Rechercher
Rechercher

Nos Lecteurs ont la Parole - par Adib Y. TOHMÉ

13 octobre 1990-13 octobre 2019

Au commencement, il y avait le vol, le vol perpétré par les guerriers-pillards qu’on appelait milices. Après le vol, il y a eu le survol, les chasseurs bombardiers syriens ont effectué des raids aériens au-dessus du Liban, une page de notre histoire s’est tournée, c’était le 13 octobre 1990.

L’accord de Taëf d’octobre 1989 fut l’autre côté du miroir, le monde à l’envers, l’image du pouvoir fondé sur la force devait refléter celle du pouvoir fondé sur l’argent, c’est l’argent qui servait à soutenir les rapports de force que les armes avaient autrefois instaurés.

Dans le monde à l’envers, les chefs des milices sont devenus des chefs politiques, les institutions de l’État sont devenues des fiefs privés. Au moment de la signature de l’accord, l’appropriation des ressources du pays par les milices était déjà acquise, il s’agissait de légitimer et partager cette appropriation, le pillage à l’ancienne s’est directement mué en hold-up financier post-moderne. Dans le braquage à l’ancienne, un groupe d’individus braque une banque, ou un politique greffe une transaction d’un surcoût correspondant au montant de sa commission.

Dans le hold-up post-moderne, ce n’est plus un citoyen qui braque une banque, mais la banque qui braque l’ensemble des citoyens, la commission n’est plus un pourcentage de la transaction, mais la transaction devient un pourcentage de la commission.

Le hold-up change de paradigmes, alors qu’il était traditionnellement un acte sporadique, il devient permanent, puisqu’il est le fondement du système. Il devient ainsi légal, à défaut d’être légitime. Si le braqueur à l’ancienne était hors la loi, les braqueurs postmodernes sont, eux, confortablement installés au-dessus des lois puisque ce sont eux qui font et appliquent les lois.

Ce fut le casse du siècle. Trente ans après, on se demande quand ce système va s’écrouler, il est sans doute plus judicieux de se demander comment il a survécu si longtemps, mais il est clair qu’il a atteint un point de non-retour, et qu’aucun renflouement, aucune injection de liquidité ne pourrait rien changer. Juste donner un sursis.

Pour leur permettre d’organiser le partage, car après le casse du siècle, place à l’opération de blanchiment du siècle, l’argent volé, caché dans des paradis fiscaux et protégé par le secret bancaire, va acheter tout ce qui est rentable dans un pays post-effondrement. Les temps ont changé, place à la transparence, il s’agit de légaliser la corruption et de la transformer en titres de propriété. Ce qui est à craindre, ce n’est plus l’effondrement, mais ce qui vient après.


Les textes publiés dans le cadre de la rubrique « courrier » n’engagent que leurs auteurs et ne reflètent pas nécessairement le point de vue de L’Orient-Le Jour.

Au commencement, il y avait le vol, le vol perpétré par les guerriers-pillards qu’on appelait milices. Après le vol, il y a eu le survol, les chasseurs bombardiers syriens ont effectué des raids aériens au-dessus du Liban, une page de notre histoire s’est tournée, c’était le 13 octobre 1990. L’accord de Taëf d’octobre 1989 fut l’autre côté du miroir, le monde à l’envers,...

commentaires (0)

Commentaires (0)

Retour en haut