Il semble que le fossé n’en finit pas de se creuser entre le Premier ministre désigné, Hassane Diab, et les parties mêmes qui ont appuyé sa nomination, il y a une vingtaine de jours, notamment le président de la Chambre, Nabih Berry, et le Courant patriotique libre.
Pour la deuxième fois en l’espace d’une semaine, et après avoir menacé de ne pas prendre part à la future équipe ministérielle, le président de la Chambre, Nabih Berry, a décoché ses flèches en direction de M. Diab, lui compliquant encore plus la tâche. « Le Premier ministre désigné s’est lui-même imposé des limites, dont le fait de ne pas nommer d’anciens ministres. Mais là, une question se pose : pourquoi ne pas reconduire à son poste un ministre qui a réussi? » s’est interrogé le chef du législatif devant une délégation de l’ordre de la presse. Et d’ajouter : « Le Premier ministre désigné a dit vouloir former un gouvernement de spécialistes indépendants. Mais est-ce que cela signifie la non-appartenance partisane, sachant que M. Diab lui-même a été nommé par des forces politiques et partisanes? »
« Je suis prêt à me rendre au Parlement et accorder ma confiance au cabinet qu’ils (les protagonistes impliqués dans les tractations) veulent former, mais sans y prendre part », a encore dit le chef du Parlement, ajoutant : « Je veux Hassane Diab, mais je ne veux pas qu’il s’impose et m’impose des limites que la Constitution ne prévoit pas. » Réitérant son appel à ce que le mouvement de contestation soit représenté au sein de la prochaine équipe, Nabih Berry a exclu la possibilité d’accorder au cabinet Diab des prérogatives exceptionnelles. Par ailleurs, interrogé sur son appel à redynamiser le cabinet sortant, M. Berry a insisté sur l’importance d’expédier les affaires courantes en attendant la mise sur pied d’une nouvelle équipe. « Mon dernier contact avec (le Premier ministre sortant) Saad Hariri ne servait pas à parasiter Hassane Diab, mais s’inscrit dans le cadre des efforts déployés pour approuver le projet de budget 2020 à la Chambre », a expliqué M. Berry.
(Lire aussi : Ne pas se tromper de bataille, l’édito de Michel TOUMA)
Joumblatt et la représentation des druzes
À son tour, le leader du Parti socialiste progressiste, Walid Joumblatt, a plaidé pour que le cabinet de Saad Hariri, qui se trouve en visite privée à l’étranger depuis plus de deux semaines, expédie les affaires courantes. S’exprimant à l’issue d’un entretien avec Nabih Berry à Aïn el-Tiné, le leader de Moukhtara n’a pas mâché ses mots sur ce plan. « Le pays ne peut pas continuer à aller vers l’effondrement. Il faut qu’un gouvernement soit formé rapidement. Mais avant toute entente à ce sujet, il faut au minimum expédier les affaires courantes. Cela est aussi important que la genèse d’un gouvernement », a-t-il estimé.
À une question portant sur la participation du PSP au cabinet Diab, M. Joumblatt a rappelé que son parti avait déjà annoncé sa volonté de rester en dehors de la future équipe. « Mais cela ne signifie pas que la communauté druze doive en être écartée », a-t-il précisé, faisant savoir qu’il avait proposé à Hassane Diab le nom de l’industriel Walid Assaf en tant que représentant des druzes au sein du cabinet. « Je suis entré en contact par téléphone avec Jamil Sayyed, pour confirmer le nom de M. Assaf », a ajouté ironiquement M. Joumblatt, dans une allusion au fait que l’ancien directeur de la Sûreté générale serait derrière la désignation de Hassane Diab.
Sur un autre registre, le chef du PSP a critiqué le mouvement de contestation dans la mesure où il n’a pas présenté un plan pour son accession au pouvoir. « Cela ne peut être atteint qu’au moyen d’élections », a souligné M. Joumblatt, plaidant pour un scrutin tenu conformément à une nouvelle loi électorale.
Les propos de Nabih Berry et de Walid Joumblatt interviennent quelques jours après un communiqué publié par le Premier ministre désigné, vendredi dernier, dans lequel il avait détaillé « les critères » auxquels obéit le processus de formation du gouvernement. Il s’agit, notamment, d’une équipe restreinte de 18 ministres spécialistes, indépendants à l’égard des partis.
Les positions de MM. Berry et Joumblatt sont-elles donc à même de compliquer la mission de Hassane Diab ? Dans les milieux de ce dernier, contactés par L’Orient-Le Jour, on répond par la négative. Nabih Berry et Walid Joumblatt ne participent pas au cabinet, précise-t-on, faisant état d’un « léger progrès » qui serait le résultat de quelques entretiens tenus loin des feux de la rampe, comme le confie une source bien informée, tout en assurant que « Hassane Diab pourrait rester Premier ministre désigné jusqu’à la fin du mandat Aoun ».
Entre-temps, les regards seront braqués aujourd’hui sur la conférence de presse que doit tenir le chef du CPL, Gebran Bassil, à l’issue de la réunion hebdomadaire du groupe du « Liban fort ». À la suite du bras de fer qui l’a longtemps opposé à Hassane Diab au sujet de la forme du gouvernement, des noms de certains ministrables et du tiers de blocage, Gebran Bassil devrait annoncer une fois de plus sa volonté de se ranger dans le camp de l’opposition...
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commentaires (14)
l'usage de ce terme "parrains", en dehors des cérémonies de baptêmes chez les chrétiens, désigne en général ceux qui règnent dans un milieu peu fréquentable, dont le nom commence par m.. et se termine pas ..afieux !
Shou fi
09 h 34, le 15 janvier 2020