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À La Une - polémique

En Grèce, des réfugiés désemparés doivent quitter leurs logements

"Je ne sais pas comment je vais me débrouiller et j'ai peur de finir à la rue avec ma famille", affirme Abdullah, un Afghan qui vit à Athènes. 

Un mère et son enfant devant des tentes installées à Athènes après leur expulsion d'un squat dans le quartier d'Exarchia, le 19 avril 2019. Photo AFP / Louisa GOULIAMAKI

Des milliers de réfugiés désemparés attendent leur éviction possible de leurs logements en Grèce pour laisser la place aux demandeurs d'asile confinés sur les îles grecques.

"Dans deux mois, je dois quitter les lieux", se lamente Abdullah Ahmadi, un Afghan qui vit avec sa femme et ses cinq enfants dans un appartement en banlieue proche d'Athènes. Comme lui, près de 6.800 personnes dans toute la Grèce sont potentiellement affectés par la décision du gouvernement grec d'expulser les réfugiés ayant obtenu l'asile depuis plus de six mois.

"Cela fait trois ans que je cherche du travail en Grèce et je ne trouve que des petits boulots qui ne suffisent pas à faire vivre ma famille", lâche Abdullah qui a passé près d'un an sur l'île de Lesbos avant de pouvoir rejoindre la capitale grecque.

Au 31 mars, quelque 160 réfugiés ont dû laisser leurs logements attribués dans le cadre du programme Estia financé par l'Union européenne et mis en place par le Haut Commissariat aux Réfugiés de l'ONU (HCR) et des ONG locales. "Dès le départ, ce programme a été conçu pour aider les demandeurs d'asile uniquement : après l'obtention de leur asile, les réfugiés doivent théoriquement dans les six mois suivants quitter les logements, mais jusqu'à présent, le gouvernement grec n'avait pas appliqué ce principe", explique le porte-parole du HCR en Grèce, Boris Cheshirkov. Mais avec l'engorgement des îles grecques de la mer Egée, où les migrants sont confinés à leur arrivée de Turquie, le gouvernement veut transférer sur le continent autant de demandeurs d'asile que possible.

Avec près de 9.000 arrivées depuis le début de l'année 2019, le nombre de réfugiés augmente de nouveau en Grèce, après avoir chuté en 2017 et 2018, et la situation dans les îles, en particulier à Lesbos et à Samos, est explosive.


(Pour mémoire : En Grèce, des bibliothèques pour étancher la soif de lecture des réfugiés)


"Non aux évictions" 
"Les moins de 200 personnes qui vont quitter leurs logements vont libérer des places pour ceux qui se trouvent à Lesbos et à Samos dans des conditions difficiles", a déclaré le ministre de l'Immigration, Dimitris Vitzas, dans une interview à la radio "News 24/7", fin mars.

"Non aux évictions, passons à l'action !", proclamait une pancarte lors d'un rassemblement récent de protestation, place Victoria, dans un quartier multiculturel d'Athènes, soutenu par des militants d'extrême gauche, des étudiants et des employés d'ONG.

"Les premières expulsions ont eu lieu il y a quelques jours et les prochaines auront lieu en juin", s'est inquiété Christina Svana, employée d'une ONG, lors de cette manifestation. "Le mouvement va s'accélérer et nous avons peur que parmi les personnes expulsées, une grande majorité ne puisse pas se débrouiller seule pour trouver un appartement."

"Je ne sais pas comment je vais me débrouiller et j'ai peur de finir à la rue avec ma famille", ajoute Abdullah désemparé.

"Ceux qui ont reçu l'asile peuvent bénéficier des aides sociales comme tous les Grecs" en situation de pauvreté, avec notamment une aide au logement, assure-t-on au ministère de l'Immigration.

Par ailleurs, pendant trois mois après avoir quitté les logements, "les réfugiés conserveront l'aide économique dont ils bénéficient, et seront aidés pour obtenir un numéro fiscal, ouvrir un compte en banque, s'inscrire à pôle-emploi", ajoute-t-on au ministère. Pourtant, Abdullah semble tout ignorer de la procédure à suivre pour obtenir une allocation sociale : "je n'en ai jamais entendu parler", soupire-t-il.

"Théoriquement, c'est bien de dire que les réfugiés doivent s'intégrer et ne plus dépendre des aides fournies par les associations et le HCR mais pour cela il fallait prévoir un programme d'intégration", s'indigne encore Christina. "Depuis trois ans il est balbutiant et ce n'est que maintenant que des choses concrètes commencent à être mises en place."

"Médecins Sans Frontières" déplore également qu'"il n'y ait pas de solutions réalistes pour les réfugiés qui vont laisser leur logement ou perdre leur aide économique", selon un communiqué.

Fin 2018, en Grèce continentale, 22.686 personnes étaient hébergées grâce au programme Estia. Actuellement, la Grèce accueille plus de 70.000 réfugiés dont près de 15.000 sur les îles égéennes.



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