Au cœur des entretiens du secrétaire d’État américain avec les responsables libanais, le dossier des frontières maritimes et terrestres continue de diviser le pays. Après David Hale, Rex Tillerson et David Satterfield, Mike Pompeo a proposé une nouvelle fois, la semaine dernière lors de son passage à Beyrouth, aux dirigeants libanais de dissocier les frontières maritimes des frontières terrestres. Il leur a donc soumis une proposition qui leur avait déjà été faite et qu’ils avaient alors refusée. Cette fois, le dirigeant américain a ajouté quelques détails destinés à séduire les Libanais. L’idée principale, selon ce que les Américains ont dit aux Libanais, est de régler les différends terrestres au plus vite, de manière à procéder à des échanges de territoires au niveau des 13 points conflictuels que la ligne bleue dessinée en 2000 avait gardés en suspens. Quant au dossier des frontières maritimes, il serait confié à une commission d’arbitrage internationale qui trancherait le conflit sur les 850 km2 que le Liban réclame et que les Israéliens souhaitent partager avec lui. En attendant la décision de l’arbitrage, des sociétés internationales prendraient en charge l’exploitation de cette superficie et le partage des recettes entre les Libanais et les Israéliens se ferait par la suite selon la décision de l’arbitrage.
En principe, cette proposition est destinée à faire avancer les discussions pour permettre au Liban et à Israël de commencer à exploiter les ressources gazières contenues dans cet espace maritime, sachant qu’avec la grave crise économique qu’il traverse, le Liban a énormément besoin des recettes que pourrait lui apporter l’exploitation des ressources contenues dans les différents blocs maritimes. Il s’agit donc d’une proposition concrète qui intervient à un moment particulièrement délicat pour l’économie libanaise. Les Américains ont même accepté l’idée de négociations sur l’échange des territoires sous la houlette des Nations unies, ce qu’ils avaient refusé auparavant.
Selon des sources politiques, la position officielle libanaise n’était pas unifiée face aux propositions américaines. Le Premier ministre et le ministre des Affaires étrangères ont estimé qu’il y avait là une possibilité réelle pour le Liban de reprendre des territoires actuellement occupés par les Israéliens, sans faire de concessions importantes ni remettre en cause la souveraineté libanaise. Par conséquent, la proposition mérite d’être examinée sérieusement.
En revanche, le président de la Chambre a opposé un refus total de dissocier le dossier des frontières maritimes de celui des frontières terrestres. Nabih Berry avait adopté cette position par le passé et il l’a réitérée devant M. Pompeo. Selon des sources proches de Aïn el-Tiné, M. Berry estimerait que la dissociation du dossier des frontières maritimes de celui des frontières terrestres comporte plusieurs pièges cachés. En apparence, le Liban obtiendrait des territoires qu’il réclame, mais en réalité, il ferait des concessions sur la zone maritime. Ensuite, le fait de régler le problème des frontières terrestres, à travers des négociations menées sous la houlette des Nations unies et avec la participation des États-Unis, pourrait devenir un prétexte pour désarmer le Hezbollah : la résistance, reconnue dans l’accord de Taëf comme étant légitime tant qu’il y a des territoires libanais occupés, n’aurait plus alors de raison d’être. Le grand débat sur les armes du Hezbollah s’imposerait donc de nouveau avec force dans la vie politique interne. Selon les sources précitées, il ne s’agirait pas là d’une question secondaire. Au contraire, elle serait au cœur des intérêts israéliens et américains. Ceux-ci imposent de sécuriser avant tout l’exploitation des ressources maritimes, actuellement menacée par la puissance militaire du Hezbollah. Mais, toujours selon les mêmes sources, il s’agit aussi d’une question stratégique pour les Américains. En effet, la stratégie américaine, qui cherche principalement à affaiblir considérablement la Russie, repose sur l’idée d’empêcher Moscou de vendre son gaz à l’Europe. Cette vente constitue en effet une des principales ressources pour l’économie russe et en même temps, un moyen de pression de Moscou sur les pays de l’Union européenne. Mais pour pouvoir couper la voie à l’achat de gaz russe par les Européens, il faudrait leur assurer une autre source d’approvisionnement. Or, les grandes réserves de gaz dans la région sont en Russie, en Iran et au Qatar. Mais pour que le gaz de Doha puisse arriver en Europe, il faut lui assurer un chemin qui passe forcément par les côtes israéliennes et chypriotes, toutes proches des côtes libanaises sous le contrôle des missiles du Hezbollah. Pour les sources proches de Aïn el-Tiné, ce serait là le cœur du problème et la véritable raison pour laquelle Washington souhaiterait dissocier les deux dossiers des frontières maritimes et terrestres. Il s’agirait donc de calmer en quelque sorte le Liban en lui cédant une partie des territoires qu’il réclame pour à la fois permettre aux Israéliens d’exploiter en toute sécurité les ressources maritimes dans l’espace controversé, selon les normes qui seront fixées par la commission internationale d’arbitrage, et en même temps de mettre la main sur la route du gaz du Qatar vers l’Europe et porter ainsi un coup décisif à l’économie russe... La théorie peut paraître compliquée, mais la situation dans cette région l’est aussi et le Liban est actuellement le théâtre de grands tiraillements régionaux et internationaux.
commentaires (13)
Frontières ci et frontières ça... Hahaha... Wlek ya aami donner nous de l'électricité, de l'eau potable, des écoles et des routes des des des... Le pétrole? On s'en fout qu'on est un km carré ou ellipsoïde de plus... On n'en verra jamais la couleur car nos valeureux polichinels, pardon, politiciens de tout bord et de toute croyance, avec ou sans turban en soutane ou en maillot etc. C'est eux qui en verront couleur et intérêt alors que nous on sera toujours là a rêver d'un robinet crachant de l'eau potable. Dis leur Scarlett toi qui connait les secrets des dieux et des diables...
Wlek Sanferlou
15 h 12, le 30 mars 2019