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Moyen Orient et Monde - Élections israéliennes

Duel Netanyahu/Gantz : « Si quelqu’un veut te tuer, frappe d’abord »

Les législatives qui ont eu lieu hier ont pris l’allure d’un référendum pour ou contre la reconduite de Benjamin Netanyahu à la tête du pays. Reflet d’une nation profondément fracturée.

À Tel-Aviv, à la soirée électorale du Likoud, le parti du Premier ministre Benjamin Netanyahu, les militants sont absents et les journalistes innombrables. Tous les téléphones portables résonnent au même moment : « Nous avons gagné ! » déclare triomphant Benny Gantz, qui mène la formation centriste Bleu et Blanc, dans un communiqué. Entré en politique il y a seulement quatre mois, cet ancien chef d’état-major, doté d’une solide carrière militaire mais d’une expérience politique embryonnaire, a rapidement su s’imposer comme principal rival de l’indétrônable « Bibi ».

Mais les cris de victoire sont précoces. Au moment d’écrire ces lignes, les premières estimations donnent toujours les formations de ces deux candidats au coude-à-coude. Plus tôt dans la journée, un soleil de plomb frappait l’école Adam de Jérusalem-Ouest, réquisitionnée pour servir de bureau de vote. À l’entrée, une bénévole du Likoud à la peau parcheminée harangue les derniers indécis : « Netanyahu est l’un des rares leaders de ce monde qui peut parler à la fois à Trump et à Poutine », lance Carolyn Tal aux passants qui veulent bien l’écouter. À l’intérieur, face au terrain de basket, ils sont une poignée de badauds à attendre en file indienne. « Je n’ai toujours pas décidé pour qui voter », soupire Shani, une thérapeute de 35 ans. « La plupart de mes amis ne savent pas non plus. Tout ce que je sais, c’est que je ne veux plus de Netanyahu », conclut-elle avant d’entrer dans l’isoloir.

Alors que le pays avait rendez-vous pour voter, l’actuel Premier ministre n’a pas manqué d’inonder tous les canaux de communication. M. Netanyahu a une nouvelle fois usé de la tactique dite du « gevalt », une expression yiddish qui pourrait être traduite comme « au secours ». Sur les plateaux de télévision ou les réseaux sociaux, Bibi a tiré la sonnette d’alarme en prétendant que les sondages le donnaient perdant, et qu’il fallait absolument que ses soutiens se rendent en masse aux urnes pour voter pour son parti. Paradoxalement, ce « blitz » médiatique pourrait s’avérer contre-productif si jamais trop d’électeurs s’étaient détournés des plus petits partis de droite pour voter Likoud. Le risque étant que ces partis n’atteignent dès lors pas le seuil électoral fixé à 3,25 %, réduisant par conséquent les chances du Likoud de former une majorité. Car le système israélien fait que le vainqueur des élections n’est pas nécessairement le plus grand parti, mais le plus grand bloc de partis, capable de former une majorité parlementaire d’au moins 61 sièges sur 120. Un Likoud fort mais dépourvu du soutien des plus petites listes de droite pourrait hypothétiquement passer dans l’opposition.


(Lire aussi : L’histoire arabe de Benjamin Netanyahu)


« Un débat limité au niveau de brutalité »

La campagne qui s’est donc achevée hier a été décrite comme particulièrement virulente, rythmée d’attaques personnelles et dépourvue du moindre grand débat d’idées, le tout dans un contexte de droitisation toujours plus évidente du paysage politique. Là où, historiquement, le clivage gauche-droite se dessinait essentiellement sur les réponses à apporter à la question palestinienne, le virage à droite, particulièrement marqué depuis le dernier scrutin de 2015 et qui a déplacé la ligne de facture entre le centre et la droite dure, semble avoir fini d’achever une gauche moribonde tout en évacuant complètement les Palestiniens du débat public. Si ce n’est une déclaration laconique mais retentissante de Benjamin Netanyahu qui évoquait lors d’une interview télévisée samedi soir sa volonté, en cas de victoire, d’annexer les colonies israéliennes de Cisjordanie, territoire occupé depuis un demi-siècle.

« Ces élections sont importantes car elles confirment quelque chose de profond – et de très pourri. L’enjeu de ce scrutin n’est pas le changement, mais un vote de confiance retentissant en faveur de la préservation de la situation actuelle : un présent et un avenir de nouvelle oppression, dépossession et contrôle de millions de droits fondamentaux refusés aux Palestiniens, avec un débat limité au niveau de brutalité qui peut être utilisé, » estime, cinglant, Hagai al-Had, directeur de l’ONG israélienne B’Tselem.

S’il était réélu, M. Netanyahu, 69 ans dont plus de 13 au pouvoir, pourrait battre le record de longévité établi par le fondateur de l’État d’Israël, David Ben Gourion. À condition qu’il survive aux affaires de corruption, fraude et abus de confiance qui menacent son règne.

« Bibi est pourri, il sent le poisson ! Il a déjà été au pouvoir pendant treize ans, ça suffit. Il nous faut des gens différents », s’exclame Yaffa Vaknin. Mèches blondes, veste en jeans, vernis écarlate, cette sexagénaire est la première arrivée à la soirée électorale de Bleu et Blanc, à cinq minutes à pied seulement de celle organisée par le Likoud dans le nord de Tel-Aviv. « Gantz aurait tout de même pu mener une meilleure campagne. Il aurait dû combattre plus salement. Vous pensez que Bibi a été doux ? En hébreu on dit : si quelqu’un veut te tuer, frappe d’abord. »


Repère 

Les principaux acteurs des élections israéliennes


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commentaires (5)

On peut dire ce que l'on veut sur le 3adou al Israili, mais sa democratie cree bien des envieux! Dans quel Pays du M-O on peut se targuer d'elections ou TOUTES les tendances sont en ligne? Et ou tous les citoyens, tous, ont droit au vote....

IMB a SPO

22 h 55, le 10 avril 2019

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Commentaires (5)

  • On peut dire ce que l'on veut sur le 3adou al Israili, mais sa democratie cree bien des envieux! Dans quel Pays du M-O on peut se targuer d'elections ou TOUTES les tendances sont en ligne? Et ou tous les citoyens, tous, ont droit au vote....

    IMB a SPO

    22 h 55, le 10 avril 2019

  • Peut-on parler de "profonde fracture" lorsqu'il s'agit d'un système électoral dit "à la proportionnelle", très démocratique, car il prend en compte tous les petits partis politiques et minorités, y compris palestinienne. Bien des démocrates français, y compris de la Gauche, ont souhaité introduire ce système à la proportionnelle en France. Au Liban, il légitimerait la prise en compte politique des minorités, sans leur donner un caractère exclusivement religieux.

    Saab Edith

    15 h 52, le 10 avril 2019

  • Des paranos se posant toujours en victime!Sauf que plus personne, sauf quelques niais et niaises, ne digère leurs salades. Le proverbe les concernant serait plutôt "Frappe d'abord et tue quand même!"

    Tina Chamoun

    09 h 25, le 10 avril 2019

  • ILS SONT EXPERTS DANS LES COUPS BAS !

    LA LIBRE EXPRESSION

    09 h 11, le 10 avril 2019

  • Au moins ils peuvent voter leurs leaders hors du pouvoir, nos voisins du sud! La boudda an yastajiba l'kadar!

    Wlek Sanferlou

    02 h 19, le 10 avril 2019

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