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Campus - TÉMOIGNAGES

Le doctorat : un parcours semé d’embûches, mais qui en vaut la peine

Christy Chaoul. Crédit photo : Joud el-Sayah

Ils aspirent tous à obtenir le grade universitaire le plus élevé et le titre de docteur. Pour ce faire, ils se sont engagés dans un véritable parcours du combattant qui s’étend au moins sur trois années. Ces jeunes Libanais passionnés par leur domaine d’études ont choisi de se lancer dans la recherche pour atteindre leurs objectifs professionnels tout en se mettant au service de la société. Malgré une motivation implacable, ils avouent ne pas pouvoir surmonter facilement les différentes difficultés qui se présentent à eux et préserver leur bien-être.


Faire face aux contraintes

Les conditions idéales ne sont pas toujours réunies quand il s’agit de faire sa thèse et Mohammad Haraké, en 3e année de doctorat en biologie à l’Université Saint-Joseph (USJ) en collaboration avec l’Université américaine de Beyrouth (AUB), en sait quelque chose. « L’accessibilité au matériel de recherche est parfois une entrave pour les jeunes chercheurs. Dans mon cas, lorsque je dois par exemple commander un réactif de laboratoire en provenance de l’étranger, il me faut attendre quelques semaines, et parfois des mois, pour que le produit soit livré », précise le jeune chercheur.

Rosabelle Chédid, inscrite en 3e année de doctorat en sciences et technologie à l’Université Saint-Esprit de Kaslik (USEK), a rencontré ce même problème et raconte sa mésaventure : « J’ai eu également besoin de commander des réactifs et j’ai dû patienter pendant deux mois avant de les recevoir. Après la livraison, certains se sont avérés incompatibles avec les machines utilisées dans les laboratoires de mon université. » La jeune chercheuse explique qu’en plus des contraintes d’ordre technique, les doctorants peuvent avoir des difficultés à collecter certaines données dont ils ont besoin et qui sont fournies par les hôpitaux. Mohammad souligne qu’il existe, au Liban, un manque de financement des projets de recherche, en particulier dans le domaine médical. « Il est dommage que la plupart du temps les doctorants doivent compter sur le soutien de leur famille et trouver du travail à temps partiel pour pouvoir financer leurs études », regrette-t-il. « Depuis mon inscription en doctorat, je travaille davantage pour pouvoir régler mes frais universitaires. Je dors moins et je dois lutter contre le stress et la fatigue », confie Rosabelle Chédid qui a, elle aussi, peu de temps à consacrer à sa vie privée.


Persévérer malgré la remise en question

Dans le cadre d’une thèse, les résultats du travail ne sont visibles qu’à long terme. Christy Chaoul, en 4e année de doctorat en géographie à l’USJ, l’a bien compris. La doctorante spécialisée en environnement et aménagement du territoire raconte qu’il lui est arrivé de répéter une dizaine de fois une manipulation jusqu’à arriver à un résultat satisfaisant. « Un thésard doute forcément de ses capacités. Dans mon cas, j’ai choisi de repartir à zéro après six mois de travail sur le terrain, mais je sais aujourd’hui que j’ai fait le bon choix », confie la jeune femme qui étudie la dynamique urbaine à l’interface ville-forêt dans la région métropolitaine de Beyrouth. Comme de nombreux doctorants, Christy traverse des hauts et des bas pendant la période de rédaction de sa thèse et a connu le phénomène de la page blanche. « Penser que les autres chercheurs avancent plus vite ou se débrouillent mieux peut créer un blocage chez un doctorant. Mettre ses idées par écrit n’est pas facile, mais la persévérance et le travail au quotidien finissent par porter leurs fruits », remarque-t-elle.


Faire des concessions

Les doctorants délaissent souvent leur vie personnelle au profit de la recherche qui empiète sur leur temps libre. « Préparer une thèse implique qu’il faut respecter son calendrier de travail, rédiger des articles et préparer des interventions. Parfois, j’ai dû mettre entre parenthèses ma vie sociale et familiale, et faire des nuits blanches pour pouvoir présenter mon travail à temps », raconte Mira Ibrahim Daher qui prépare, depuis 2017, sa thèse en nutrition à l’USEK. La doctorante précise que, puisqu’elle est boursière du CNRS-L et de l’USEK, elle a dû refuser de nombreuses offres d’emploi au cours des deux dernières années pour se consacrer exclusivement à la recherche.

Entre lectures, séminaires, heures de travail en laboratoire et rédaction de la thèse, les chercheurs interrogés s’accordent à dire que leur quotidien est chargé et qu’il affecte leur qualité de vie. En effet, ils ont tendance à dormir moins, limiter considérablement leurs sorties et s’isoler pour pouvoir travailler.


Des thésards contraints au départ

Pour pouvoir développer les sujets qui les passionnent, intégrer des laboratoires de recherche réputés ou même trouver le financement nécessaire au développement de leurs sujets, certains doctorants sont contraints de faire leur thèse à l’étranger. « Faute de trouver un budget suffisant au Liban, et parce que je ne peux pas avoir accès à tout le matériel et aux machines dont j’ai besoin, j’ai dû m’installer en France pour préparer ma thèse. M’éloigner de mes proches et vivre dans un pays étranger est une décision difficile que j’ai dû prendre, mais que je ne regrette pas », explique Nader Bayda, inscrit en 2e année de thèse en biologie, médecine et santé à l’École doctorale des sciences biologiques et santé de l’Université de Limoges. Bien qu’il bénéficie d’une bourse, le jeune homme doit tout de même compter sur le soutien financier de ses parents pour subvenir à ses dépenses en France.

Edward Chalouhi, inscrit en 2e année de thèse au sein de l’École doctorale de chimie physique et de chimie analytique de Paris Centre (ED 388), bénéficie d’un contrat doctoral qui lui permet de se consacrer à plein-temps à la recherche au sein du Laboratoire des biomolécules-UMR7203. « À Paris, j’ai accès à l’ensemble des données, publications et matériaux nécessaires à l’avancement de mon projet. Le fait de vivre loin de mes proches et de ma famille s’avère par moments difficile, mais je suis sûr que je n’aurai pas pu bénéficier de toutes ces ressources au Liban », souligne-t-il.


Entretenir sa motivation

Malgré les obstacles qu’ils sont amenés à surmonter et les difficultés qui se présentent à eux, chacun des doctorants interrogés affirme être motivé pour avancer dans la rédaction de sa thèse. « S’engager dans des études doctorales n’est pas facile, mais si nous avons choisi ce parcours, c’est parce que nous sommes conscients que cela nous permet de nous épanouir aussi bien au niveau personnel que professionnel », résume Mira Daher. « Au fil des mois et avec l’expérience que nous arrivons à acquérir, les difficultés s’amenuisent surtout lorsque l’on est bien soutenu par notre entourage et lorsqu’on aime vraiment ce qu’on fait. Il faut avoir vraiment choisi un sujet qui nous passionne pour arriver à bon port », note enfin Edward Chalouhi.



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