Le chef du Courant patriotique libre (CPL, fondé par le chef de l’Etat Michel Aoun), Gebran Bassil, a affirmé dimanche que "sans l'unité nationale" le Liban ne serait pas sorti vainqueur de la guerre de juillet 2006, entre le Hezbollah et Israël. M. Bassil a fait cette déclaration lors d'une tournée très sécurisée au Liban-Sud, dernière en date d'une série de visites polémiques du leader maronite dans les différentes régions du pays.
"Alors que nous célébrons l'anniversaire de la guerre de juillet (qui avait commencé le 12, ndlr), nous vivons pleinement la signification de la souveraineté", a déclaré M. Bassil, dans un discours prononcé dans la localité de Qlaaya, dans le caza de Marjeyoun. "Sans l'unité nationale, nous ne serions pas parvenus à remporter la victoire, a-t-il souligné. "Le Liban a vaincu Israël politiquement et militairement, mais pas économiquement", a-t-il déclaré, soulignant qu'il était du devoir des responsables libanais "d'assurer la résistance économique" du pays.
L'enlèvement de deux soldats par le Hezbollah à la frontière libanaise en juillet 2006 avait déclenché une guerre de 34 jours entre le parti chiite et Israël. Le Hezbollah avait lancé des milliers de missiles contre l'Etat hébreu lors de ce conflit qui a fait plus de 1.200 tués au Liban, civils pour la plupart, et 160 tués, côté israélien, en majorité des militaires. Des négociations parrainées par l'ONU avaient permis de mettre un terme au conflit et abouti à l'adoption de la résolution 1701, qui prévoyait notamment le déploiement de la Force intérimaire de l'ONU au Liban-Sud (Finul).
"Trop tôt pour parler de la présidence"
"Ce qui est le plus important à savoir concernant le CPL, c'est qu'il est au-dessus de tout confessionnalisme et communautarisme, a-t-il lancé. Il défend tous les Libanais contre les attaques, d'où qu'elles viennent". Il a souligné que son parti était "ouvert et qu'il fondait son action sur le principe de l'unité nationale".
S'adressant aux habitants de la région, il a affirmé être conscient du fait "qu'ils ont besoin d'un traitement spécial". "Il est de notre obligation, en tant qu'Etat, d'accorder une attention particulière à votre situation économique", a-t-il souligné.
Lors de la deuxième étape de sa tournée, à Aïn Ebel, Gebran Bassil a affirmé qu'il était encore "trop tôt pour parler de la présidence de la République", à laquelle il aspire selon certains, et que de telles discussions étaient "une perte de temps". "L'heure n'est pas aux ambitions mais au travail", a-t-il ajouté, estimant que ceux qui abordent la question de la prochaine présidentielle "ont pour seul objectif de saboter le mandat actuel", du président Aoun. "Il est plutôt temps, pour le moment, de parler du Parlement, qui va devoir faire face au défi d'adopter un budget de réformes", a-t-il souligné. Les députés ont la responsabilité, selon lui, de prendre des décisions "courageuses et non pas populistes".
La Chambre doit se réunir cette semaine afin d'approuver le texte de loi de finances pour l'année en cours, dont l'étude a été finalisée en commission parlementaire la semaine dernière.
"L'entente dans son sens le plus large"
Depuis Kfour (Nabatiyé), M. Bassil a affirmé que "l'église et la mosquée s'entrelacent dans ce village comme le chrétien et le musulman s'entrelacent au sein du Courant patriotique libre". "Nous vivons cela avec le Hezbollah depuis 2006 et espérons que (cette situation) se prolongera au delà du tandem Hezbollah-Amal afin que nous vivions cette entente dans son sens le plus large", a-t-il ajouté. "Nous avons vu aujourd'hui des drapeaux du CPL et du mouvement Amal s'entrelacer et nous espérons que la relation entre les gens sera semblable à ces drapeaux", a encore dit M. Bassil.
Peu avant cette déclaration, Anouar el-Khalil, député druze au sein du bloc du président du Parlement et chef du mouvement Amal, Nabih Berry, avait adressé une lettre à M. Bassil dans laquelle il lui rappelait une visite qu'il avait effectuée en avril 2018 à Rmeich. Lors de ce meeting électoral à la veille des élections législatives, M. Bassil avait argué du partenariat national pour plaider en faveur du droit des électeurs chrétiens (à Rmeich, Debel, Aïn Ebel et Marjeyoun) à pouvoir choisir leurs députés librement, indépendamment des contraintes démographiques du reste de la circonscription. Il avait également estimé que Rmeich était "menacée sur le plan socio-économique du fait même qu’elle tentait" d’exprimer ses options politiques librement", avant d’appeler les villageois à voter pour la liste qu’il parraine. Ce discours visait implicitement M. Berry et son mouvement.
"Monsieur le ministre, nos régions ne sont fermées à aucun Libanais, (contrairement à) la logique de la plupart de vos discours (...) Nous espérons donc que vous n'auriez pas recours à votre discours habituel, mais plutôt à un discours rationnel qui rassemble les volontés et les cœurs (...), a écrit le député Anouar el-Khalil. Tout le Sud vous observe aujourd'hui pour entendre un discours en harmonie avec notre tissu national".
M. Bassil, également ministre des Affaires étrangères, avait entamé sa tournée en début de journée à Jdeydet-Marjeyoun, dans le caza de Marjeyoun. Il avait été reçu, dans la matinée, par le directeur général de la Sûreté générale, le général Abbas Ibrahim, à son domicile de Kawthriyé el-Sayyad.
Le ministre s'est lancé depuis plusieurs semaines dans une série de visites dans les différentes régions du Liban afin, selon lui, d'y rencontrer ses partisans et d'inaugurer des permanences du CPL. Mais les discours prononcés lors de ces tournées ont provoqué de nombreuses polémiques au cours des derniers week-ends.
Il y a deux semaines, alors qu'il était dans la région de la Montagne, il est revenu sur les incidents de la guerre civile ayant opposé notamment des milices druzes à l'armée et aux milices chrétiennes, ce qui a provoqué la colère de partisans du leader druze Walid Joumblatt, chef du Parti socialiste progressiste. Ces derniers l'ont empêché de se rendre dans plusieurs localités du caza de Aley et le mouvement de contestation a dégénéré en échange de tirs entre des manifestants du PSP et des membres du convoi du ministre d’État pour les Affaires des réfugiés, Saleh Gharib. Celui-ci est membre du Parti démocrate libanais du député druze Talal Arslane, rival de Walid Joumblatt. Au cours de ces affrontements, deux personnes se trouvant dans le convoi de M. Gharib ont été tuées. Depuis ces incidents, le gouvernement ne s'est plus réuni. La semaine dernière, ce sont des propos sur les Forces libanaises, parti chrétien de Samir Geagea, qui ont provoqué la colère des FL.
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commentaires (13)
Juste un dégénéré.
Christine KHALIL
21 h 58, le 16 juillet 2019