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À La Une - Terrorisme

Un quatrième Français condamné à mort en Irak pour appartenance à l'EI

Paris a dit mener les "démarches nécessaires" pour rappeler à Bagdad son opposition à la peine de mort.


Un pan de mur aux couleurs du groupe Etat islamique à Mayadine, en Syrie. Photo AFP/STRINGER prise en 2017

Un quatrième Français, ancien militaire en Afghanistan, a été condamné à mort lundi en Irak pour appartenance au groupe Etat islamique (EI), tandis qu'un autre a été envoyé devant la médecine légale après s'être plaint d'avoir été frappé par ses interrogateurs.

Le verdict contre Mustapha Merzoughi, 37 ans, intervient au lendemain de la condamnation à mort de trois de ses compatriotes, un jugement inédit contre des Français en Irak, où plus de 500 étrangers de l'EI ont déjà été condamnés. Si la loi prévoit jusqu'à la mort pour quiconque ayant rejoint une organisation "terroriste" --qu'il ait combattu ou non--, aucun jihadiste étranger n'a jusqu'ici été exécuté. Ces verdicts pourraient relancer le débat sur l'épineuse question des jihadistes étrangers: leur retour dans leur pays d'origine suscite un vif rejet de l'opinion, mais dans le même temps, ces Etats refusent la peine de mort.

Kévin Gonot, Léonard Lopez et Salim Machou, condamnés dimanche, et Mustapha Merzoughi, ont 30 jours pour faire appel. Lundi, d'autres Français ont comparu. Le procès de Fodil Tahar Aouidate, qui a affirmé avoir été frappé par ses interrogateurs, a été renvoyé au 2 juin pour qu'un examen médical soit effectué, tandis que la prochaine audience de Vianney Ouraghi, Bilel Kabaoui et Mourad Delhomme a été fixée au 3 juin. Au total douze Français seront jugés en Irak après avoir été remis à Bagdad par une alliance arabo-kurde de Syrie fin janvier.

Paris a dit mener les "démarches nécessaires" pour rappeler à Bagdad son opposition à la peine de mort. "Nous n'allons pas demander au gouvernement irakien de surseoir à cette condamnation à mort, en revanche, aujourd'hui toutes les voies de recours ne sont pas épuisées", a ajouté sur la chaîne BFM TV la porte-parole du gouvernement, Sibeth Ndiaye.




(Pour mémoire : Qui sont ces Français que l'Irak va juger pour appartenance à l'EI?)



"Je demande pardon"
Mustapha Merzoughi, ancien soldat de l'armée française, entre 2000 et 2010, a notamment servi "en Afghanistan en 2009" selon ses "aveux". "Les preuves et les aveux démontrent bien que vous avez adhéré au groupe Etat islamique et travaillé dans sa branche militaire. En conséquence, vous êtes condamné à la mort par pendaison", a statué le juge.

Durant l'audience, Mustapha Merzoughi, qui s'est exprimé en arabe avec un accent tunisien avant de demander un interprète, a demandé pardon. "Je ne suis pas coupable de crimes et de meurtres, je suis coupable d'être parti là-bas" en Syrie, a-t-il dit, avant d'ajouter: "Je demande pardon au peuple irakien, au peuple syrien, à la France et aux familles de victimes". En France, il a vécu à Toulouse (sud-ouest), d'où venaient aussi les frères Fabien et Jean-Michel Clain, qui ont revendiqué les attentats du 13 novembre 2015 (130 morts) avant d'être tués récemment en Syrie.

Celui qui se faisait appeler Abou Omrane al-Faranssi au sein de l'EI a dit au juge avoir suivi "des formations obligatoires religieuses et militaires à Mossoul" avant de se voir remettre "une Kalachnikov et un salaire mensuel de 200 dollars". Lors des interrogatoires de l'instruction irakienne, il avait affirmé avoir avoir "prêté allégeance devant un chef de l'EI" masqué à Mossoul car "les chefs avaient peur d'être reconnus ou identifiés par les combattants étrangers dont ils redoutaient qu'ils soient des espions". Lors de son audience lundi, il a nié avoir prêté allégeance à l'EI. "J'ai eu beaucoup de problèmes en France, c'est pour ça que je suis parti: la propagande de l'EI promettait une maison, un salaire, le mariage...", a-t-il répété. "Je n'ai pas la sensation d'être un terroriste."



(Pour mémoire : Recrutés en ligne, formés en Syrie, jugés en Irak: premiers "aveux" de Français)



"Risques de torture"
Passé après lui à la barre, Fodil Tahar Aouidate, vêtu de l'uniforme jaune des prisonniers en Irak, a affirmé avoir été frappé par ses interrogateurs pour "avouer ce qu'ils réclamaient". Le juge a ordonné un examen médical et un rapport pour la prochaine audience.

Des défenseurs des droits humains ont dénoncé ces derniers mois "de vrais risques de torture" et "aucune garantie pour des procès équitables" en Irak, 12e pays le plus corrompu au monde selon Transparency International.

L'avocat français d'un des condamnés de dimanche, Me Nabil Boudi, a annoncé dès dimanche interjeter appel, dénonçant une "justice expéditive". "On condamne à la peine capitale (...) sur la base uniquement d'interrogatoires dans des geôles à Bagdad", a-t-il dit à l'AFP. "Le ministère des Affaires étrangères nous avait pourtant garanti que les Français auraient droit à un procès équitable".

En 2018, l'année qui a suivi la déclaration de la "victoire" sur l'EI en Irak, les tribunaux irakiens ont ordonné au moins 271 peines capitales, soit quatre fois plus qu'en 2017, selon Amnesty International. Mais dans les faits, Bagdad --qui reste parmi les cinq pays ordonnant le plus de peines de mort au monde-- a exécuté moins de condamnés. En 2018, 52 personnes ont été pendues, contre 125 en 2017.

Avant dimanche, trois Français avaient déjà été reconnus coupables d'avoir rejoint l'EI en Irak et condamnés à la perpétuité (20 ans de détention en Irak).

Récemment, Bagdad s'est proposé de juger également le millier d'autres jihadistes étrangers aux mains des Kurdes en Syrie. En échange de deux milliards de dollars, réclamés à leurs pays d'origine.



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