Vers quelle forme de gouvernement se dirige-t-on ? Il faudra probablement attendre l’issue de la nouvelle phase du bras de fer, devenu chronique, entre le Courant patriotique libre et le courant du Futur pour le savoir.
À l’heure où la communauté internationale exhorte les autorités libanaises à former une équipe ministérielle crédible dans les plus brefs délais et où le mouvement contestataire presse pour la mise sur pied d’un cabinet de spécialistes, le Premier ministre sortant, Saad Hariri, et le CPL s’écharpent toujours autour de la future équipe. Commentant la réunion du Groupe international de soutien au Liban qui s’est tenue hier à Paris, M. Hariri a estimé que « pour sortir de la crise, il faut aller de l’avant dans la formation d’un gouvernement de spécialistes, qui serait une équipe homogène à même de répondre aux aspirations que les Libanais expriment depuis le 17 octobre ». Quant au CPL, il répète que le prochain gouvernement devrait être techno-politique, c’est-à-dire mêlant spécialistes et figures politiques.
Depuis le retrait, dimanche dernier, de l’homme d’affaires Samir Khatib, qui était soutenu par le chef du CPL Gebran Bassil pour former la nouvelle équipe ministérielle, au profit de Saad Hariri, les relations sont au plus bas entre le CPL et le courant du Futur. Ce qui a poussé les milieux proches du CPL à évoquer la possibilité d’un cabinet qui n’inclurait pas le chef de cette formation. Le parti se rangerait ainsi dans le camp de l’opposition, bien que son fondateur, Michel Aoun, soit le président de la République. Dans l’attente de l’annonce officielle des aounistes, prévue aujourd’hui, des sources dans les milieux haririens contactées par L’Orient-Le Jour tentent de minimiser la portée politique d’une telle position, dans la mesure où le président de la République sera représenté au sein du cabinet. Ce n’est donc qu’une « manœuvre politique visant à améliorer les conditions de Gebran Bassil lors des négociations gouvernementales », estime une de ces sources qui ajoute que tous les protagonistes ont compris le message que leur a adressé la communauté internationale. On pourrait donc s’attendre à ce que les tractations débouchent sur un gouvernement, estime-t-on dans les mêmes milieux.
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Berry et le CPL
Du côté de Aïn el-Tiné, le président de la Chambre, Nabih Berry, et en dépit de ses rapports en dents de scie avec le parti de Gebran Bassil, semble attaché à la participation du CPL à la future équipe. Une position qu’il a exprimée devant Salim Aoun, député CPL de Zahlé, lors de ses audiences du mercredi. M. Aoun devrait transmettre ce message fort à M. Bassil, leader de son parti.
Pourquoi M. Berry tient-il à la présence du CPL au sein du prochain cabinet ? Pour une source proche du dossier gouvernemental, il s’agit pour le président de la Chambre de garantir la conformité du gouvernement au pacte national en y incluant des représentants de toutes les communautés. D’autant qu’aussi bien les Forces libanaises que les Kataëb ont déjà annoncé leur volonté de ne pas faire partie du cabinet, l’heure étant, selon eux, à la formation d’une équipe de spécialistes, telle que demandée par les manifestants.
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Mais au cas où le CPL insisterait pour se ranger dans le camp de l’opposition, qui serait en mesure de prendre sa place ? Contacté par L’OLJ, Fadi Saad, député FL de Batroun, exclut catégoriquement que sa formation le fasse. « Il n’est pas logique de soutenir les justes revendications des manifestants et de prendre part au cabinet », souligne-t-il, avant de préciser que son parti a claqué la porte du cabinet démissionnaire en signe d’opposition à la ligne politique actuelle, qui semble maintenue. « Il n’est donc pas question de participer au prochain gouvernement », insiste-t-il, réitérant son appel à la formation d’un cabinet de technocrates.
Sauf que cette option continue de se heurter au veto du tandem chiite, celui-ci étant attaché à la formation d’un cabinet techno-politique qui serait à même de prendre les décisions éminemment politiques qu’exige la situation actuelle, comme le précise une source politique. Selon cette source, M. Berry serait néanmoins prêt à renoncer à son attachement à un retour de son bras droit Ali Hassan Khalil, ministre sortant des Finances, à la future équipe si cela pourrait assurer sa productivité.
Pour le moment, une chose semble sûre : les consultations parlementaires contraignantes devront se tenir lundi au palais de Baabda, où l’on exclut la possibilité d’un nouveau report sauf en cas de force majeure, selon un proche de la présidence. Pour lui, l’heure est à la désignation d’un Premier ministre, avant de se lancer dans les spéculations médiatiques portant sur les noms des ministrables. Une façon de répondre à des informations ayant circulé récemment dans les milieux politiques et selon lesquelles le chef de l’État serait attaché à ce que le ministre d’État sortant pour les Affaires présidentielles, Salim Jreissati, fasse partie de la nouvelle équipe ministérielle.
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commentaires (14)
Photo emblème de ce qu’est devenu le Liban À part Berry et probablement son secrétaire pas un seul n’a un papier devant lui pour prendre des notes On entend le vice Dieu parler et on se délecte de ses paroles Et dire que nous les avons élus pour ne pas avoir été voté
LA VERITE
11 h 29, le 13 décembre 2019