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Lifestyle - This is America

La mode « gender bending », au-delà du temps et des genres

Ni unisexe ni masculin/féminin, cette mode qui crée le « awe », l’énigme et le flou artistique s’expose au Museum of Fine Arts à Boston.

Ensemble Adidas, Jeremy Scott.

Un ensemble mi-smoking, mi-Pierrot créé par le duo Victor&Rolf pour le spectacle One Woman Show, présenté par l’actrice androgyne Tilda Swinton, le smoking arboré par la bisexuelle Marlene Dietrich (qui disait souvent : « De cœur, je suis un

gentleman ») et une robe du soir Jeanne Lanvin des années 30, expérimentant la salopette au féminin, donnent le ton d’une spectaculaire exposition organisée par le Museum of Fine Arts à Boston et intitulée « Gender Bending Fashion » (la mode au-delà des genres). Ouverte au public jusqu’au 25 août prochain, elle présente, selon les mots de la curatrice Michelle Finamore, « plus de 60 créations contemporaines ayant repoussé les frontières établies de l’habillement, aux côtés de dizaines de tenues et de photos datant du XXe siècle. Le tout illustre une riche histoire de bouleversement et de “flou artistique”, qui a tenté de transcender, durant les cent dernières années, la traditionnelle division entre les vêtements pour hommes et ceux pour femmes ». Avec, surtout, des coups de maître qui, de leur griffe célèbre, ont marqué la haute couture et dont les auteurs et les pièces sont devenus iconiques : Jean-Paul Gaultier, Rudi Gernreich, Rad Hourani, Rei Kawakubo (pour Comme des Garçons), Yves Saint Laurent, Alessandro Michele (pour Gucci), Rick Owens, Wale Oyéjidé (pour Ikiré Jones), Christian Siriano, Alejandro Gómez Palomo et Alessandro Trincone.

« Dandy queens »

Ces œuvres artistiques, car elles sont plus que des vêtements, on les retrouve dans cette exposition, de même que les inspirations et la magie de ces pièces souvent éblouissantes. Arrêts, dans le désordre, sur un smoking noir dont l’une des jambes du pantalon est une jupe plissée (Yohji Yamamoto, 2007) ; une robe-manteau en cuir noir, unisexe, stricte mais aux multiples découpes (Rad Hourani, 2012) ; quatre dandy queens noires en costumes gris (Prisca Monnier, 2014) ; un ensemble pantalon rouge à traîne (Christian Siriano, 2018) ; un ensemble baptisé Adidas, avec une veste rouge de toréador portée sur le pantalon training de la marque…

Et, bien avant tout ce mix and match des actuelles grandes griffes, le smoking de la maison française Louise Chéruit, lancé en 1927. C’est en fait une robe courte évasée en voile, à encolure en V profond, couverte de paillettes noires de différentes tailles, reflétant l’éclat de cette tenue masculine du soir. Le summum de cette fascinante rétrospective est une robe signée Alessandro Trincone. Dévoilée en 2017, cette explosion de multiples pièces de tissu gris-bleu s’épanouissant comme une fleur a été arborée par le rappeur américain Young Thug.

Mutations sociales

Ces tendances baptisées gender-neutral, gender-fluid ou encore unisexe ont été assimilées par la haute couture durant la dernière décennie et ont été adoptées par les stars de Hollywood des deux sexes qui les ont mises en avant sur tous les tapis rouges du monde.

Plus qu’une simple documentation de styles et de courants, la rétrospective « Gender Bending Fashion » a voulu explorer la manière dont les tenues ont évoqué et accompagné les mutations sociales qui ont eu lieu au siècle dernier : en particulier le rôle des hommes et des femmes, l’égalité raciale, les droits des LGBT et la montée des réseaux sociaux comme instruments de la libre expression de soi. De nombreuses histoires de designers et de personnes qu’ils ont habillées, dont des célébrités dans tous les domaines, émergent ainsi de cette galerie de vêtements de lumière. Des histoires d’émancipation et d’idées, d’identité et d’expression sexuelles, de classe, de race, de culture pop, d’activisme et de justice sociale : c’est un courant toujours d’actualité, comme prouvé dans un espace prolongeant le cadre même de l’exposition. Nommé « The Fashion and Gender Lab », il comprend une bibliothèque et un lieu où les visiteurs peuvent livrer leurs réactions, une fois leur tournée terminée. Ils peuvent également y consulter un album digital composé de photos et de témoignages de personnes vivant dans les environs de Boston et ayant opté pour un look sans connotation spécifique. Le Museum of Fine Arts, qui avait ouvert ses portes à Boston en 1876, et toujours connu pour son fort traditionalisme, à l’instar de la ville qui l’héberge, vient donc de faire un grand virage en direction du concept de l’open society.

Les organisateurs de l’exposition précisent à ce sujet que vu leur approche de la mode, à la lumière de ce nouvel éclairage, il leur a fallu repenser sa présentation et son format. Ils ont notamment commandé de nouveaux mannequins en bois, dans les tons de gris, avec une silhouette neutre, pouvant aussi bien être masculins que féminins. « D’autant plus, disent-ils, que l’exposition coïncide avec un temps où l’on discute de plus en plus des différentes perceptions des genres. » Et non du sexe des anges.


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Une pure horreur...

LeRougeEtLeNoir

16 h 20, le 17 mai 2019

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Commentaires (1)

  • Une pure horreur...

    LeRougeEtLeNoir

    16 h 20, le 17 mai 2019

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