ouvrage Le Printemps de Beyrouth n’aura pas lieu : Analyse de l’œuvre inachevée de Samir Kassir, Julien Ricour-Brasseur explore le travail, l’engagement politique de l’intellectuel beyrouthin et certains épisodes de sa vie durant la décennie qui a précédé son assassinat le 2 juin 2005.Le livre s’articule autour de trois axes. Le premier dresse un portrait de Kassir à...

commentaires (3)

Merci Hezbollah pour tous les crimes que vous avez fait au Liban avec l'aide de la Syrie et des ayatollahs ,vous avez détruit ce beau pays

Eleni Caridopoulou

21 h 41, le 09 février 2020

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Commentaires (3)

  • Merci Hezbollah pour tous les crimes que vous avez fait au Liban avec l'aide de la Syrie et des ayatollahs ,vous avez détruit ce beau pays

    Eleni Caridopoulou

    21 h 41, le 09 février 2020

  • NI PRINTEMPS ET NI REVOLTE N,APPORTERONT DE CHANGEMENT ET NE RESSUSCITERONT LE PAYS TANT QU,IL EST L,OTAGE DES DEUX MILICES CHIITES IRANIENNES.

    LA LIBRE EXPRESSION

    15 h 31, le 09 février 2020

  • Voilà comment opèrent les voyous de tout bord dans notre pays sous le masque de resistants. Ils ont adopté la doctrine où la haine est une ivresse et les menaces de mort habituelles pour taire toutes les voix dissonantes à leurs projets de destruction et à leurs complots pour envahir ce pays et en faire un enfer que seuls leurs armes et leur haine font office de loi. Personne des responsables politiques n'a eu le courage de les dénoncer. Moyennant quelques milliards, ils se sont vus embourbés dans la boue que les envahisseurs ont pris le soin de les y planter pour qu'aucun n'ose réclamer leur désarmement ou dénoncer leur traîtrise, MOUILLÉS JUSQU'AU COU. La haine, la mort, la destruction et le pouvoir de tenir en haleine tout un peuple ont transformé notre beau pays en enfer où même les plus récalcitrants ont fini par abandonner faute de solidarité et patriotisme. Une occasion unique à vu le jour le 17 octobre où tous les libanais ont entrevu une lueur d'espoir au bout du tunnel, mais c'était sans compter sur la traîtrise et la corruption qui gangrène notre pays. Des voyous lâches et protégés par les politiques ont réduit cet espoir à une illusion dont certains TRAITRES se gargarisent pour ôter toute légitimité à ce peuple de se réinventer et de remettre notre pays sur le droit chemin. HEUREUX? VOUS LIBANAIS, QUI ÊTES RESTÉS CHEZ VOUS À COMPTER LES BLESSÉS DANS LA RUE SANS QU'AUCUNE RÉVOLTE NE VOUS SAISISSE POUR PRÊTER MAIN FORTE À VOS LIBÉRATEURS ?

    Sissi zayyat

    12 h 21, le 09 février 2020

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