Le chef du Courant patriotique libre et ministre des Affaires étrangères, Gebran Bassil, qui est arrivé samedi matin sous haute escorte à la Foire Rachid Karamé de Tripoli, dans le cadre d'une tournée partisane tendue, a affirmé avoir reçu des menaces et a expliqué avoir avancé la date de sa visite en raison de la situation sécuritaire, près d'une semaine après les affrontements armés entre partis druzes rivaux qui ont émaillé sa visite dans le caza de Aley.
"Je suis à Tripoli, cette ville que j'aime et que j'aimerai, malgré ceux qui nous méprisent" a lancé Gebran Bassil, qui était arrivé sous l'escorte de gardes du corps et de militaires armés jusqu'aux dents, dont certains cagoulés.
La visite de M. Bassil était initialement prévue pour demain et risquait d'être annulée en raison des risques sécuritaires, après la mort de deux gardes du corps du ministre d'Etat pour les affaires des Réfugiés, Saleh Gharib, qui accompagnait dimanche dernier le chef du CPL dans sa tournée dans la Montagne druze. Plusieurs rendez-vous prévus à l'agenda de M. Bassil ont finalement été annulés, le leader maronite s'étant finalement uniquement entretenu avec des partisans de sa formation dans la capitale du Nord.
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Des "menaces"
"Nous avons changé la date de la visite pour des raisons sécuritaires et en raison des menaces que nous avons reçues malheureusement. Mais nous n'accepterons pas que le Liban soit divisé", a martelé Gebran Bassil lors d'une allocution qu'il a prononcée devant les membres du CPL.
"Le programme de la visite n'est plus important. Je suis là pour retrouver les militants du CPL. C'est la symbolique de la visite qui compte car nous n'accepterons pas que des lignes rouges soient tracées et que des zones soient interdites de visite. Le Libanais ne se cantonne pas dans une région ou une autre. Il se déplace dans tout le pays. Nous sommes là pour nous exprimer en toute liberté, et je remercie ceux qui se sont rassemblés pour protester contre ma visite, car c'est cela Tripoli : une ville où les gens manifestent pacifiquement", a-t-il ajouté.
Des responsables et notables de Tripoli ont exprimé leur opposition à la visite du chef de la diplomatie. Plusieurs personnes se sont également rassemblées aujourd'hui au niveau du rond-point Nini, à proximité de la Foire Rachid Karamé, pour protester contre la présence du chef du CPL.
"Je ne suis pas étranger à Tripoli. J'y étais un habitué depuis mon plus jeune âge. Nous allions à Tripoli et Tripoli venait à nous. Durant le mois du Ramadan, j'ai assisté à un iftar ici à Tripoli. Je vous promets que je reviendrai à Tripoli prochainement", a souligné Gebran Bassil.
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"Invasion"
"Beaucoup de choses ont été dites à propos de cette visite aujourd'hui mais cela n'en valait pas la peine. Cette tournée est comme toutes les autres que j'effectue ailleurs dans le pays. Mais ils veulent nous éloigner du peuple. Comme vous voyez, c'est une petite visite que j'effectue pour transmettre un message de convivialité . On ne peut pas nous accuser "d'invasion". Nous n'avons jamais participé à la guerre des autres, ni dans la Montagne (druze), ni à Tripoli ni ailleurs. Nous n'avons jamais dressé des barrages pour porter atteinte à la dignité des gens. Nous avons toujours été aux côtés de l'armée contre les milices", s'est-il également défendu.
"Nous ne sommes pas sectaires. C'est en voulant interdire cette tournée qu'on instaure la discorde. Car cette visite avait pour objectif de confirmer le vivre-ensemble, a affirmé le chef du CPL. Ce n'est pas nous qui avons assassiné le Premier ministre originaire de Tripoli", a ensuite lancé Gebran Bassil, dans une allusion à l'assassinat de l'ancien Premier ministre Rachid Karamé le 1er juin 1987 dont le chef des Forces libanaises, Samir Geagea, rival de M. Bassil, avait été tenu pour responsable. M. Geagea, avait été condamné en 1994 à trois peines de mort, toutes commuées en prison à vie pour l'assassinat de quatre personnalités politiques, dont Rachid Karamé. Les milieux des FL avaient alors affirmé que ces procès avaient revêtu un caractère politique sous l'impulsion de l'appareil sécuritaire syro-libanais à l'époque de la tutelle syrienne. M. Geagea sortira en juillet 2005, après l'adoption d'une loi d'amnistie et la Révolution du cèdre qui avait abouti au retrait des troupes syriennes.
Se défendant ensuite de vouloir porter atteinte aux prérogatives du Premier ministre sunnite, Gebran Bassil a ensuite affirmé vouloir "un chef de gouvernement fort afin de bâtir ensemble le Liban". "Nous n'avons pas besoin d'autorisation pour visiter une région ou une autre dans le pays. Il n'y aura pas de retour à la logique de la guerre, mais une marche vers la paix et le vivre-ensemble", a-t-il insisté.
"Aujourd'hui, nous sommes victorieux pour Tripoli, avec les habitants de Tripoli", a conclu M. Bassil, en évoquant des projets de développements pour la capitale du Nord.
En fin de journée, lors d'un rassemblement partisan à Cheikh Taba, dans le Akkar, Gebran Bassil a déclaré que "le CPL fédèrera tous les Libanais", affirmant qu'il "visitera toutes les régions du pays. "Certains ont voulu placer des obstacles pour nous empêcher de venir jusqu'ici mais nous les avons surmontés", a-t-il ajouté.
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Sur Twitter, le leader druze Walid Joumblatt, qui entretient des relations extrêmement tendues avec le CPL de M. Bassil, surtout après les affrontements de dimanche dernier, a critiqué la visite du chef de la diplomatie. "S'il y a une région délaissée au Liban, c'est bien Tripoli. Elle a besoin de beaucoup plus qu'une route des Saints (en allusion au projet prôné par M. Bassil, ndlr). (...) Tripoli n'a pas besoin de partis politiques démagogiques", a affirmé M. Joumblatt.
Pour leur part, les FL ont estimé, par communiqué interposé, que le discours du chef de la diplomatie "invite à la sédition de manière imprudente" et "évoque un retour à la guerre libanaise". "Le ministre Bassil affirme qu'il ne veut pas que le pays se retrouve divisé en cantons, alors qu'en réalité, il est celui qui œuvre le plus à diviser le pays, ont souligné les FL dans leur communiqué. Il y a quelques semaines il s'est confronté aux sunnites, ensuite la semaine dernière, il a provoqué un conflit au sein de la communauté druze qui a couté la vie à deux personnes, cela alors qu'il a alimenté plusieurs querelles avec la communauté chiite". Le parti de Samir Geagea a encore accusé le chef du CPL d'"avoir consacré tous ses efforts ces dernières années à diviser les chrétiens à travers sa guerre continue envers les FL, que ce soit lors de la formation de gouvernements, des discussions administratives ou concernant les réformes".
Dimanche dernier, Gebran Bassil, en tournée dans le caza de Aley, avait été empêché d'entrer dans le village de Kfarmatta par des partisans de Walid Joumblatt, qui lui reprochaient des propos provocateurs sur la guerre de la Montagne ayant opposé les factions pro-palestiniennes, dont les druzes, à l'armée et aux factions chrétiennes dans les années quatre-vingt. Par la suite, le convoi de Saleh Gharib, ministre d’État pour les Affaires des réfugiés et affilié à la formation de Talal Arslane, rival traditionnel de M. Joumblatt, a été pris pour cible par des tirs venus des partisans du chef du Parti socialiste progressite. Deux personnes ont été tuées, deux gardes du corps de M. Gharib, lors de cet échange de tirs.
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commentaires (15)
LE GAZ METHANE S,ECHAPPE DE L,ECHAPPEMENT, EMPESTE L,ATMOSPHERE ET TOUT LE MONDE FUIT LOIN DE L,EXHALAISON MALSAINE.
LA LIBRE EXPRESSION
15 h 33, le 08 juillet 2019