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Liban - Choueifate

« Nous ne rentrerons pas chez nous avant la chute du gouvernement »

La route maritime reliant Beyrouth au Liban-Sud bloquée par des protestataires en colère.

Photo Mathieu Karam

Comme dans toutes les autres régions du Liban, à Choueifate, la rue bouillonnait hier. Une trentaine de jeunes, parfois encagoulés, manifestaient dans cette localité du sud de Beyrouth contre la crise économique et les nouvelles taxes, notamment celle annoncée jeudi matin sur l’utilisation des applications de messagerie sur base du principe du VoIP (Voice over Internet Protocol), un service notamment disponible sur

WhatsApp. L’annonce hier soir du ministre des Télécoms Mohammad Choucair sur l’annulation de cette taxe n’a pas fait décolérer la rue. L’autoroute du Sud était coupée toute la journée ainsi que la route maritime reliant la capitale au sud du pays.

Dans la matinée, les protestataires bloquaient un rond-point, ne laissant filtrer que quelques voitures, sous le regard des membres des renseignements de l’armée. La fumée de pneus calcinés se dégageait derrière eux.

« Je me couvre le visage, sinon ils vont tous nous embarquer », explique Tarek, en référence aux forces de l’ordre. « C’est la seconde fois que je manifeste. La dernière fois, c’était récemment à Beyrouth. Rien ne va plus, je suis au chômage, la vie est chère, nous ne trouvons pas de travail », poursuit le jeune homme.

Mohammad, 30 ans, habite à Choueifate. Sans emploi depuis un an, il dit manifester pour la première fois. « Nous nous sommes rassemblés, des voisins et moi, de manière spontanée. Nous en avons ras le bol. Cela va bien au-delà de la question de WhatsApp. On dénonce le chômage, la cherté de vie et la classe politique corrompue. Nous ne rentrerons pas chez nous avant la chute du gouvernement », explique Mohammad, qui précise n’être affilié à aucun parti politique. De nombreuses manifestations ces dernières années à travers le pays ont été entachées par la présence de manifestants envoyés par différents partis politiques, semant ainsi davantage la zizanie. « Ils sont tous pourris ! Ce n’est pas une histoire de WhatsApp ! C’est ce système capitaliste qui nous exploite que nous contestons aujourd’hui », lance un trentenaire sur sa moto. « Leurs (les responsables politiques) enfants ont la belle vie, eux... » dit-il.



(Lire aussi : Le tandem Amal-Hezbollah dans la rue : réaction « spontanée » ou mot d’ordre politique ?)



« On devrait jeter tous les responsables à la poubelle »
« Cela fait cinq ans que je n’ai pas de travail. À chaque manifestation, je réponds présent. On vit sans nourriture, sans eau, on devrait jeter tous les responsables à la poubelle. Nous (le groupe de manifestants) ne sommes affiliés à aucun parti politique. Nous sommes avec Dieu. C’est grâce à Dieu que nous survivons », lance Omar, 19 ans.

« Nous sommes tous contre les partis politiques », renchérit un autre manifestant venu prêter main-forte aux jeunes qui enflamment des pneus pour bloquer la circulation sur l’autoroute de Naamé.

« La solution, c’est la chute du gouvernement. Lorsque tous les responsables seront jetés dehors, tout ira mieux », poursuit Omar. « Nous rentrerons chez nous lorsque nous aurons des salaires décents et que les responsables auront revu leurs salaires à la baisse. Il y a des gens qui crèvent de faim, d’autres qui dorment dans la rue, dans des tentes, en hiver. Allez faire un tour dans les quartiers populaires, vous verrez des habitations en tôle, des bidonvilles. WhatsApp, Facebook, tout est devenu plus cher. On ne nous laisse même plus travailler. Que voulez-vous de plus ? » dit-il encore.

À Khaldé, les automobilistes ne semblaient pas être énervés outre mesure par le fait que de nombreuses routes étaient coupées par les manifestants. Au contraire, nombre d’entre eux affichaient leur solidarité avec les manifestants, certains faisant même le signe de la victoire. « Que Dieu vous garde ! Mais allez plutôt manifester devant la maison de Nabih Berry et devant celles des autres responsables politiques », s’écrit un automobiliste.

La veille, dans la soirée, des manifestants s’en étaient pris aux domiciles et bureaux de plusieurs responsables Amal et Hezbollah, à Nabatiyé. Plusieurs personnes qui manifestaient devant le bureau du député d’Amal Hani Kobeissi (Amal) avaient défoncé la porte du bureau, provoquant des dégâts matériels. Dans la nuit, des personnes avaient également manifesté devant le domicile du député Yassine Jaber (Amal).



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