Le secrétaire général du Hezbollah, Hassan Nasrallah, a réitéré mardi matin qu'il n'y aurait "aucune ligne rouge" pour défendre le Liban en cas d'attaque israélienne, alors que la tension est à son comble après une frappe d'Israël en Syrie, le 24 août, et l'envoi, quelques heures plus tard, de deux drones chargés d'explosifs contre la banlieue sud de Beyrouth, fief du Hezbollah. "Si Israël bombarde le Liban, envoie des drones, attaque le Liban, il est du droit du Liban, légal, humanitaire, légitime, de défendre le pays et sa souveraineté. (…) Et ce sans aucune ligne rouge", a lancé Hassan Nasrallah lors d'un discours au dixième jour des commémorations religieuses de l'Achoura.
Au dixième jour de l'Achoura, les chiites du monde entier commémorent le martyre de l'imam Hussein, l'un des petit-fils de Mahomet, assassiné en 680 par les troupes du calife omeyyade Yazid durant la bataille de Kerbala. Au Liban, les fidèles se sont rassemblés dans les principales régions chiites du pays, notamment dans la banlieue sud de Beyrouth et à Nabatiyé au Liban-Sud.
"Les Libanais ont fait échouer la tentative israélienne de modifier les règles d'engagement depuis 2006 et l'armée israélienne, devenue impuissante sur le terrain, s'est transformée en une armée hollywoodienne, a déclaré Hassan Nasrallah. L’un des signes de la force de la résistance est que l’ennemi israélien a établi pour la première fois une ceinture de sécurité à l’intérieur de la Palestine sur une profondeur de 7 km, à partir de la frontière, et évacue ses positions".
Le leader chiite a affirmé qu’Israël “ne respecte pas” la résolution 1701 du Conseil de sécurité de l'ONU. "Le Liban respecte la résolution, et le Hezbollah fait partie du gouvernement libanais qui respecte cette résolution, a-t-il affirmé. Mais si Israël bombarde le Liban, envoie des drones, attaque le Liban, les Libanais ont un droit légal, humanitaire, légitime, de défendre le pays et sa souveraineté. (…) Et ce sans aucune ligne rouge. Pour défendre le Liban, sa souveraineté, sa sécurité et sa dignité, il n’existe aucune ligne rouge, a-t-il martelé. Loin du bruit à l'intérieur et de la menace extérieure, je le dis et je le répète, si l'ennemi attaque le Liban, la riposte sera appropriée".
Selon le chef du Hezbollah, "aujourd'hui, le Liban impose son respect dans le monde, il n’y a pas un Etat qui n’a pas contacté les responsables", dans le cadre des tensions avec Israël. "Les Libanais doivent savoir qu’ils sont aujourd’hui forts, forts dans le triptyque d'or armée-peuple-résistance", a-t-il assuré.
La dernière grande confrontation en date entre Israël et le Hezbollah remonte en 2006. Une guerre de 33 jours avait dévasté le Liban et fait plus de 1.200 morts côté libanais, en majorité des civils, et 160 côté israélien, en majorité des militaires, selon des chiffres officiels.
L'actuelle poussée de fièvre intervient après une frappe d'Israël en Syrie qui a tué deux combattants du Hezbollah, le 24 août. Elle avait été suivie, quelques heures plus tard, de l'envoi de deux drones chargés d'explosifs contre la banlieue sud de Beyrouth, fief du Hezbollah. Le 1er septembre, le parti chiite avait annoncé avoir tiré des missiles antichars sur un véhicule blindé dans le nord d'Israël, en représailles à l'assassinat de ses deux cadres en Syrie. L'armée israélienne a riposté avec environ 100 obus tirés contre un secteur du sud du Liban, considéré selon elle comme "la source des tirs", provoquant des incendies limités dans des zones boisées.
Lundi matin, le Hezbollah avait annoncé avoir abattu un "drone israélien" au moment où celui-ci traversait la frontière avec le Liban. L'armée israélienne a reconnu qu'un de ses drones était "tombé en territoire sud-libanais lors d'opérations de routine". Sans préciser l'origine de l'accident, elle a assuré qu'aucune information ne pouvait être prélevée sur le drone.
(Lire aussi : "Il y aura une riposte à l'attaque des drones contre la banlieue sud", prévient un responsable du Hezbollah)
"Recouvrement des fonds pillés"
Le secrétaire général du Hezbollah a ensuite abordé la situation économique au Liban. "La situation économique n'est pas sans espoir et trouver des solutions doit se faire en conjuguant les efforts", a-t-il affirmé, indiquant que "la question du recouvrement des fonds pillés doit figurer au premier plan des options permettant de remédier à la situation financière". "Il est inacceptable que la solution à la situation soit au détriment de la classe pauvre, a-t-il encore dit. Il est possible d'oeuvrer pour augmenter les revenus, réduire les dépenses et surtout cesser de gaspiller de l'argent. Il faut aussi récupérer l’argent volé par les riches qui ont illégalement rempli leurs poches en pompant l'argent des Libanais".
Au début de son discours, le chef du parti chiite a dénoncé "les sanctions américaines contre l’Iran, la Syrie, les mouvements de la résistance en Palestine, au Liban, et en Irak". "C’est une agression de l’administration américaine pour faire pression au plan économique après l'échec de ses guerres sionistes contre la résistance au Liban et en Palestine et après son échec dans les guerres menées par des groupes takfiristes", a-t-il accusé.
Le gouvernement américain a annoncé fin août des sanctions contre la Jammal Trust Bank, une banque libanaise qu'il a accusée de fournir des services bancaires au Hezbollah. Poids lourd de la vie politique au Liban, représenté au gouvernement et au Parlement, le Hezbollah est considéré comme un groupe "terroriste" par Israël et les États-Unis.
Hassan Nasrallah a aussi remercié "l'armée et les forces de sécurité pour leurs efforts en matière de sécurité afin que la population puisse commémorer cette occasion en sécurité et en paix".
Il a par ailleurs abordé rapidement plusieurs dossiers régionaux. "Nous affirmons notre engagement éternel pour la cause palestinienne (...) nous somme avec le peuple palestinien et tous ses résistants, a affirmé le leader chiite. Notre nation et le peuple palestinien n'ont d'autre choix que de résister. Au Liban également nous affirmons notre attachement aux droits des Palestiniens au Liban". "Nous réitérons l'appel à mettre fin à l'agression brutale contre le Yémen et son peuple et à laisser les Yéménites décider du sort de leur pays", a-t-il également dit.
Le chef chiite a aussi rejeté "tout projet de guerre contre l'Iran car cette guerre enflammera la région et détruira des pays et des peuples . "A celui qui pense que la prochaine guerre, si elle a lieu, marquera la fin de l'axe de la résistance, nous disons: une guerre éventuelle marquerait la fin d'Israël, et marquerait la fin de la domination et de la présence américaine dans notre région", a lancé Hassan Nasrallah.
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commentaires (18)
Sans l’Iran le Liban-Sud serait israélien. Sans le Hezbollah, entre autres, l’Iran serait en guerre. Il en résulte une interdépendance évidente au niveau sécuritaire, et, pour ça, vous ne pouvez vous en prendre qu’à vous même. Malheureusement pour vous on ne refait pas l’Histoire.
Chady
00 h 37, le 12 septembre 2019