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Moyen Orient et Monde - Décryptage

À Gaza, les risques d’une escalade incontrôlable

Une flambée de violence inédite depuis 2014 a débuté vendredi, faisant 27 morts côté palestinien, dont un commandant de terrain, et quatre côté israélien.


De la fumée au-dessus de Gaza après une frappe israélienne. Mohammed Salem/Reuters

Un territoire de près de deux millions de personnes qui subit un blocus depuis plus de dix ans. Un gouvernement israélien qui ne cesse de se « droitiser », dirigé par un Premier ministre dont l’objectif premier est de dépolitiser les Palestiniens et de rendre impossible une solution à deux États. Un médiateur égyptien qui n’a ni les moyens ni la volonté de contrôler les différents groupes armés à Gaza. Deux formations islamistes, le Hamas et le Jihad islamique, dont la légitimité repose en grande partie sur leur combat contre l’État hébreu et qui ne peuvent pas se permettre de voir la situation constamment se détériorer sans réagir. Et enfin, un timing adéquat : Benjamin Netanyahu est en train de former son gouvernement et Israël doit accueillir l’Eurovision à partir du 14 mai, quelques jours après les célébrations de la fête nationale. L’équation de base est toujours la même depuis des mois : personne n’a intérêt à la guerre, mais tous les ingrédients sont pourtant réunis pour une escalade entre les deux partis.

Cette nouvelle escalade, qui a débuté vendredi et qui se poursuivait hier dans la soirée, est la plus importante depuis le conflit de 2014. Selon l’armée israélienne, plus de 600 roquettes et missiles ont été tirés depuis vendredi par les groupes palestiniens depuis Gaza, dont 150 ont été interceptés par le système antimissile Dôme d’acier. Israël a riposté en frappant 260 cibles à Gaza. Les frappes israéliennes ont fait au moins 27 morts depuis vendredi dans l’enclave, dont 14 civils. Parmi eux, se trouvaient deux femmes enceintes et un bébé. Côté israélien, le bilan est passé dans la soirée à quatre morts civils. La flambée de violence a débuté vendredi quand un combattant du Jihad islamique a blessé deux militaires israéliens en bordure de la bande de Gaza. En réponse, l’armée israélienne a tué quatre Palestiniens, dont deux membres du Hamas. Après quoi, les roquettes ont commencé à pleuvoir.

« Un voisin a reçu samedi un appel en arabe d’une personne des forces de sécurité israéliennes pour nous prévenir d’évacuer le quartier », raconte Racha Abouchaaban, 33 ans, contactée par L’OLJ via WhatsApp. Cette humanitaire raconte comment tous les habitants de son immeuble, dans le quartier résidentiel de Rahal, ont dû courir se réfugier dans un garage à quelques encablures de chez eux, samedi à la tombée de la nuit. « On est descendus sous le choc sans rien prendre avec nous, je me suis juste assurée que mes parents nous suivaient. Six ou sept immeubles ont été évacués », explique-t-elle. Après deux heures d’attente, des F16 auraient largué leurs missiles sur l’immeuble jouxtant celui de la famille Abouchaaban, le réduisant en miettes. « J’ignore ce qu’ils visaient précisément dans cet immeuble, mais on ressent cela comme une punition générale. En sortant de l’abri, il y avait de la poussière, des débris des vitres cassées. C’était un moment vraiment difficile à vivre », raconte-t-elle. Les frappes israéliennes ont visé des Palestiniens tirant des roquettes, des ateliers de fabrication de roquettes, des entrepôts d’armes dissimulés parmi la population, des positions et des bases militaires, un immeuble présenté comme le QG des cyberattaques du Hamas ainsi qu’un tunnel d’attaque du Jihad islamique près de la ville de Rafah qui débouchait du côté israélien, a rapporté l’armée israélienne.



(Lire aussi : Le plan de paix israélo-palestinien de Trump ne devrait pas évoquer les "deux Etats")



« Des explosions non-stop »
Israël accuse le Hamas, qui gouverne Gaza, d’être incapable de contrôler le Jihad islamique, qui entretient des liens étroits avec l’Iran, la bête noire de l’État hébreu. Pour la première fois depuis cinq ans, Israël a mené hier un « assassinat ciblé » contre un responsable du Hamas, qui a confirmé que l’un de ses commandants, Hamed Ahmad el-Khodary, a été tué par un missile alors qu’il se trouvait en voiture. Le porte-parole de l’armée israélienne, Ronen Manelis, a affirmé sur Twitter que le responsable en question était chargé des transferts de fonds d’Iran vers la bande de Gaza. En revanche, Israël a démenti que la mort samedi d’un bébé de 14 mois et d’une de ses tantes enceinte, d’abord présentée comme sa mère, ait été le fait d’une de ses frappes, comme l’a annoncé le ministère gazaoui de la Santé relevant du Hamas. « Elles sont mortes par la faute d’une roquette tirée par le Hamas et qui a explosé là où elle n’aurait pas dû », a dit un porte-parole de l’armée israélienne, le lieutenant-colonel Jonathan Conricus.

Côté gazaoui, les bombardements se poursuivaient hier, faisant craindre le pire à la population. « En 2014, les drones israéliens étaient une sorte d’avertissement avant une attaque de grande ampleur contre un bâtiment, mais là, ils frappent parfois des habitations sans préavis », affirme Mohammad Smiry, un journaliste gazaoui, également contacté. « J’espérais que les choses se calmeraient et je ne m’attendais pas à cette escalade, confie de son côté Omar Ghraib, un activiste palestinien contacté sur Twitter. Hier après-midi, j’allais sortir pour acheter de la glace lorsqu’il y a eu une forte explosion dans mon quartier. » « Il y a des explosions non-stop, de la fumée partout, les enfants sont effrayés et les gens dans la rue semblent hagards et déboussolés. Nous n’avons pas d’abris à Gaza », poursuit Omar Ghraib.



(Lire aussi : Israël-Palestine, un espace d’apartheids...)



Les fonds qataris
En pleine formation de son gouvernement, Benjamin Netanyahu ne peut pas afficher des signes de faiblesse. Le Premier ministre israélien a ordonné la poursuite de « frappes massives » et l’envoi de renforts militaires autour de la bande de Gaza, mais » Bibi « a cherché à éviter ces derniers mois une nouvelle guerre à Gaza – sans pour autant faire de réelles concessions au Hamas – et a plutôt intérêt à ce que le calme revienne vite. Le Hamas, qui sait qu’une nouvelle guerre lui serait extrêmement coûteuse, pourrait également chercher à trouver une porte de sortie à condition d’obtenir quelque chose en retour. Les fonds provenant du Qatar, destinés à payer les salaires d’environ 40 000 fonctionnaires du Hamas et à aider les familles pauvres résidant à Gaza, auraient eu du retard dans leur versement mensuel. Cet argent est transféré avec l’aval d’Israël qui cherche à dissiper les tensions. Le ministère israélien des Affaires étrangères a tenu samedi à souligner qu’ « Israël n’a pas empêché le transfert de l’argent qatari ».

« Israël ne veut pas que les Palestiniens protestent aux frontières de Gaza et, en même temps, ils empêchent les Gazaouis de jouir de leurs droits fondamentaux », dénonce Mohammad Smiry. « Les bombardements sont incessants, et forcément, les souvenirs de 2014 nous reviennent à la figure. C’est la panique, surtout qu’on entend circuler l’information d’une invasion terrestre », poursuit de son côté Racha Abouchaaban. La guerre de 2014 avait fait plus de 2 000 morts côté palestinien, en majorité des civils, et plus de 70 morts côté israélien, en majorité des militaires. En novembre dernier, une confrontation sévère entre les deux parties avait fait craindre une nouvelle guerre, avant de se solder après quelques jours par un cessez-le-feu. « On a cru que cette fois-ci encore, Israël viserait uniquement des sites militaires puisqu’une trêve serait signée, mais apparemment, ce n’est pas ce qui se profile », confie de son côté Ala Salam, contactée via WhatsApp.



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LES PALESTINIENS NE FONT QUE LE JEU D,ISRAEL. ON DIRAIT DES HABAYEB !

LA LIBRE EXPRESSION

12 h 07, le 06 mai 2019

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Commentaires (3)

  • LES PALESTINIENS NE FONT QUE LE JEU D,ISRAEL. ON DIRAIT DES HABAYEB !

    LA LIBRE EXPRESSION

    12 h 07, le 06 mai 2019

  • Donc, on continue le même scénario: provocation de la part du " Jihad islamique" ou autres héros, sachant qu'Israël ripostera...amenant morts, blessés et destructions, surtout à Gaza, comme toujours ! Pourquoi ces héros du Jihad, voyant que cela dure depuis des années, sans résultats bénéfiques pour eux...n'essayent-ils pas d'agir autrement, avec plus d'intelligence et de ruses, d'autres moyens plus subtiles et déroutant l'adversaire israélien ? Ou ne sont-ils capables que d'envoyer des roquettes par centaines etc., plus spectaculaires il est vrai...mais apparemment inefficaces pour leur cause ??? Irène Saïd

    Irene Said

    10 h 04, le 06 mai 2019

  • La flambée de violence a débuté vendredi quand un combattant du Jihad islamique a blessé deux militaires israéliens en bordure de la bande de Gaza. En réponse, l’armée israélienne a tué quatre Palestiniens, dont deux membres du Hamas. Après quoi, les roquettes ont commencé à pleuvoir. A quoi s'attendait le Hamas ou le Jihad Islamique en tirant sur les soldats Israeliens? ET IL Y AURA TOUJOURS DES GENS QUI DIRONT QUE ISRAEL ASSASSINNE LES PALESTINIENS AU MOINS DANS LA SUITE DE L'ARTICLE IL EST DIT QUE ISRAEL AVERTI LES GAZAOUIS DE QUITTER UN LIEU AVANT DE LE BOMBARDER CE N'EST PAS CE QU'A FAIT ASSAAD EN SYRIE DURANT DES ANNEES OU IL BOMBARDAIT A TOUT VA LES TERRORISTES ET LES CIVILS SANS DISCERNEMENT ESPERONS QUE LE LIBAN SAURA EVITER DE LANCER LE PREMIER COUP DE FEU POUR NE PAS AVOIR A SUBIR UN DELUGE DE FEU LIBAN D'ABORD

    LA VERITE

    03 h 32, le 06 mai 2019

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