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Liban - Déchets

Jreissati dément avoir décrété la fermeture d’une grande décharge au Liban-Nord

Le ministre de l’Environnement répondait à une conférence de presse donnée la veille par le député Marada Tony Frangié, qui l’a accusé d’avoir provoqué l’actuelle crise des déchets dans quatre cazas.

Le ministre Fady Jreissati au cours de sa conférence de presse. Photo ANI

Les déchets sont dans les rues de plusieurs cazas du Liban-Nord depuis huit mois, mais une polémique politique aiguë vient d’éclater sur fond de gestion du dossier, doublée d’une rivalité politique. Le ministre de l’Environnement, Fady Jreissati, a répondu hier dans une conférence de presse aux déclarations incendiaires la veille du député Tony Frangié, qui lui a fait assumer la responsabilité de la crise des déchets dans quatre cazas du Nord. Dans son exposé, le député de Zghorta avait insinué que « la crise des déchets au Nord est provoquée », affirmant avoir des preuves et des enregistrements à l’appui de ses propos, et accusant le ministère « d’avoir contribué à aggraver » cette crise après la fermeture d’une décharge à Adwé.

Or c’est sur tous ces points que le ministre Jreissati a choisi de ne pas réagir, répondant à une question à ce sujet en ces termes : « M. Frangié est un homme politique qui a ses propres calculs. » Il s’en est donc tenu aux efforts effectués pour trouver un site alternatif – qui n’est même pas disponible encore – démentant toute responsabilité du ministère de l’Environnement dans la fermeture de la décharge. « Je défie quiconque de révéler la moindre décision de fermer cette décharge prise par le ministère de l’Environnement », a-t-il assuré, énumérant par ailleurs les très nombreuses réunions tenues avec des notables de la région en vue d’une alternative qui n’a pas été possible.

En réponse à une question sur les révélations du ministre de l’Environnement, une source proche des Marada assure à L’Orient-Le Jour que « la version relatée par le député Frangié est la bonne et nous n’en démordons pas ». « Pourquoi cette décharge n’a-t-elle été fermée que maintenant ? » poursuit-elle. Le ministre Jreissati a évoqué des différends financiers entre les municipalités et le propriétaire de la décharge, ayant abouti à sa fermeture. « La responsabilité de trouver une solution incombe au ministère de l’Environnement », affirme la source proche des Marada.

Comme nous n’en sommes plus à une contradiction près, le ministre a rencontré hier après sa conférence de presse une délégation de la Fédération des municipalités de Zghorta, qui comprenait son président Zeenny Kheir et le président de la municipalité de la ville Antonio Frangié, accompagnés du député Sami Fatfat. Suivant le communiqué du ministère de l’Environnement, l’atmosphère était « cordiale » et toute la polémique a été considérée comme un « malentendu » …


(Lire aussi : Tony Frangié accuse « des gens de l’ombre » d’avoir provoqué la crise des déchets à Zghorta)



Exproprier le terrain et le réhabiliter

La polémique politique n’empêche pas la crise de perdurer sans solution immédiate. M. Jreissati s’est attardé hier sur les efforts en vue de remplacer le site de Adwé, extrêmement pollué et se déversant dans un fleuve, selon lui, ajoutant qu’il avait refusé de décréter lui-même sa fermeture étant donné l’absence d’alternatives.

Il a expliqué que le terrain sur lequel est situé le dépotoir appartient à une famille, qui tient dans ses mains le sort de quatre cazas. Il a affirmé que « les véritables raisons de la fermeture de cette décharge par les propriétaires sont liées à de grosses dettes impayées des municipalités ».

Suivent une série de mesures qui se sont heurtées à des murs, d’après lui. Les efforts pour convaincre les propriétaires de Adwé de garder le site ouvert durant un an ayant échoué, d’autres sites ont été pressentis puis abandonnés successivement en raison de l’opposition populaire.

Seule Bécharré a pu désigner un terrain où les déchets du caza sont désormais entreposés. « Nous avons demandé aux fédérations de municipalités de désigner des terrains possibles, sachant que nous mènerons les études d’impact environnemental », a-t-il dit. La solution immédiate se faisant attendre, le ministre a assuré qu’il allait proposer « l’expropriation du site même de Adwé, qui serait réhabilité en décharge sanitaire ».


(Lire aussi : « Les incinérateurs affectent profondément l’économie des communautés »)


Réunion de la commission ministérielle

Que présage un tel épisode pour l’application d’un plan d’action qui, à l’instar de ses prédécesseurs (non appliqués), est principalement basé sur la création de décharges, quand le choix de sites se heurte toujours à des refus populaires (justifiés par le manque de confiance souligné par le ministre lui-même) et politiques ? M. Jreissati a reconnu qu’une couverture politique du Conseil des ministres était indispensable pour imposer ces sites.

Il convient de souligner qu’une réunion de la commission ministérielle chargée d’examiner le dossier des déchets s’est tenue hier, présidée par le Premier ministre Saad Hariri.

M. Jreissati a donné quelques indications à propos de cette réunion aux journalistes, soulignant qu’elle allait permettre de discuter des sites proposés dans le plan d’action du ministère (qui se fonde en gros sur la création de 25 décharges contrôlées devant desservir toutes les régions, voir L’OLJ du 14 juin 2019), tout comme elle devrait se concentrer sur une solution à la saturation précoce de la décharge de Bourj Hammoud fin août (plusieurs alternatives sont à l’étude, selon le ministre).

En fin de réunion, le ministre a effectivement annoncé qu’une seconde se tiendrait vendredi « pour trancher la question des sites ».



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commentaires (1)

Monsieur Fady Jreissati, les décharges à l'air libre, en pleine nature, sont-elles moins polluantes que les incinérateurs ? Quand aurez-vous enfin le courage de décider vous-même, en tant que "ministre de l'Environnement" ? Quand cette mascarade va-t-elle prendre fin ? Irène Saïd

Irene Said

11 h 14, le 16 juillet 2019

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Commentaires (1)

  • Monsieur Fady Jreissati, les décharges à l'air libre, en pleine nature, sont-elles moins polluantes que les incinérateurs ? Quand aurez-vous enfin le courage de décider vous-même, en tant que "ministre de l'Environnement" ? Quand cette mascarade va-t-elle prendre fin ? Irène Saïd

    Irene Said

    11 h 14, le 16 juillet 2019

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